Nombre de pays longtemps considérés comme dangereux sont en train de devenir de nouvelles destinations coups de coeur des touristes. Pourtant, les conseillers en voyage ne sont pas toujours du même avis. Et le gouvernement canadien non plus. Petit tour d'horizon.

Colombie

Depuis la signature des accords de paix avec les Forces armées révolutionnaires (FARC), les voyageurs affluent vers la Colombie. Entre 2010 et 2017, le tourisme a crû de 150 %, selon le ministère colombien du Tourisme. «Depuis longtemps, plusieurs personnes allaient à Carthagène pour un tout-inclus en bord de mer, sans réellement visiter le pays, précise Fabrice Bozon, de Voyages Bergeron. C'est nouveau que les gens découvrent autre chose.» En 2011, Dan Chetrit et Liroy Haddad, coprésidents d'Incursion Voyages, ont visité la Colombie en évitant les trajets d'autocar entre les grandes villes. «Les FARC étaient reconnus pour les kidnappings dans les forêts entre les grandes villes. Mais à l'époque, c'était déjà sécuritaire à Cali, Carthagène, Bogotá et Medellín, explique M. Chetrit. On va probablement offrir la destination en 2020.» De son côté, Traditours y a envoyé ses premiers groupes en septembre 2018. «Le pays a fait des pas de géant pour s'ouvrir au tourisme, explique son président Sébastien Forest. C'est un bel endroit qui n'est pas encore pollué par l'excès d'affluence touristique.»

Sri Lanka

Liroy Haddad croit que le pays est à conseiller surtout aux voyageurs expérimentés et aux groupes organisés, parce que les chocs culturels y sont inévitables. «Avec ses ruines, ses temples, ses plages et ses saveurs, c'est un endroit magnifique, dit-il. Je ferais sûrement preuve d'une grande prudence, mais je ne crains pas d'y aller.» Traditours offre des voyages depuis des années dans ce petit pays situé au sud de l'Inde. «Selon ce qu'on vit sur place, la situation est somme toute stable et sécuritaire, précise Sébastien Forest. On suit de façon très stricte les avis du gouvernement fédéral sur les pays et les régions à éviter, mais on n'a jamais arrêté d'aller au Sri Lanka.» De son côté, Fabrice Rozon, de Voyages Bergeron, demeure sur ses gardes. «Il y a une certaine insécurité en raison des guerres de religion, précise-t-il. Ça s'est calmé, mais ça n'a pas basculé encore vers la stabilité totale. C'est à la veille de s'ouvrir.»

Égypte

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Reconnu notamment pour ses plages, le Sri Lanka est une destination 
que Traditours propose depuis des années à sa clientèle.

Évité par la majorité des touristes depuis des années, le pays des pyramides a vu les Européens revenir en masse, mais pas les Nord-Américains. Le gouvernement canadien suggère même d'y éviter tout voyage non essentiel. «Les décapitations de l'État islamique frappent l'imaginaire encore plus que les attentats survenus à Paris, Londres et Madrid, qui ont fait ralentir le tourisme un temps seulement», souligne Fabrice Bozon. Pourtant, l'Égypte est sur la liste d'endroits à visiter avant de mourir de bien des gens. 

«C'était une destination phare pour Incursion Voyages pendant des années, mais nous avons arrêté d'y aller depuis le Printemps arabe, répond Dan Chetrit. Ce n'est pas sécuritaire. » Qui dit moins demandé dit souvent moins cher, mais pour lui, la sécurité passe avant tout.» On n'envoie jamais de clients dans un pays si on n'est pas à l'aise d'y envoyer nos mères, nos femmes ou nos enfants », souligne le coprésident d'Incursion Voyages.

Turquie

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Un touriste prend un égoportrait devant les pyramides de Gizeh, 
en banlieue du Caire, le 15 février.

La Turquie a connu un boom auprès des voyageurs nord-américains depuis 20 ans, avant de se refermer en raison de l'instabilité politique et d'un récent coup d'État avorté. «La destination revient tranquillement, mais on n'a jamais cessé d'y envoyer des groupes, dit Fabrice Bozon. Les zones touristiques de la Turquie n'ont jamais été visées à répétition par les terroristes. Seulement de façon isolée comme Paris, Nice ou Londres. Les gens ont tendance à vouloir y retourner. Il faut juste faire attention.» De son côté, Traditours a relancé la destination il y a un an. «On gère l'itinéraire en fonction de la sécurité, explique Sébastien Forest. On ne va pas dans les régions plus à l'est.» En règle générale, les touristes se concentrent sur Istanbul, la Cappadoce, Pamukkale, Izmir, Antalya et Ankara. «Les gens sont extrêmement accueillants, dit-il. Malgré l'opinion qu'on peut avoir sur le premier ministre Erdogan, la situation géopolitique est plus stable qu'elle l'était.»

Afrique du Sud

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Classée au patrimoine mondial de l'UNESCO depuis 1985, 
la région historique de la Cappadoce est reconnue notamment pour 
ses nombreuses montgolfières et ses fameuses habitations troglodytes.

Près de 25 ans après la fin de l'apartheid, le pays de Mandela est devenu une destination chérie des voyageurs. «On a assisté à une renaissance touristique, affirme Liroy Haddad. D'énormes investissements ont été faits dans les infrastructures. Comme dans tous les pays du monde, il y a certains endroits où l'on ne va pas. Par exemple, on ne dirait pas à nos clients de se promener seuls dans certains quartiers de Johannesburg après le coucher du soleil. Néanmoins, c'est la destination phare d'Incursion Voyages.»

Israël

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L'Afrique du Sud, dont Johannesburg (ci-dessus) est la plus grande ville, 
est la destination phare d'Incursion Voyages.

Même si le conflit israélo-palestinien fait les manchettes depuis des décennies, et qu'Ottawa a lancé de nombreux avertissements régionaux (notamment pour les secteurs frontaliers), Dan Chetrit affirme qu'Israël est l'un des pays les plus sûrs du Moyen-Orient. «Les touristes canadiens n'ont rien à craindre là-bas, dit-il. Bien sûr, il y a des périodes pendant lesquelles nous avons retiré la destination de nos offres, comme en 2015 et en 2016, mais on est de retour depuis l'an dernier.» Son équipe évite bien sûr les zones conflictuelles. «Notre circuit passe peu de temps dans les régions proches de Gaza», explique le coprésident de l'entreprise, qui doit cependant composer avec la perception des consommateurs. «En 2015, il y avait beaucoup d'attaques de missiles de Gaza vers Israël, qui est un petit pays. Les gens imaginaient que les missiles pouvaient atteindre Tel-Aviv, mais c'était impossible. Le gouvernement avait installé un dôme qui les intercepte. Il n'y avait pas de risques, mais en raison des perceptions, on avait choisi de ne pas proposer la destination.»

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Tel-Aviv est une station balnéaire prisée au Moyen-Orient.