Les premiers enfants de la réforme terminent cette semaine leur premier trimestre de cégep. Contrairement à ce qu'appréhendaient plusieurs enseignants, ces élèves ont très bien réussi, reconnaissent les syndicats de l'enseignement.

«Force est de constater qu'il n'y a pas eu de grand drame avec les élèves de la réforme», reconnaît le président de la Fédération nationale des enseignantes et enseignants du Québec (FNEEQ-CSN), Jean Trudelle.

«On avait des préoccupations au début de l'année. Mais on n'a reçu aucune plainte de la part de nos membres», confirme le président de la Fédération étudiante collégiale du Québec (FECQ), Mario Beauchemin. De l'avis des deux fédérations, le sujet chaud actuellement dans les cégeps est plutôt l'intégration des élèves en difficulté, qui sont de plus en plus nombreux au collégial.

Depuis le mois de septembre, La Presse suit quatre élèves issus du renouveau pédagogique qui faisaient leurs premiers pas au cégep. Aujourd'hui plongés dans les examens de fin de trimestre, les quatre élèves ne sont pas vraiment surpris de savoir que leur cohorte a aussi bien réussi que leurs prédécesseurs.

Voici un aperçu de leurs états d'âme.

«Ça ne va pas comme je voudrais»

Nom: Hannah Brais-Harvey

Âge: 17 ans

Domaine d'études: sciences de la nature

Lieu: cégep de Rouyn-Noranda

En entrant au cégep en sciences de la nature, Hannah voulait se diriger en médecine. Elle a encore ce désir. Mais ses notes, quoique fort respectables, ne sont pas encore assez fortes. «Ça ne va pas comme je voudrais, mais au pire, je prendrai un autre chemin pour y arriver», dit-elle. Membre de l'équipe de badminton de son cégep, Hannah n'a pas encore le temps de travailler. «Je dois étudier!» Si elle pouvait revenir au début de l'année, Hannah avoue qu'elle commencerait à se préparer plus tôt pour chacun de ses examens. «Il faut prévenir les jeunes du secondaire là-dessus: préparez-vous à travailler fort. C'est dur, le cégep!»

«On a le même cerveau que les autres»

Nom: Alexis Caron

Âge: 17 ans

Domaine d'études: art et technologie des médias

Lieu: cégep de Jonquière

Plus que jamais, Alexis se sent «à sa place» au cégep de Jonquière. «Je referais les mêmes choix n'importe quand. Je suis superheureux dans ce que je fais», affirme-t-il. Le jeune homme est toujours engagé à fond dans l'équipe d'improvisation de son cégep et à la radio communautaire. Et comme si ce n'était pas assez, il a trouvé un emploi à temps partiel il y a un mois au casse-croûte de l'aréna local. «Je suis occupé, mais j'ai le temps d'étudier», dit-il. Alexis, qui a une moyenne d'environ 70% jusqu'à maintenant, reconnaît toutefois que ses notes «ne sont pas fulgurantes». «Je ne me suis pas assez forcé», avoue-t-il. Son conseil aux jeunes du secondaire qui feront le saut au collégial l'an prochain? «Soyez prêts à vous organiser et à voler de vos propres ailes! La fin de session, c'est stressant, mais si on est organisé, on s'en sort.» Alexis n'est pas étonné d'apprendre que les enfants de la réforme obtiennent de bons résultats au cégep. «Le monde s'est énervé pour rien avec nous, pense-t-il. On a le même cerveau que les autres. C'était prévisible qu'on serait aussi bons.»

«On court!»

Nom: Amélie Lalande

Âge: 17 ans

Domaine d'études: thanatologie

Lieu: cégep de Rosemont

Mardi après-midi, Amélie était quelque peu stressée lorsque La Presse l'a jointe au téléphone. Elle se préparait à passer son examen de déontologie, matière pour laquelle elle est actuellement en échec. «J'ai échoué à l'examen de mi-session. Je ne suis pas la seule. La moyenne du groupe était de 51%! J'ai bien étudié, cette fois-ci. Si je coule, ce sera ma faute. Je vais devoir reprendre le cours l'automne prochain», explique-t-elle. Pour Amélie, les enseignants du secondaire ont raison de dire que les études collégiales sont ardues. «On court! Il faut travailler, planifier et être sérieusement à son affaire», dit-elle. En français, Amélie a aussi éprouvé quelques difficultés. Elle s'est rendue au centre d'aide du cégep pour améliorer ses résultats. «Les profs ne viennent pas te voir si tu as de la misère. Tu dois chercher de l'aide toi-même», affirme-t-elle. Amélie reconnaît être «un peu surprise» de savoir que ses collègues et elle sont aussi bons que les élèves d'avant la réforme. «Je m'attendais à ce qu'on soit moins bons... Je suis contente de savoir que ce n'est pas le cas!»

«J'ai vraiment besoin de vacances»

Nom: Émilie Major-Parent

Âge: 17 ans

Domaine d'études: thanatologie Lieu: cégep de Rosemont

Émilie sera en congé à partir de demain. Et elle a hâte. «J'ai vraiment besoin de vacances!» Jusqu'à maintenant, ses notes ne sont «pas mauvaises». «Mais je coule mon cours de déontologie. C'est vraiment très dur. La marche est haute.» À mi-trimestre, Émilie a envisagé de prolonger sa technique d'un an pour alléger son horaire. Mais elle a aujourd'hui d'autres objectifs: «Je vais faire un autre trimestre en thanatologie, mais seulement avec des cours de base. Après, je vais m'inscrire dans un cheminement préuniversitaire parce que je veux aller à l'université en psychologie. J'ai eu un cours là-dessus et ça m'a emballée!» L'an prochain, Émilie veut aller au cégep Montmorency, à Laval, où elle habite. «Ça va me faire gagner du temps, raconte la jeune fille, qui travaille à temps partiel dans une boutique de vêtements. Je réalise que le travail peut nuire aux études. J'ai dû travailler moins d'heures, ce trimestre.» Quant à la réussite des élèves issus de la réforme au cégep, cela ne l'étonne pas tellement: «Je trouve surtout que les élèves qui ont fréquenté l'école publique, comme moi, sont moins bons que ceux du privé. Nous sommes surtout moins organisés. Mais ça n'a rien à voir avec la réforme!»

Photo: archives Le Quotidien

«Je referais les mêmes choix n'importe quand. Je suis superheureux dans ce que je fais», affirme Alexis Caron, élève au cégep de Jonquière.