Annie-Claude était enceinte de 26 semaines quand elle a pris l'avion. Marie-Claude, de 33. Stacey en était à sa 31e semaine et Joanie, à sa 22e. Si leur grossesse n'a pas empêché ces femmes de voyager, leur compagnie d'assurances aurait pu le faire, tout comme la compagnie aérienne. Leur médecin? Peut-être que oui, peut-être que non. Tour d'horizon.

L'obstétricienne-gynécologue Fanny Lamb le dit par expérience: une grossesse, c'est extrêmement imprévisible - à la maison comme à l'étranger. À preuve, l'une de ses patientes qui a décidé d'accompagner son conjoint dans l'ouest du pays pour un voyage d'affaires. À 28 semaines, enceinte pour la deuxième fois, sans facteurs de risque et avec l'accord de son médecin, elle n'avait pratiquement aucune inquiétude à avoir. Et pourtant.

«Elle a accouché là-bas! Le congrès de quelques jours s'est transformé en un séjour d'un mois, parce que le bébé a dû rester aux soins intensifs et ils ne pouvaient évidemment pas partir sans lui. Ça a généré beaucoup de dépenses imprévues», raconte la Dre Lamb, obstétricienne-gynécologue au CIUSSS de l'Ouest-de-l'Île-de-Montréal.

S'assurer d'être assurée(s)

Ce cas rappelle l'importance pour les futures mamans de s'informer auprès de leur compagnie d'assurances avant le départ. Les assureurs ont des politiques différentes, et chaque cliente a une couverture personnalisée. La majorité d'entre eux offrent une couverture jusqu'à 32 semaines, rarement au-delà du cap des 36 semaines.

«Je devais attendre mon échographie de 20 semaines, parce que j'avais des hématomes et que ma grossesse était considérée comme à risque, raconte Joanie Chartrand. Mon médecin préférait qu'on surveille l'évolution des hématomes, surtout au niveau des assurances. [...] Si j'avais eu à consulter, ça aurait pu être problématique», évoque la maman, qui a finalement pu aller profiter du soleil de Sunny Isles, en Floride, au début du mois de mai.

«Nous, on s'assure que la grossesse est stable et normale, précise la Dre Lamb. Pour les assurances, c'est à la patiente de faire cette démarche-là. Moi, je leur rappelle de vérifier si la couverture est bonne même si elle est enceinte, et si le nouveau-né sera couvert si jamais elle accouche.»

Saviez-vous que?

Quiconque accouche à bord d'un avion qui se trouve dans l'espace aérien canadien ou sur un bateau qui se trouve dans les eaux canadiennes peut faire une demande officielle pour avoir la citoyenneté canadienne. Par ailleurs, la nationalité fait l'objet de traités internationaux et selon la Convention sur la réduction des cas d'apatridie, un enfant qui naît à bord d'un bateau ou d'un avion aura la nationalité du pays où est enregistré l'appareil.

Est-ce dangereux?

Quand Annie-Claude Beaudoin s'est envolée pour l'Espagne en avril dernier, elle était enceinte de 26 semaines. Son vol de près de huit heures n'a pas été de tout repos.

«Le vol a été super agité et on a eu de la turbulence pendant plus de quatre heures consécutives. Je ne pouvais pas me lever ou aller aux toilettes, et ils ne pouvaient rien servir à boire. Ce fut un vol difficile. Moi qui n'enfle jamais, j'étais rendue comme une balloune!», se rappelle la maman de deux enfants, bientôt trois.

Les compagnies aériennes ont chacune leurs restrictions (voir plus bas) par rapport aux voyageuses qui transportent en elles un autre petit passager. La Dre Lamb préfère voir ses patientes dans la semaine précédant leur départ, et elle a l'habitude de leur conseiller de prendre l'assurance annulation. Elle leur suggère, une fois à bord, de porter des bas de contention (un format sur mesure est l'idéal), de marcher dans les allées pour favoriser la circulation et de boire beaucoup. Pour les vols de plus de trois ou quatre heures, ça se complique.

«C'est une autre game», admet la médecin, expliquant qu'il n'existe pas de consensus dans la communauté médicale sur les mesures à prendre.

«On n'a pas de données claires. La grossesse est déjà un facteur de risque pour une thrombo-embolie veineuse [embolie ou phlébite]. On vient ajouter l'immobilisation, qui est aussi un facteur de risque, explique la spécialiste. Ce n'est pas clair dans la littérature si on doit leur donner une thromboprophilaxie, c'est-à-dire une injection qui va éclaircir leur sang. On remet le choix entre les mains de la patiente, qui voyage aussi par choix.»

Par ailleurs, l'obstétricienne-gynécologue relève qu'aucun article dans la littérature médicale ne détaille les risques de rupture prématurée des membranes ou encore des effets directs de l'altitude sur une grossesse. Si les cas d'accouchements à bord d'un avion restent rares, ils ne sont pas impossibles!

Que disent les compagnies aériennes

Air Canada

La passagère doit mentionner sa grossesse à Vacances Air Canada au moment de sa réservation. Selon l'information sur le site internet, les femmes enceintes de 24 semaines ou plus ne seront pas autorisées à bord. Or, une porte-parole de l'entreprise a informé La Presse que les femmes sont admises jusqu'à 36 semaines, mais qu'une évaluation par un de leurs médecins spécialisés en médecine aéronautique peut être exigée.

Air Transat

Jusqu'à 35 semaines, les femmes enceintes sont admises à bord sans restrictions. Entre 36 et 38 semaines, elles doivent présenter un certificat médical délivré dans les 24 heures précédant le départ. À partir de 39 semaines, les futures mamans ne sont plus admises à bord.

Sunwing

Toute femme enceinte peut voyager avec Sunwing, à condition que la grossesse ne soit pas à risque et qu'il n'y ait pas d'antécédents d'accouchement prématuré. La passagère peut voyager jusqu'à sa 36e semaine inclusivement. Le voyage doit être terminé avant la fin des 36 semaines.

Westjet

La compagnie suggère aux femmes enceintes de plus de 36 semaines de consulter un médecin ou une sage-femme avant de voyager. Dans tous les cas, mieux vaut s'informer avant d'acheter son billet d'avion.

PHOTO FOURNIE PAR ANNIE-CLAUDE BEAUDOIN

Quand Annie-Claude Beaudoin s'est envolée pour l'Espagne en avril dernier, elle était enceinte de 26 semaines.