Reconstruire une partie du corps et restaurer une œuvre d’art peuvent sembler deux actes très éloignés l’un de l’autre. Pourtant, l’esthétisme est au cœur même du travail de restauration d’œuvres et de chirurgie esthétique. Inspirées par les modèles de voitures hybrides de Toyota, les Entrevues Hybrides sont une série de six entretiens qui réunissent autour d’un sujet commun deux professionnels issus de domaines différents.

Qu’est-ce qu’un XTRA?

XTRA est une section qui regroupe des contenus promotionnels produits par ou pour des annonceurs.

Lorsqu’elle reçoit une œuvre à traiter, la restauratrice Pilar Hernandez, qui exerce ses activités en atelier privé à Ars Conserva, doit d’abord l’analyser en prenant des photos et des notes de toutes les altérations qui existent – taches d’humidité, saleté, insectes ou autres – afin de bien documenter celle-ci.

« Selon le type d’œuvre, on peut l’examiner à l’aide de rayons X ou de lumières spéciales, comme l’ultraviolet, qui détectent les premières traces du travail d’un peintre ou ses ajouts de couches de peinture et ses retouches », explique-t-elle. Tous ces renseignements appuieront les recommandations qu’elle fera au client ou au conservateur de musée pour restaurer l’œuvre.

Ce processus de documentation existe aussi en chirurgie esthétique, où le spécialiste examine le patient et rencontre ce dernier pour bien comprendre ce qu’il désire.

« On discute de ce qui le dérange sur son corps et de ses objectifs. Parfois, je lui demande aussi de me fournir des photos de ce qu’il voudrait, puis je lui fais passer un examen physique qui me permettra de lui présenter les avantages et les inconvénients des diverses options qui s’offrent à lui pour améliorer son corps », mentionne Priscille Grenier-Vallée, chirurgienne plastique et de reconstruction.

La mode aux rayons X

En restauration d’œuvres d’art, les objets soumis à différentes conditions lumineuses, comme les rayons X, permettent parfois de révéler des éléments qui auraient été dissimulés au fil du temps, notamment des changements dans le style ou des tabous. C’est le cas du tableau Le vieux guitariste aveugle de Pablo Picasso, dans lequel les scientifiques de l’Institut d’art de Chicago ont trouvé, à l’aide d’infrarouges et de rayons X, d’autres silhouettes cachées sous l’image existante. Certains croient que l’artiste aurait été obligé de peindre sur d’anciennes toiles, faute d’avoir assez d’argent pour en acheter de nouvelles.

« Un échantillon de peinture ou de fibres de papier aide aussi à déterminer l’époque où une œuvre a été réalisée. On essaiera de trouver notamment des pigments qui n’existaient pas à une période ou qui, au contraire, étaient utilisés couramment », indique Pilar Hernandez, qui s’est spécialisée en restauration de photographies, d’œuvres sur papier, de céramiques et d’objets archéologiques.

La popularité de certaines chirurgies esthétiques est également dictée par les modes, qui varient au fil des années. « Dans le cas des abdominoplasties, par exemple, la cicatrice est placée différemment en fonction de la mode des bikinis, allant de la taille vraiment haute des années 1980 à la taille basse des années 1990 et 2000, soutient Priscille Grenier-Vallée. Certaines demandent des réajustements pour suivre ces tendances. »

De la science à l’esthétisme

Pour les deux métiers, l’esthétisme repose principalement sur des principes préétablis. « Notre formation nous apprend notamment à bien analyser un visage et à placer les cicatrices dans les zones où il y a des ridules, affirme Priscille Grenier-Vallée. C’est sûr qu’on recherche aussi une certaine symétrie : on suit des lignes directrices qui nous informent sur ce qui est considéré comme étant beau. »

Là où elle doit faire le plus appel à sa créativité est dans le cas de l’excision des cancers de la peau avec reconstruction. « Il faut bien analyser la personne, car le cancer change toujours d’endroit. Si je l’enlève à un certain emplacement sur le visage, cela peut, notamment, soulever son sourcil, selon son type de peau. »

En restauration, le code de déontologie précise que le professionnel doit respecter certaines règles, comme l’histoire de l’objet et les intentions initiales de l’artiste. « Le jugement esthétique jouera uniquement un rôle lorsqu’on doit, par exemple, estimer les lacunes d’une œuvre, c’est-à-dire s’il manque des couleurs, ou si des lettres sont effacées, mentionne Pilar Hernandez. S’il y a des motifs qui peuvent être répétés, on pourra les reproduire, mais si on ignore ce qui se trouvait à un endroit, on ne peut pas inventer quelque chose. »

C’est le « client » qui jugera ultimement du résultat. D’où l’importance d’avoir géré ses attentes en amont et de l’avoir avisé de toutes les étapes et des risques.

Avec 15 ans d’expérience en restauration d’œuvres d’art, autant au privé que dans des institutions reconnues au Canada, au Mexique et en France, Pilar Hernandez exerce maintenant ses activités en atelier privé à Ars Conserva et se spécialise en restauration de photographies, d’œuvres sur papier, de céramique et d’objets archéologiques.

Priscille Grenier-Vallée travaille principalement comme chirurgienne plastique et de reconstruction pour les personnes qui ont un problème médical – accidents, cancer, brûlures, etc. – au Centre hospitalier affilié universitaire régional du CIUSS de la Mauricie-et-du-Centre-du-Québec, mais aussi au privé pour des chirurgies purement esthétiques à la clinique Plastie.

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