Si la tente demeure la façon la plus populaire et la plus accessible de faire du camping, de plus en plus de familles se tournent vers le caravanage, certes plus coûteux, mais autrement plus confortable. Les constructeurs de roulottes s'ajustent à la demande, les campings aussi.

Clins d'oeil nomades

«On sait que bien des gens associent encore le caravanage au gars en maillot avec une grosse bedaine. Mais on est rendus ailleurs», affirme la présidente de l'Association des commerçants de véhicules récréatifs du Québec, Josée Bédard. Elle soutient que le profil des caravaniers a changé, et que les familles sont de retour. Témoignages.

Patricia Dupuis, 38 ans - Saint-Jean-sur-Richelieu

> Tente-roulotte

«On s'est équipés l'an dernier.

«On a longtemps fait du camping en tente, mais c'est devenu moins pratique avec des enfants. On a acheté la tente-roulotte l'an dernier, en avril. Mon plus jeune avait alors 1 an. On voulait d'abord s'assurer que tout le monde aimait ça. On a organisé un voyage de 10 jours aux Îles-de-la-Madeleine, mais finalement, on a passé plus de fins de semaine en camping qu'à la maison.

«Avec trois enfants, on ne peut pas penser voyager à l'étranger tous les ans, c'est trop cher. De toute façon, les enfants ne sont pas à l'âge d'apprécier les voyages de découverte, les musées. Ils aiment ça jouer dehors, aller à la plage, etc. Aux Îles, on était campés sur le bord de l'eau, c'est vraiment parfait pour les enfants.

«Ce n'est pas exclu que l'on s'achète une roulotte, on aime ça. Mais pour l'instant, mon chum n'est pas tanné de plier et déplier. Ça se fait très vite, en moins de 20 minutes on peut renter à l'intérieur et s'installer.

«Camper implique beaucoup une question d'organisation ; si c'était le bordel, je n'aimerais pas ça. J'ai d'ailleurs trouvé plein d'idées sur Pinterest pour maximiser l'espace, parce qu'une tente-roulotte, ce n'est pas très grand!»

Sylvie Lapointe, 37 ans - Saint-Hippolyte

> Autocaravane de classe A de 32 pi

«La passion est née il y a une dizaine d'années d'une obsession pour les petites roulottes Bolers. Nous en avons retapé une, jusqu'au jour où on s'est aperçu que c'est trop petit. Les enfants ont grandi, les roulottes aussi. L'an dernier, à l'occasion de mon troisième (et dernier!) congé de maternité, on a passé 50 jours dans le motorisé. Mais généralement, nous campons de huit à dix fins de semaine de mai à octobre, plus les vraies vacances de deux semaines.

«C'est après un voyage en Nouvelle-Zélande pendant mon premier congé de maternité que nous avons eu la piqûre pour l'autocaravane; soit on achetait une grosse voiture pour tirer une roulotte, soit on achetait un motorisé usagé. On a fait le deuxième choix, en plus de changer notre auto pour une plus compacte. Finalement, un motorisé usagé peut revenir au même prix qu'un gros pick-up nécessaire pour tirer une caravane à sellette.

«On était des adeptes de camping à la base, on est contents de se retrouver dans un contexte de plein air. Et justement, le caravanage nous donne plus de temps pour nous retrouver dehors. S'il pleut, on plie bagage et on reprend la route. Je vais toujours aimer le camping en tente, il n'y a rien qui bat le sentiment de goûter à la nature de près, et on veut le faire découvrir aux enfants. Mais quand on pèse les pour et les contre, notamment le temps que ça prend de préparer le camping en tente, on penche vers le VR.

«Il y a une douzaine d'années, jamais on n'aurait pensé avoir une roulotte. Il y a encore beaucoup de préjugés autour de ce mode de vacances là, bien des gens associent le caravanage à un loisir de retraités, ou croient que c'est quétaine de rouler en roulotte. Mais maintenant, c'est plein de familles, on a vu la différence. Le caravanage, c'est redevenu cool, j'aime vraiment ça et ça me fait plaisir d'en parler!»

PHOTO FOURNIE PAR LA FAMILLE

Sylvie Lapointe et Marc-André Plouffe avec leurs enfants Charlotte (9 mois), Mathilde (5 ans) et Ludovic (4 ans).

Gilles Laporte, 57 ans - Notre-Dame-des-Prairies

> Caravane à sellette de 29 pi

«Au début, c'était un passe-temps familial. Le grand-père maternel en faisait, on s'est mis à l'accompagner avec une bonne vieille tente-roulotte, une Bonair 750. On a parcouru le Québec là-dedans, on sortait au moins sept ou huit fois dans l'été. On a fait ça une douzaine d'années, jusqu'à ce que nos deux moineaux tombent ados et que leurs loisirs changent.

