Le gouvernement du Québec va payer un taux d'intérêt de 7% en confiant le financement de la construction du Centre de recherche du CHUM à un consortium privé, plutôt que 4,7% s'il le finançait lui-même. Au bout de 30 ans, cette petite différence lui aura coûté 320 millions de dollars de plus.

Le consortium Accès Recherche Montréal L.P. inclura les coûts de l'emprunt à un taux de 7,067% dans le loyer de 43 millions que paiera le gouvernement chaque année, indique l'agence de notation de crédit DBRS dans une analyse publiée mercredi. Cette semaine, les obligations du gouvernement du Québec sur 30 ans se négociaient à un taux de 4,762% sur les marchés.

 

Les trois quarts du loyer annuel versé au consortium couvrent le remboursement de l'emprunt et le coût des intérêts. Le quart restant couvre essentiellement les frais de l'entretien du bâtiment. Ceux-ci varient peu, que le bâtiment soit construit selon un mode traditionnel ou selon le mode du partenariat public-privé (PPP).

Écart important

Le coût des intérêts pour le CRCHUM apparaît beaucoup plus élevé en mode PPP, a souligné Jean-Pierre Aubry, membre du comité des politiques publiques de l'Association des économistes québécois. «L'écart entre les deux taux d'intérêt est important, a-t-il dit hier. Pourquoi c'est comme ça, ça me dépasse.»

À un taux de 7%, la partie du loyer consacrée au capital et aux intérêts s'élèvera à 980 millions de dollars en 30 ans. À un taux de 4,7%, elle se serait élevée à 660 millions, en dollars d'aujourd'hui.

Infrastructure Québec a remplacé l'Agence des PPP. Personne n'a pu expliquer à La Presse, hier, pourquoi le gouvernement a choisi un mode de financement aussi coûteux.

Le coût de construction du CRCHUM s'élèvera à 470 millions, en dollars d'aujourd'hui (cela exclut les coûts des intérêts et de l'entretien). Le gouvernement paiera 40% de ce prix pendant la construction, soit 190 millions, révèle DBRS. Il commencera à payer un loyer annuel de 43 millions lorsque le bâtiment pourra être occupé, au plus tôt en 2013, au plus tard en 2015. Il en prendra possession au bout de 30 ans.

Tout de même risqué

Un des avantages présumés du mode PPP consiste à confier les risques au consortium privé. Mais l'analyse de DBRS montre que le gouvernement et le CHUM assumeront plusieurs risques, notamment tout ce qui concerne les cas de «force majeure», ainsi qu'une partie des coûts de l'inflation pendant la période d'exploitation de 30 ans.

«Le CRCHUM se paiera à des taux privés, mais les risques seront publics, a dit le député Sylvain Simard, critique du Parti québécois en matière de PPP. L'agence DBRS répète à plusieurs reprises que les risques que court le consortium Accès Recherche Montréal L.P. sont extrêmement faibles.»

Ce consortium est formé par la société québécoise Fiera-Axium Recherche L.P. et la société française Meridiam Infrastructure. La construction est confiée à la coentreprise constituée de Pomerleau, un des plus grands entrepreneurs du Québec, et Verreault, une filiale du groupe d'ingénieurs Dessau. La coentreprise a l'intention de sous-traiter 85% du travail, indique DBRS.

Le centre de recherche aura une superficie de presque 70 000 m2. L'immeuble qui abritait les locaux de Vidéotron, rue Viger, sera démoli. Il sera remplacé par un bâtiment de 15 étages, consacré à la recherche et à l'enseignement. Une aile de six étages, consacrée à l'administration, donnera sur la rue Saint-Antoine. Elle sera liée au bâtiment principal par une agora de deux étages, érigée au-dessus de l'autoroute Ville-Marie. L'entrée principale fera face au parc Chénier et à la rue Saint-Denis.

La construction du nouveau CHUM (Centre hospitalier de l'Université de Montréal), de l'autre côté de la rue Viger, pourrait entraver l'accès au chantier du Centre de recherche, ajoute DBRS. «Mais tous comprennent que le projet de construction du CHUM a au moins un an de retard», souligne l'agence. La construction du CHUM comme tel, sur l'emplacement de l'hôpital Saint-Luc, a sans cesse été reportée au cours des dernières années.