Après avoir parcouru le Québec, la chienne Lillie et le Westfalia Willie prennent le large. Direction : la province de Terre-Neuve-et-Labrador.

C’est lorsqu’on a su qu’il tomberait en une journée 60 mm de pluie sur l’ouest de Terre-Neuve qu’on a compris que ce voyage n’allait pas se passer comme prévu.

La route vers North Sydney au volant de Willie le Westfalia bleu gris, la traversée jusqu’à Port-aux-Basques à bord du MV Blue Puttees de Marine Atlantic (où nous avions pu réserver une cabine pour nous et Lillie, notre énergique chienne mi-shetland, mi-corgi)… Tout cela n’était qu’un prélude tranquille à ce mercredi pluvieux du début de juillet où nous avons pris brutalement conscience que notre itinéraire, savamment élaboré en mai et qui couvrait l’île en entier, ne valait pas plus que le papier sur lequel on l’avait imprimé.

On aurait dû s’en douter : la météo est si changeante dans la plus orientale province canadienne que sur le site de MétéoMédia, il n’est pas rare que les pictogrammes pluie, soleil, nuage et orage soient utilisés en même temps pour annoncer la météo d’un seul endroit pour une même journée ! Ici, rien n’est assuré côté température.

« C’est Terre-Neuve… On se réjouit lorsqu’il ne neige pas », nous lancera d’ailleurs une pompiste philosophe lors de notre passage dans l’île de Fogo.

Si, à Rome, il faut faire comme les Romains, aussi bien à Terre-Neuve faire comme les insulaires et apprendre à composer avec ce que le ciel nous envoie. Quitte à mettre un X sur le détour de 800 km pour visiter le site viking de l’Anse-aux-Meadows ou sur le sommet du Gros Morne, qui avait la tête dans les nuages lors de notre passage.

Des randos pour collectionner des beautés

Notre première randonnée du voyage, au parc national du Gros-Morne, se déroulera sous une bruine constante. Rien pour nous empêcher de profiter des longs trottoirs de bois qui nous ont menés à travers forêt et fougères jusqu’aux chutes Bakers Brook gonflées par la pluie.

Lillie, qui à Montréal évite de marcher dans la moindre flaque d’eau, s’est curieusement métamorphosée en phacochère pour s’en donner à cœur joie dans la boue.

  • Le mythique sentier des Tablelands, dans le parc national du Gros-Morne, permet de poser le pied (ou la patte) sur le manteau de la Terre.

    PHOTO STÉPHANIE MORIN, LA PRESSE

    Le mythique sentier des Tablelands, dans le parc national du Gros-Morne, permet de poser le pied (ou la patte) sur le manteau de la Terre.

  • Des moutons vivent en liberté dans les paysages grandioses du parc national du Gros-Morne.

    PHOTO STÉPHANIE MORIN, LA PRESSE

    Des moutons vivent en liberté dans les paysages grandioses du parc national du Gros-Morne.

  • Plusieurs sentiers du parc national du Gros-Morne profitent de trottoirs de bois qui facilient la marche.

    PHOTO STÉPHANIE MORIN, LA PRESSE

    Plusieurs sentiers du parc national du Gros-Morne profitent de trottoirs de bois qui facilient la marche.

  • Un macareux curieux, croqué à Elliston, non loin du parc national Terra-Nova

    PHOTO STÉPHANIE MORIN, LA PRESSE

    Un macareux curieux, croqué à Elliston, non loin du parc national Terra-Nova

  • Une image vaut mille mots : Lillie a adoré son séjour dans l’île de Terre-Neuve !

    PHOTO STÉPHANIE MORIN, LA PRESSE

    Une image vaut mille mots : Lillie a adoré son séjour dans l’île de Terre-Neuve !

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Pendant deux semaines et demie, le scénario se répétera sous le soleil, les nuages ou dans une brume qui finira toujours par se lever : des randonnées dans des forêts moussues ou au sommet de falaises spectaculaires qui se jettent dans une mer houleuse. Les bottes aux pieds (et avec Lillie comme compagne toujours enthousiaste, puisque les chiens sont admis dans presque tous les sentiers), nous avons exploré le parc du Gros-Morne, dont le mythique sentier des Tablelands et ses roches couleur rouille.

Notre coup de cœur du parc reste toutefois le sentier Green Gardens, qui débute dans des landes et se termine dans un paysage côtier spectaculaire fréquenté par des moutons en liberté (ce qui a mis Lillie dans un état de frénésie difficilement gérable !).

Au parc national de Terra-Nova, nous avons croisé des traces d’orignal encore fraîches sur une plage qui borde l’étang Blue Hill. Le géant n’était pas loin, on le sentait, mais on n’a jamais pu le voir… Dans la baie de Trinity, le sentier Skerwink nous a menés le long de falaises abruptes d’où on a pu voir des aiguilles rocheuses sortir de l’eau comme des sentinelles.

Au fil des journées, les beautés n’en finiront plus de s’accumuler.

Le souffle des baleines qui accompagnent nos pas au large du phare de Crow Head. Les hautes herbes qui dansent au vent autour de la communauté irlandaise de Tilting, dans l’île de Fogo. Les macareux qui nous font la cour à Elliston. Les îles rondes comme des dos de tortue, non loin du parc provincial de Blow Me Down… Et partout, des fleurs : kalmias, épilobes, sarracénies pourpres (une fleur carnivore choisie comme emblème de la province). Des marguerites. Des boutons d’or. Des quatre-temps.