«La tente, on en a fait avant d'avoir les enfants. Mais le sol et moi, nous ne sommes pas de grands amis; les branches, l'humidité, ça m'horripile un peu. On s'est dit qu'on pouvait aller juste une petite coche au-dessus et ainsi rester au sec!

«On a recommencé il y a trois ans. On a changé pour un pick-up et une caravane à sellette. Elle a 29 pi hors-tout, avec deux extensions, ce n'est pas la misère noire! Comme les campings au Québec ont souvent 50 ou 60 ans, ils ne sont pas faits pour accueillir des autocaravanes de 48 pi. Mais mon "fifth-wheel" passe partout, on peut aller où on veut.

«Les grands voyages sont planifiés longtemps d'avance. Mais pour les week-ends, on va chercher notre petit-fils et on part, on fait beaucoup de sorties impromptues l'été. Quand on pense à une destination et que les yeux nous brillent, on y va. On voulait aller en Gaspésie, on y a passé plus d'un mois, on a visité toutes les roches, tous les petits parcs et toutes les petites baies.»

PHOTO FOURNIE PAR LA FAMILLE

Lucie Ladouceur en compagnie d'Élie, petit-fils de son conjoint Gilles Laporte.

Astuces, trucs et conseils

On choisit de camper avec un véhicule récréatif pour économiser tracas et argent. Mais il faut d'abord s'assurer d'éviter les mauvaises surprises. La Fédération québécoise de camping et de caravaning offre plusieurs conseils à ceux qui seraient tentés par l'expérience du caravanage.

Une question de poids

Une roulotte ne peut pas être tirée par n'importe quel véhicule. On doit évidemment respecter la capacité de remorquage fixée par le constructeur. Mais il faut savoir que le poids tractable peut être changé par ce que l'on ajoute dans le véhicule et dans la caravane. C'est pourquoi il faut s'assurer de ne pas dépasser le poids nominal brut de chacun des véhicules, de même que celui combiné de l'ensemble tracteur-caravane. Tout ça en respectant la charge sur la flèche de la roulotte, sur chacun des essieux des véhicules et la capacité de charge des pneus.

Entretien

Après le premier voyage et aux 3000 km subséquents, il faut s'assurer de resserrer les boulons de l'attache fixée au véhicule tracteur. Même chose pour les boulons de la boule et de la tête de l'attache, ainsi que les leviers de la flèche. Il faut enfin s'assurer d'inspecter le coupleur et sa serrure pour qu'ils fonctionnent librement.

Pour que rien ne bouge

Il est pratique de laisser un maximum de choses à l'intérieur de son VR, tant et aussi longtemps que les contenants ne se renversent pas pendant le voyage. C'est pourquoi on peut, par exemple, réutiliser des caisses de vin pour y ranger contenants de jus, d'huile ou de vinaigrette. On peut aussi modifier la partie inférieure d'un contenant d'oeufs pour y loger des flacons d'épices ou de médicaments. Aussi, les bandes de velcro autocollant peuvent être utilisées pour fixer toutes sortes d'objets, au mur ou au fond des armoires.

Louer un VR?

Louer un VR pour partir en vacances n'est pas un choix économique quand on le compare à une semaine d'hébergement en hôtel. En haute saison, pour une autocaravane qui peut loger six personnes, on peut s'attendre à payer 1500 $ par semaine. Cela peut toutefois représenter une bonne option si on planifie un voyage de découverte en plein air - rappelons que l'accès aux parcs nationaux canadiens est gratuit cette année, une initiative pour souligner les 150 ans de la Confédération. Faire l'essai d'un VR en location est aussi bien avisé si l'on songe à faire l'achat d'une caravane.

Photo Thinkstock

Vent de changement

Les baby-boomers sont encore à ce jour les principaux amateurs du caravanage. Mais la cohorte est vieillissante et elle fait lentement place à une relève plus jeune, davantage portée vers des roulottes plus petites et plus abordables. La tendance est encore plus marquée au Québec, autant du côté de l'offre que de la demande.

«Ça fait environ quatre ans que la tendance se dessine, soutient Josée Bédard, présidente de l'Association des commerçants de véhicules récréatifs du Québec (ACVRQ). C'est actuellement ce qui est le plus marquant sur le marché ; les ventes de roulottes de moins 3500 lb ont progressé 41 % plus rapidement au Québec qu'aux États-Unis en 2016.»

Louise Gagnon, porte-parole de la Fédération québécoise de camping et de caravaning (FQCC), abonde dans le même sens: «Auparavant, il fallait bien souvent changer de véhicule pour tirer une roulotte, explique-t-elle. Avec les caravanes ultralégères, les jeunes familles ne sont plus contraintes de se tourner vers la tente-roulotte, ce qui leur permet de s'installer très rapidement quand ils arrivent à destination.»

