Des citoyens de Saint-Lambert désirent sauver l'ancienne église anglicane St. Barnabas que l'administration du maire Sean Finn veut déclasser de son statut de monument historique. Mercredi soir, la Ville a exprimé une certaine ouverture au projet d'y créer une maison des arts et de la culture.

L'ancienne église d'inspiration Tudor de l'avenue Lorne a 125 ans. Elle a été construite en 1884. Il s'agit du plus vieil édifice non résidentiel de Saint-Lambert. Église devenue temple maçonnique (actuellement situé près de la nouvelle église anglicane), le bâtiment a été acheté par la Ville pour 160 000 $ en 1998 pour «favoriser sa rénovation et son utilisation à des fins communautaires», selon un document de la Ville.

En 2000, le Comité consultatif d'urbanisme (CCU) a recommandé de le classer monument historique, en vertu de la Loi sur les biens culturels. Il précisait : «Pour les générations futures, nous avons la responsabilité de transmettre cet édifice dans toute la richesse de son authenticité». Le conseil municipal a donc classé l'édifice. Seul Sean Finn a voté contre.

Depuis, l'édifice n'a pas été réparé malgré la loi qui oblige la Ville à entretenir ses monuments historiques. Dans son bulletin de juin-juillet, le maire écrit que les «derniers appels pour des propositions d'exploitation de l'édifice n'ont pas donné les résultats escomptés» et que «cet immeuble devient un handicap pour le développement du centre-ville».

Des citoyens s'inquiètent que le nouveau plan d'urbanisme, qui a modifié les usages permis dans la zone de l'église, prépare le terrain à l'arrivée, par exemple, d'un magasin de pièces automobiles à cet endroit. «Une pétition de 795 noms a été constituée en faveur de l'église», a dit, au cours de l'assemblée de mercredi soir, la citoyenne Louise D'Aoust, qui réclame depuis des années une maison des arts et de la culture à cet endroit.

L'ancien conseiller municipal Marc-André Croteau a fait état du projet, ce mercredi. Il veut obtenir un bail pour créer cette Maison des arts et de la culture et, donc, qu'on ne déclasse pas l'édifice. Sinon, le projet ne sera pas subventionné par Québec. En l'absence du maire Finn, au cours d'une séance du conseil où le climat était à l'harmonie, la directrice générale de Saint-Lambert, Michèle Lortie, a laissé savoir que la Ville est intéressée par ce projet. «Ce serait un lieu pour les arts visuels, des conférences, le visionnement de films de répertoire, a dit M. Croteau à La Presse. J'ai confiance en ce projet si Mme Lortie est de bonne foi.»

La Presse a joint à Sydney, en Australie, Dinu Bumbaru, le directeur des programmes d'Héritage Montréal. Il estime que la décision de déclasser l'ancienne église «s'ajouterait aux moments sombres pour le patrimoine qu'ont été la démolition du couvent de Montmagny par la Ville en 1986, la démolition du couvent Saint-Isidore à Longue-Pointe en 1996, monument historique cité par la Ville de Montréal que l'administration Bourque a laissé démolir, ou, il y a quelques mois, la démolition de la Maison Henry dans le Vieux-Hull, autre monument historique cité par la municipalité mais partiellement démoli faute d'attention sérieuse des instances municipales».

M. Bumbaru estime que Saint-Lambert possède un patrimoine «très intéressant considérant sa taille». «L'église-temple maçonnique avait fait l'objet de démarches citoyennes auxquelles Héritage Montréal a apporté son appui il y a une dizaine d'années, a-t-il dit. Le souhait de la mairie de procéder de la sorte apparaît contraire à la responsabilité d'une administration municipale en matière de patrimoine. Et en plus, le gouvernement du Québec annonce une réforme de la Loi sur les biens culturels, celle qui a permis à Saint-Lambert de citer l'église comme «monument historique. Assisterait-on à une liquidation du patrimoine?»

Le CCU, composé de sept membres, dont deux élus proches du maire Finn, présentera ses recommandations sur le sujet le 21 juillet. Le 12 août, le conseil municipal décidera du sort de l'ancienne église.

Précision : La photo accompagnant ce texte dans l'édition papier de La Presse du 10 juillet ne représente pas la bonne église. Nos excuses.