Pourquoi la violence contre les femmes persiste-t-elle? C'est à cette vaste question qu'ont tenté de répondre hier les invités du deuxième colloque international consacré à la violence envers les femmes, à Montréal, en conclusion de quatre jours de débats, de conférences et d'activités.

De l'agression de la journaliste américaine Lara Logan en Égypte à l'affaire Dominique Strauss-Kahn en passant par les «marches des salopes», l'actualité rappelle que la violence faite aux femmes existe toujours. Et que les femmes peuvent, de surcroît, l'exercer elles-mêmes. «La violence envers les femmes ne cessera pas, croit Francine Lavoie, professeure à l'Université Laval. Il faut demeurer vigilants afin d'en préciser l'étendue et pour mieux réagir.»

En dépit des avancées des dernières décennies, les femmes demeurent encore victimes d'inégalités sociale, politique et économique. Pire: la violence faite aux femmes n'est souvent pas reconnue pour ce qu'elle est. Alexa Conradi, présidente de la Fédération des femmes du Québec, cite l'exemple du chanteur Bertrand Cantat, condamné pour le meurtre de sa conjointe, pour illustrer que de grands pans de la société voient encore la violence conjugale comme un simple excès de passion. La violence faite aux femmes a aussi ses racines politiques, croit Alexa Conradi.

Fait étonnant, les jeunes sont les plus susceptibles de reproduire la violence ou d'en être victimes. Chez les adolescents, la jalousie est considérée comme une preuve d'amour. Plusieurs statistiques montrent aussi que, sur la question du consentement sexuel, il y a encore des progrès à faire: en Angleterre, la moitié des jeunes hommes croient qu'avoir des relations sexuelles avec une femme trop ivre pour y consentir n'est pas un viol. «On dispose de peu de recherches sur les hommes, on ne sait pas comment faire pour qu'ils se sentent concernés», explique Holly Johnson, professeure à l'Université d'Ottawa.

Mieux comprendre la victimisation

Enfin, Stéphane Guay, professeur à l'Université de Montréal, croit que la violence envers les femmes pourrait s'atténuer si l'on se penchait sur les victimes elles-mêmes. «On connaît peu de choses sur les facteurs de risque de violence conjugale. On connaît peu la transmission intergénérationnelle de la victimisation», croit ce spécialiste du stress post-traumatique. Les victimes potentielles tendent elles-mêmes à ne pas voir la violence comme un problème. De plus grandes connaissances sur la victimisation permettraient non pas de responsabiliser les victimes, mais de comprendre ce qui mène et ce qui maintient la victimisation, croit-il.