Selon Josée Bédard, les plus jeunes sont bien souvent animés par le goût du plein air - «Quand on est en camping, les enfants vivent une liberté qu'on ne leur propose plus quand ils sont à la maison», soutient-elle. Elle remarque aussi l'arrivée par ricochet de petites caravanes mises au point spécialement pour plonger en pleine nature : pneus tout-terrain, garde au sol surélevée, suspension ajustée (entre autres équipements spécialisés).

Parallèlement, bien des baby-boomers initient leur descendance aux joies du camping. «Les gens plus âgés commencent à penser à l'espace pour accueillir leurs petits-enfants, affirme Josée Bédard. C'est pourquoi on voit de plus en plus de roulottes et de caravanes à sellette aménagées pour accueillir plusieurs personnes.» Des constructeurs aménagent ainsi des espaces de séjour distincts, des couchettes en mezzanine, entre autres trouvailles prévues pour accueillir des familles nombreuses.

«Le créneau haut de gamme continue de grandir. Certaines caravanes à sellette sont construites avec une partie avant entièrement vitrée qui abrite une vaste cuisine. Dans d'autres, on peut trouver un bain pleine grandeur. Le design et l'ergonomie évoluent aussi beaucoup.»

Mme Bédard soutient d'ailleurs que les fabricants de véhicules récréatifs sont de plus en plus attentifs aux besoins des concessionnaires du Québec: «Nous avons un souci du design que les Américains n'ont généralement pas, affirme la présidente de l'ACVRQ. Parfois, je leur demande d'aménager les roulottes selon nos propres besoins, parce que c'est sûr que le style traditionnel est encore très commun.»

«Certaines entreprises ont compris et proposent un design inspiré de ce qui se fait en Europe, soutient de son côté Louise Gagnon, de la FQCC. Forcément, ça va amener la concurrence à s'ajuster, c'est mon souhait. On va enfin pouvoir se débarrasser du même éternel designer qui semble en poste depuis 1978!»

De petites nouvelles

Helio

Située à Lavaltrie, Helio se consacre aux très petites roulottes; la moins lourde de sa série O fait tout juste 1089 lb, si bien qu'on peut la tracter avec la plupart des autos compactes et petits VUS. Elle est fabriquée avec une structure monocoque en fibre de verre moulée et le châssis est en aluminium. On garantit ainsi une étanchéité parfaite. Selon le modèle, elle est conçue pour accueillir jusqu'à quatre personnes, mais on doit sacrifier certaines composantes. Toilette avec douche, cuisinette et frigo sont réservés aux modèles à deux ou trois occupants.

Safari Condo

Connue au départ pour son autocaravane compacte construite sur le châssis d'une minifourgonnette Chevrolet Safari, l'entreprise de Saint-Frédéric, en Beauce, a par la suite innové avec sa roulotte Alto à toit rétractable, avant d'ajouter l'Alto de série F, à toit fixe, la plus légère du groupe avec ses 1592 lb. Au coeur du toit et des murs se trouvent des alvéoles en plastique recouvertes d'aluminium sur un côté et d'Alufiber ou d'aluminium sur l'autre. Plancher et châssis sont aussi en aluminium, alors que les autres composantes sont faites de Formica et de verre; on ne trouve dans l'Alto que des matériaux résistants à l'eau.

Pro Lite

L'entreprise de Saint-Jérôme fabrique des roulottes ultralégères depuis 2000. Le toit monocoque est recouvert de fibre de verre, les planchers sont faits de panneaux composites TekModo alors que les murs de bois et de fibre de verre sont isolés en panneaux de Durofoam. Tous les joints sont de qualité nautique. La gamme de caravanes compte aujourd'hui 12 modèles, de la minuscule Suite de 550 lb, tractable avec une voiture sous-compacte, à la Xtreme de 3700 lb, qui peut accueillir cinq personnes, même s'il est possible de la fixer à une minifourgonnette ou à un VUS intermédiaire.

Les aventurières

Le marché américain est encore très traditionnel, mais le tourisme d'aventure séduit les jeunes, si bien que l'offre de petites caravanes spécialisées est croissante. Taxa, nuCamp et Airstream proposent tous de petites roulottes de moins de 3000 lb avec garde au sol surélevée. Elles sont toutefois faites pour voyager à deux, sauf la Cricket, de Taxa, qui a pensé aux enfants. Dans les deux cas, on peut toutefois embarquer vélo, planche de surf ou kayak, à l'intérieur ou sur un support fixé au toit.

PHOTO FOURNIE PAR LE FABRICANT

Hélio O2, 14 pi, 1455 lb à sec, 28 345 $