En dépit des destructions causées par l'ouragan Irma début septembre et des avertissements lancés par l'administration de Donald Trump aux voyageurs américains, le tourisme continue de prospérer à Cuba, avec un nouveau record en ligne de mire pour 2017.

Selon le ministère du Tourisme, les quatre millions de visiteurs étrangers n'ont jamais été atteints aussi tôt dans l'année. Une barre symbolique franchie lundi avec 54 jours d'avance par rapport à 2016, permettant aux autorités de viser pour la fin de l'année le nombre record de 4,7 millions de touristes.

Pourtant, il y a à peine deux mois, la partie nord du pays abritant l'essentiel des stations balnéaires et des fameux hôtels «tout-inclus» de l'île était balayée par Irma, l'ouragan le plus puissant dont l'oeil ait frappé directement Cuba depuis 1932.

Deux mois avant la début de la haute saison, qui court de novembre à avril, des pertes étaient alors à craindre pour ce secteur essentiel à la survie économique de l'île, qui rapporte près de trois milliards de dollars annuels.

Mais les autorités ont tout mis en oeuvre, mobilisant civils et militaires, pour remettre en état les infrastructures hôtelières, aéroportuaires et routières en vue de l'afflux touristique hivernal.

«Il n'y a aucun souci à se faire», assure la Québécoise Dina Guiro, 52 ans, qui s'offre une semaine de soleil dans la station balnéaire paradisiaque de Santa Lucia, à 600 kilomètres à l'est de La Havane.

Habituée de l'île depuis 12 ans, cette coiffeuse de Montréal affirme avoir déjà pu constater comment les Cubains «savent réagir» après les ouragans.

Depuis le 1er novembre, la quasi-totalité des 366 hôtels du pays sont prêts, assurait la semaine dernière le ministre du Tourisme Manuel Marrero.

Plus de la moitié de ces établissements sont administrés par des compagnies internationales telles que Melia et Iberostar.

Les deux groupes espagnols ont confirmé par communiqué la réouverture de la plupart de leurs hôtels. Seule une poignée d'établissements encore en chantier rouvriront au plus tard le 15 novembre, précisent-ils.

Prêt pour l'hiver

«On ne dirait pas qu'un ouragan est passé. Tout est comme avant», a commenté à l'AFP l'opératrice touristique canadienne Julia Forcier à l'issue d'une tournée dans le nord de l'île.

Cette dernière n'a pas eu l'occasion de se rendre sur les «cayos» - chapelet d'îlots paradisiaques bordant la côte nord dont l'accès est fermé au public depuis Irma - mais plusieurs responsables cubains assurent que l'ouragan a épargné les solides structures des hôtels, n'affectant que portes, fenêtres, mobilier et armatures additionnelles.

Cuba attire chaque année des millions de touristes séduits par les plages de sable blanc, le charme colonial de ses villes, la beauté de certains sites naturels, mais aussi par la sécurité dont ils jouissent sur l'île.

Mais depuis fin septembre, sa réputation est mise à mal par les États-Unis, qui appellent leurs ressortissants à éviter de se rendre à Cuba.

La raison officielle concerne les risques liés aux mystérieuses «attaques» dont auraient été victimes des employés de l'ambassade américaine à La Havane, mais le contexte de raidissement de la politique américaine vis-à-vis de l'île n'y est pas étranger selon La Havane.

La semaine dernière, le ministre cubain des Affaires étrangères Bruno Rodriguez a dénoncé devant les Nations unies un avertissement aux voyageurs «infondé et mensonger», qui vise selon lui à «nuire au tourisme» sur l'île.

Professeur à l'Université de La Havane et spécialiste du secteur, José Luis Perello pense que cet avis est susceptible de «provoquer une certaine diminution des flux touristiques», mais pas de menacer la croissance à deux chiffres du secteur constatée depuis l'annonce du rapprochement avec les Etat-Unis fin 2014.

Cette année, l'île a notamment déjà attiré plus de 500 000 visiteurs américains, soit près du double de 2016. Et si les autorités atteignent comme attendu la barre des 4,7 millions de touristes fin décembre, la partie sera gagnée.

Une perspective envisageable pour Mme Forcier. Celle-ci assure par exemple que le Canada, premier pourvoyeur de touristes à Cuba, «n'écoute pas beaucoup» les recommandations de Donald Trump.