(Terre-Neuve) Moins connu que son équivalent de la côte ouest, le sentier de la Côte-Est et ses paysages d’une incroyable beauté méritent tous les éloges. Et de plus en plus de gens en profitent.

Le brouillard s’installe peu à peu. Bientôt, il ne sera plus possible de voir le phare de Cap Spear, le point le plus à l’est de l’Amérique du Nord. La corne de brume prend la relève dans un paysage de plus en plus fantomatique.

La tente est maintenant montée, les randonneuses peuvent enfin sortir le réchaud pour se faire un bon souper. Ça fait du bien après une longue et magnifique journée sur le sentier de la Côte-Est, sur la péninsule d’Avalon à Terre-Neuve.

C’est aussi le temps de potasser les cartes topographiques pour la journée de demain.

PHOTO MARIE TISON, LA PRESSE

Le départ du sentier de la Côte-Est, à Topsail Beach, sur la péninsule d’Avalon, à Terre-Neuve. Encore 336,5 kilomètres à faire…

Le sentier de la Côte-Est (East Coast Trail) est une succession de 25 sentiers pouvant aller de 2 à 20 km, qui relient de petites communautés entre Topsail Beach et Cappahayden.

La plupart des randonneurs choisissent un des sentiers pour une plaisante journée de randonnée. Plusieurs propriétaires de gîtes touristiques se font d’ailleurs un plaisir de conduire leurs invités à l’extrémité d’un sentier pour aller les cueillir à l’autre bout en fin de journée.

Toutefois, de plus en plus de randonneurs choisissent d’effectuer le trajet d’une traite, une sérieuse randonnée de 336 km qui peut se faire en deux, trois ou quatre semaines.

Créativité

Les défis sont grands. Le sentier de la Côte-Est n’a pas été conçu comme un sentier de longue randonnée. Il y a une demi-douzaine de sites de camping établis, mais la plupart du temps, il faut faire preuve de créativité pour trouver une place où piquer sa tente. Le sol n’est pas nécessairement égal, il n’y a pas toujours un point d’eau à proximité, mais le bruit des vagues est une constante.

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Il y a peu de sites de camping le long du sentier de la Côte-Est. Il faut souvent improviser, ce qui signifie parfois camper au milieu d’un fourré, parfois camper à un endroit superbe mais sans source d’eau à proximité, comme ici près de Cap Spear.

La météo peut constituer un autre défi : la pluie, la bruine et le brouillard font partie intrinsèque de la vie terre-neuvienne. Il faut profiter des belles journées chaudes et ensoleillées pour tout faire sécher.

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Le climat de Terre-Neuve peut être assez humide et brumeux, ce qui crée parfois des paysages fantastiques.

Enfin, il faut souvent marcher le long des routes pour relier les sentiers et traverser les communautés. En fait, les routes asphaltées représentent près de 75 des 336 km du trajet.

On peut toutefois transformer cet inconvénient en atout : plusieurs communautés sont très pittoresques, c’est l’occasion de se payer une petite crème glacée au dépanneur du coin et de jaser avec les habitants au sujet de la météo à venir.

C’est ainsi que, lors de notre passage à la fin de l’été, nous avons pu suivre la progression de l’ouragan Dorian et nous trouver un site de camping très protégé pour laisser passer le gros de la tempête.

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Le littoral de la péninsule d’Avalon est souvent spectaculaire. Ce petit détour sur le sentier de la Côte-Est ne fait pas exception.

Le grand atout du sentier de la Côte-Est, c’est son incomparable beauté. Souvent, il serpente tout en haut de falaises spectaculaires : en bas, les vagues éclatent sur des pans de rochers ou s’engouffrent dans d’étroites criques. Le sentier parcourt également de belles forêts, au sous-bois tapi de fleurs ou de buissons de bleuets et de framboises.

Parfois, le sentier traverse des villages abandonnés, il ne reste que quelques fondations de pierre ou de ciment. Que s’est-il passé ? Pourquoi les gens sont-ils partis ? À Trixs Cove, Reg Brennan se fait un plaisir de raconter aux randonneurs l’histoire d’une de ces communautés qui l’a vu naître au milieu du siècle dernier. Au-dessus d’une bonne tasse de thé dans la maisonnette qu’il vient de se construire sur le site même, armé de photos de famille, il explique comment les habitants ont peu à peu quitté le hameau pour s’installer à proximité d’une nouvelle usine de transformation du poisson.

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La côte est de Terre-Neuve est dangereuse pour les navires. On trouve souvent des épaves le long du sentier.

« Ils construisaient la coquille de la nouvelle maison, juste assez pour pouvoir s’y installer, puis ils revenaient chercher les matériaux de l’ancienne maison pour terminer la nouvelle. »

Les vieilles photos sont étonnantes : on voit que les collines environnantes étaient totalement dénudées. Tout le bois avait été utilisé pour la construction des bateaux et des maisons et il fallait de l’espace pour les vaches et les moutons. Depuis, la forêt a repris ses droits.

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Le sentier longe parfois des champs. On peut voir des vaches, des chevaux et même des moutons. 

Après 19 jours de marche, les randonneuses atteignent Cappahayden. C’est un plaisir d’arriver au but, mais un peu triste aussi. Le sentier de la Côte-Est se prolongera peut-être un jour vers le sud, vers Chance Cove, Cap Race ou Mistaken Point. Les randonneuses reprendront alors le sac à dos pour suivre à nouveau la côte est du Canada.

Mode d’emploi

C’est un groupe de bénévoles qui gère le sentier de la Côte-Est. La vente de cartes topographiques constitue une de leurs principales sources de financement. On peut commander l’ensemble complet de cartes, ou des cartes individuelles, sur leur site. 

Consultez le site du sentier de la Côte-Est (en anglais) : https://www.eastcoasttrail.com/en/index.aspx

Un mordu du sentier de la Côte-Est, Randy Best, a conçu un site internet très complet pour ceux qui voudraient parcourir le sentier en entier ou en sections. Tout y est, notamment les sites possibles de camping, les points d’eau, les épiceries et même les bureaux de poste, pour ceux qui voudraient s’envoyer des colis de ravitaillement. Un incontournable.

Consultez le site de Randy Best (en anglais) : https://www.ectthruhike.com/