«Dieu n'existe probablement pas. Alors cessez de vous inquiéter et profitez de la vie.» Ce conseil plutôt singulier fera partie du paysage montréalais le mois prochain. Dès lundi, des autobus du centre-ville arboreront ce slogan dans le cadre d'une campagne publicitaire de l'Association humaniste du Québec (AHQ).

L'offensive de l'AHQ est un calque d'une campagne qui s'est déroulée en Angleterre au début de 2009. À la mi-janvier, le même message avait été placardé pendant quatre semaines sur près de 800 autobus à Londres et dans une vingtaine de villes britanniques.

 

Le concept a plu à l'Association humaniste du Québec, un regroupement de 170 membres qui existe depuis 2005. Au début du mois, ils ont conclu une entente avec l'agence responsable de la publicité pour la Société de transports de Montréal. Dix autobus présenteront le slogan pendant quatre semaines.

L'AHQ souhaite ainsi recruter des membres et financer ses activités, admet Michel Virard, président de l'AHQ. La publicité invite d'ailleurs la population à envoyer des dons. «Il y a plus de 400 000 non-croyants au Québec, selon Statistique Canada. Nous sommes donc le second groupe religieux. On est sûrs que plusieurs d'entre eux vont s'intéresser à nous!»

«Mais le but ultime, c'est d'être accepté comme citoyen à part entière», ajoute M. Virard, qui estime que les athées sont parfois victimes de discrimination.

Il déplore notamment que des sociétés de transport de Colombie-Britannique, de Nouvelle-Écosse et d'Ontario aient refusé de diffuser la campagne «bus athées». L'Italie et l'Australie se sont également opposées au projet cette année. Au Canada, seul Toronto fera une campagne similaire ce printemps.

La STM, qui a déjà diffusé des publicités du diocèse de Montréal et de l'oratoire Saint-Joseph, estime que le slogan athée ne «cause préjudice à personne».

Des groupes religieux réagissent

Les institutions religieuses jointes par La Presse ont peu réagi au contenu de la publicité. L'archevêque de Montréal, le cardinal Jean-Claude Turcotte, n'a pas accepté notre demande d'entrevue. Son homologue de Québec, Mgr Marc Ouellet, n'était pas disponible pour commenter.

Bertrand Ouellet, secrétaire général de l'Assemblée des évêques catholiques du Québec, s'est dit «heureux que nous vivions dans une société de liberté de pensée et d'expression». Il a souligné que le slogan disait que Dieu n'existe probablement pas. «Ça veut dire qu'ils ne sont pas si sûrs de leur affirmation!» a-t-il dit d'un ton blagueur.

Louis Rousseau, professeur à l'UQAM, doute que la campagne de l'AHQ suscite un débat au Québec. «Ici, c'est un non-sujet si on compare avec la situation qui prévalait en Angleterre», croit-il.

En effet, la campagne britannique des «bus athées» répliquait à une organisation évangélique qui avait écrit sur son site internet que les non-chrétiens iraient en enfer. Des groupes chrétiens ont par la suite contre-attaqué avec une campagne sur 200 autobus.

Solange Lefebvre, titulaire de la chaire Religion, culture et société de l'Université de Montréal, croit pour sa part que la campagne va choquer certains croyants. Selon elle, la publicité reflète «un nouvel athéisme», qui «fonctionne de plus en plus comme les religions».