Trois vols annulés à la dernière minute et des centaines de passagers frustrés: Level n'a pas connu un démarrage en douceur à l'aéroport Montréal-Trudeau l'été dernier. Le transporteur aérien au rabais a quand même décidé de reprendre la liaison Montréal-Paris dès le mois de mai. S'agit-il d'un achat risqué? Le point sur la question en quatre temps.

Peut-on faire confiance à Level?

Les experts consultés répondent oui... du bout des lèvres. «Level ne débarque pas de nulle part: il fait partie d'un groupe qui inclut Iberia, Air Lingus et British, remarque Jacques Roy, professeur à HEC Montréal. Mais ils n'ont pas très bien agi pour une entreprise qui veut continuer ses activités. Moi, j'y penserais deux fois avant de réserver, j'attendrais d'avoir l'assurance qu'ils peuvent bien fonctionner.» Un été de plus, par exemple. John Gradek, coordonnateur du programme d'aviation de l'Université McGill, rappelle que les problèmes de Level n'étaient pas limités à Montréal: des vols ont aussi été annulés en France et aux États-Unis. De plus, les passagers ont eu droit à un remboursement du billet, sans systématiquement recevoir d'indemnité supplémentaire pour les désagréments. «Ce n'est pas une situation idéale», dit M. Gradek.

Voyager sur les ailes de Level, est-ce vraiment moins cher?

Oui... et non: tout dépend des options retenues. Par exemple, un vol «nu» (sans sélection de siège, sans repas ni bagage en soute) entre Montréal et Paris, du 7 au 18 mai à bord de Level, coûte 497,07 $, contre 670,94 $ pour Air Transat (avec un repas). En revanche, l'écart se rétrécit dès que l'on ajoute un repas - le vol dure 6 h 50 min -, que l'on réserve son siège et que l'on ajoute un bagage: 795,18 $ avec Level, contre 780,85 $ sur Air Transat, 821,03 $ sur Air Canada (sans sélection de siège), 881,03 $ sur Air France... et 903 $ avec WOW (sans repas et avec une escale en Islande). Pour profiter des bas prix d'un transporteur au rabais, «il faut voyager léger, sans les suppléments non nécessaires [comme la sélection de siège et les repas], sinon il est possible que ce ne soit pas moins cher», remarque Andrew D'amours, de Flytrippers, qui a pris plus d'une centaine de vols au rabais et n'hésiterait pas à voler avec Level. «Tout dépend des priorités des voyageurs : que voyager ne soit pas cher, ou que voyager soit pratique.»

Comment se protéger en cas d'annulation?

D'abord, en payant son billet avec une carte de crédit qui offre une couverture adaptée pour ce genre d'événement, dit Andrew D'Amours. Ou alors, en réservant son billet auprès d'une agence de voyages, ce qui donne accès au Fonds d'indemnisation des clients d'agents de voyages (les nuitées d'hôtel manquées pourraient alors aussi être remboursées). Les indemnités de base versées dépendent du port d'embarquement. La nouvelle charte des voyageurs (loi C-49), présentée à Ottawa en décembre dernier, devrait entrer en vigueur à l'été et s'appliquera à tous les voyages faits ultérieurement. En cas de retard ou d'annulation de vol, les indemnités varieront de 400 $ à 1000 $ pour les grandes compagnies aériennes et de 125 $ à 500 $ pour les petites, dans les rangs desquelles sont classés plusieurs transporteurs au rabais comme Level.

Le modèle au rabais est-il viable?

Oui, répond sans hésiter John Gradek. Des transporteurs comme Ryanair, Easyjet ou Southwest, ce dernier actif depuis 1971, ont démontré que le modèle «low cost» est viable. Mais le secret de leur longévité tient dans le fait qu'ils s'en tiennent à des distances relativement courtes, en évitant notamment les vols transatlantiques. «Ça va bien dans les trajets à courte et moyenne durée. Après, ça devient plus difficile d'être rentable», remarque John Gradek. «Tout coûte plus cher pour les vols de longue durée», confirme Jacques Roy. Southwest, qui est l'un des transporteurs affichant la meilleure santé financière, ne vole pas hors des États-Unis et n'a lancé que récemment ses premiers vols vers Hawaii.