Et que dire des deux baleines à bosse qui se sont données en spectacle dans la baie de Twillingate. Dans le bateau d’excursion où Lillie avait aussi pris place, seuls les enfants étaient indifférents au ballet des cétacés, trop occupés à caresser notre chienne !

Une nature sublimée

  • Willie le Westfalia nous a menés sans (trop) d’embûches à travers l’île, dont ici, dans le village de Trinity.

    PHOTO STÉPHANIE MORIN, LA PRESSE

    Willie le Westfalia nous a menés sans (trop) d’embûches à travers l’île, dont ici, dans le village de Trinity.

  • Le petit village de pêcheurs de Quidi Vidi, près de St. John’s, est photogénique à souhait.

    PHOTO STÉPHANIE MORIN, LA PRESSE

    Le petit village de pêcheurs de Quidi Vidi, près de St. John’s, est photogénique à souhait.

  • Le sentier de Salvage, dans l’est de l’île, mène à des décors dignes d’un film.

    PHOTO STÉPHANIE MORIN, LA PRESSE

    Le sentier de Salvage, dans l’est de l’île, mène à des décors dignes d’un film.

  • Décor spectaculaire croqué dans l’île de Fogo

    PHOTO STÉPHANIE MORIN, LA PRESSE

    Décor spectaculaire croqué dans l’île de Fogo

  • Le parc provincial de Blow Me Down a été l’un de nos coups de cœur.

    PHOTO STÉPHANIE MORIN, LA PRESSE

    Le parc provincial de Blow Me Down a été l’un de nos coups de cœur.

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La grande particularité de Terre-Neuve repose dans le fait qu’ici, la nature n’est pas trahie, mais presque sublimée par les habitations humaines. Les villages de pêcheurs ajoutent une touche colorée au paysage, notamment à Trinity et à Bonavista, deux des plus anciennes communautés habitées de l’île et qui sont magnifiquement préservées. Difficile de faire plus photogéniques que ces maisons de bois jaunes, orange ou bleues plantées sur le bord de l’Atlantique.

Quant à la route sur laquelle nous avons passé plusieurs heures (l’île est immense, on l’oublie parfois), elle longe un nombre incalculable de lacs aux eaux noires sur lesquelles flottent des nénuphars en fleurs. On imagine aisément un orignal ou un caribou venir s’y abreuver à la brunante. Les panneaux sont assez clairs, d’ailleurs : un cervidé peut surgir sur la route à tout moment. Nous sommes dans leur royaume, pas le contraire.

Pour Willie le Westfalia, le défi était grand : beaucoup de kilomètres à avaler, des montées et des descentes en quantité, qui plus est sur un revêtement pas toujours lisse. Il faut le dire : sur les chemins secondaires, les nids-de-poule sont parfois assez effrayants (par leur taille, leur nombre et leur profondeur). Mais notre véhicule a tenu bon, malgré son âge vénérable (33 ans, tout de même).

Certes, il a fallu regonfler les pneus à l’occasion et la quasi-totalité du voyage s’est déroulée sans servodirection, en raison d’un bris de la pompe. Mais rien de bien effrayant. Willie a affronté des vents latéraux soutenus et des pluies torrentielles sans fléchir. Mieux, il nous a servi de cocon lors de nos nuitées dans les parcs provinciaux ou nationaux où nous avions choisi de nous poser.

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Le parc provincial de Blow Me Down a été l’un de nos coups de cœur.

Terre-Neuve est un de ces (rares) endroits où chaque bout de route semble mener à de grandes beautés. Résultat : il va falloir revenir pour pousser plus loin encore notre découverte d’une île qui nous a charmés au-delà de ce qu’on avait espéré.

Dix arrêts à mettre à l’itinéraire

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Lillie qui fait des grimaces pour notre photographe !

  • La crémerie du Old Loft Restaurant, à Woody Point, pour déguster un sundae à la chicoutai ou aux airelles, deux baies indigènes de l’île.
  • Le camping Green Point, au parc national du Gros-Morne, pour ses couchers de soleil hauts en couleur.
  • La microbrasserie de Port Rexton, pour déguster un grilled-cheese gourmet accompagné d’une bière locale après (ou avant) une randonnée sur la Skerwink Trail.
  • Le site d’observation des macareux à Elliston, pour voir ces magnifiques oiseaux de près sans devoir prendre le moindre bateau.

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Les baleines à bosse constituent l’une des attractions principales de Twillingate.

  • La croisière d’observation de baleines de l’entreprise Iceberg Quest, à Twillingate, parce que les chiens sont admis à bord du navire.
  • La microbrasserie de Quidi Vidi, à St. John’s, pour sa bière infusée à l’eau d’iceberg, mais aussi sa vue imprenable sur le microvillage de pêcheurs qui lui a donné son nom.

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Le panorama qui s’offre aux randonneurs depuis le sentier de Salvage.

  • Le sentier de Salvage, non loin du parc national Terra-Nova, pour son tracé accidenté qui mène à plusieurs points de vue sur la baie de Bonavista.
  • Le parc provincial de Blow Me Down pour sa plage de galets et son escalier installé au cœur d’un rocher.
  • Le site historique national de Signal Hill, à St. John’s, pour en connaître davantage sur l’histoire militaire et géologique de l’île.
  • Le Quintal Cafe de Bonavista pour le généreux sandwich au homard et le service sympathique.

Une partie des frais de ce voyage ont été payés par Marine Atlantic et Parcs Canada, qui n’ont eu aucun droit de regard sur le contenu de ce reportage.