Environ 300 policiers montréalais par année ont recours aux services psychologiques offerts par l'employeur. Contrairement à la croyance populaire, des études démontrent qu'ils ne sont pas plus susceptibles d'avoir des troubles psychologiques que le reste de la population.

Entre 2006 et 2010, le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) a ouvert 1375 dossiers de services psychologiques internes et externes, selon les données obtenues par La Presse en vertu de la Loi sur l'accès à l'information. Les consultations cliniques internes et externes ont coûté plus de 2 millions de dollars pour ces 5 années.

Est-ce beaucoup? «Ça correspond environ à la moyenne de la population», répond le Dr Normand Martin, chef de section du Programme d'aide aux policiers du SPVM. Moins de 7% des 4600 policiers du SPVM consultent un psychologue.

Des études réalisées au cours des dernières années tendent à démontrer que, malgré le stress et les risques inhérents à leur profession, les policiers ne sont pas plus susceptibles que d'autres de souffrir de détresse psychologique et d'épuisement professionnel.

C'est la conclusion d'un projet de recherche auquel participe Pierre Durand, professeur à l'École de relations industrielles de l'Université de Montréal et membre de l'Équipe de recherche sur le travail et la santé mentale.

Pierre Durand, son collègue Alain Marchand et des étudiants diplômés ont sondé 410 employés policiers et civils du SPVM de décembre 2008 à janvier 2009. Résultat: «La proportion de gens qui souffrent de détresse psychologique ou d'épuisement professionnel n'est pas plus élevée chez les policiers que chez les civils», indique M. Durand.

Les cas de stress post-traumatique ne sont pas plus nombreux chez les policiers, selon une autre étude publiée l'an dernier par l'Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et en sécurité au travail. Seulement 7,6% des policiers montréalais qui ont vécu un événement traumatisant ont connu un épisode de stress post-traumatique.

Une formation pour faire face au stress

Plusieurs facteurs expliquent ce surprenant constat, selon le coauteur de l'étude, André Marchand, professeur au département de psychologie de l'UQAM et chercheur au Centre de recherche Fernand-Seguin. Les policiers sont sélectionnés, souligne-t-il, et leur formation leur offre des outils pour faire face au stress de leur profession.

Pierre Durand rappelle pour sa part que le soutien des pairs est très présent au sein de la police. Enfin, les deux chercheurs soulignent que le SPVM offre des programmes de soutien actif à ses employés.

La mise en place du Programme d'aide aux policiers et policières (PAPP), en 1990, a eu un impact positif chez les policiers, selon le chef de section du programme, Normand Martin. Il souligne que le taux de suicide a chuté de 78% au SPVM au cours des 20 dernières années.

«Au départ, la police et les psychologues ne se comprenaient pas nécessairement beaucoup, raconte M. Martin. La police était dans le concret, et le psychologue était vu comme quelqu'un dans les nuages, dans les émotions.» Mais de fil en aiguille, le rapprochement s'est fait; le programme d'aide est aujourd'hui bien intégré au SPVM.

L'équipe de psychologues fait 3000 consultations par année. Elle offre un service 7 jours sur 7, 24 heures sur 24 pour être présente au moment d'événements majeurs. Ils s'occupent d'un programme de prévention du suicide et d'un volet de formation des superviseurs. Ils organisent également des rencontres de prévention pour les policiers qui occupent des fonctions à risque (les agents affectés aux agressions sexuelles, par exemple).

- Avec la collaboration de William Leclerc