Les choses commencent à changer dans le monde de l’alpinisme canadien, jusqu’ici à prédominance masculine. C’est une femme, Sylvia Forest, qui préside maintenant l’Association canadienne des guides de montagne (ACMG). En outre, le Club alpin du Canada, une institution qui existe depuis 115 ans, vient de nommer pour la première fois des femmes aux postes de présidente du conseil d’administration et de directrice générale.

Qui plus est, ces deux femmes sont francophones : Isabelle Daigneault est originaire de Bromont et Carine Salvy vient de Chamonix.

« La majorité des membres du conseil d’administration souhaitait plus de diversité, affirme la nouvelle présidente, Isabelle Daigneault. La volonté était authentique, mais il y avait aussi une question d’image et de réputation. On disait du Club alpin que c’était un boys’ club, qu’il y avait juste des gars. Ça devenait gênant. »

Depuis 1907

Pourtant, le Club alpin a accepté les femmes dans ses rangs pratiquement au début de son existence : en 1907, sur les 44 participants à un camp d’alpinisme, 15 étaient des femmes.

« À l’époque, c’était un des seuls clubs alpins dans le monde qui accueillaient les femmes », note Mme Daigneault.

On suppose qu’il y avait une stratégie derrière cela : le Club alpin du Canada venait d’être créé et cherchait à se démarquer par rapport aux clubs plus établis, comme ceux aux États-Unis et en Europe.

PHOTO FOURNIE PAR ISABELLE DAINGEAULT

Isabelle Daigneault, présidente du conseil d’administration du Club alpin du Canada, a entendu l’appel des montagnes et a déménagé à Canmore, en Alberta.

Donc, à une époque où les femmes n’avaient pas le droit de vote, elles pouvaient être encordées avec des hommes, sur un pied d’égalité.

Isabelle Daigneault, présidente du conseil d’administration du Club alpin du Canada

Il reste que les instances du club, elles, sont demeurées essentiellement masculines au fil des années, une situation analogue à ce qui se passait dans le reste du monde. En 2017, les femmes ne représentaient que 30 % des membres du Club alpin du Canada. L’organisation compte actuellement 12 000 membres (dont l’auteure de cette rubrique).

Francophones et expérimentées

Isabelle Daigneault s’est jointe à la section montréalaise du club il y a 25 ans, à la recherche de partenaires de randonnée et d’escalade. Elle s’est impliquée dans le conseil d’administration de la section de Montréal, puis dans celui du club national, situé à Canmore. Elle a visité cette ville d’Alberta à plusieurs reprises avant de s’y installer avec conjoint et enfant.

Ce sont des amis qui ont invité Isabelle Daigneault à présenter sa candidature au poste de présidente du conseil d’administration du club. Selon elle, le fait d’être francophone a constitué un avantage. « Ça faisait longtemps qu’il y avait une demande pour plus de communications et de documentation en français, souligne-t-elle. Mais ce qui a joué, c’est aussi le fait d’avoir vécu dans l’Ouest, au Québec et en Ontario. Je ne pense pas que les Rocheuses soient le nombril du Canada. Il y a plein d’activités à faire partout. »

La nomination de Carine Salvy au poste de directrice générale est aussi audacieuse : cela ne fait que huit mois qu’elle a immigré au Canada. Elle a toutefois une grande expérience en gestion d’entreprise, en gouvernance et en alpinisme. « Étant à Chamonix, j’ai fait beaucoup de montagne. Je comprends les enjeux liés à l’environnement alpin », indique-t-elle.

PHOTO FOURNIE PAR CARINE SALVY

La nouvelle directrice générale du Club alpin du Canada a fait ses armes à Chamonix.

Je n’ai pas tout le poids des années du club sur les épaules. J’ai un regard neuf, je peux remettre des choses en question.

Carine Salvy, directrice générale du Club alpin du Canada

« Il y a une grande volonté d’aller puiser dans toute la diversité de ce pays, de s’adresser à des portions de la population qu’on avait peu approchées, non seulement en fait de genre, mais aussi en fait d’ethnicité et de milieu socioéconomique », ajoute Mme Salvy.

PHOTO FOURNIE PAR CARINE SALVY

Les femmes comme Carine Salvy ont leur place dans le monde alpin.

Pour Isabelle Daigneault, il s’agit de remettre en question l’image que projette le monde de la haute montagne, soit que « ce sont juste des Blancs qui portent des vêtements Arc’teryx qui vont en montagne ».

Sylvia Forest, la nouvelle présidente de l’ACMG, voulait aussi discuter avec La Presse, mais au retour d’une expédition guidée, elle avait une seule soirée pour faire du lavage et refaire ses bagages avant de repartir pour deux semaines. La montagne est un monde exigeant.

Consultez le site de l’Association canadienne des guides de montagne (en anglais) Consultez le site du Club alpin du Canada (en anglais)

Suggestion de vidéo

Le vent dans les oreilles

C’est le bruit du vent qui rend particulièrement impressionnante cette vidéo de descente en combinaison ailée (wingsuit) dans les Dolomites.

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Chiffre de la semaine

C’est le nombre de personnes qui ont visité le parc national d’Aulavik, dans l’Arctique canadien, en 2021-2022. En comparaison, 2,1 millions de personnes ont visité le parc national de Banff.