Si Paris vit des jours sombres en ce moment, l'industrie québécoise du voyage, qui ne sent pas de vent de panique chez sa clientèle, refuse de dissuader les gens de se rendre dans la Ville Lumière. Pour leur part, les principaux transporteurs qui effectuent la liaison entre Montréal et la capitale française maintiennent leurs activités, mais donnent tout de même la possibilité aux passagers de reporter leur voyage.

« Il y a eu quelques appels de clients inquiets, admet Lyne Rose, propriétaire de l'agence Voyages Bergeron. Mais dans l'industrie, on se dit tous que si on arrête de voyager, on subit le terrorisme. La vie continue », ajoute-t-elle en rappelant que d'autres villes, comme Londres, ont également vécu des attentats.

S'il a lui aussi reçu des coups de fil de voyageurs préoccupés, Patrick Giguère, directeur de l'agence Voyages Constellation, assure que pour le moment, aucun de ses clients n'a fait d'annulation. Au début de la semaine, son entreprise a même vendu des billets à des voyageurs qui voulaient s'envoler pour la France. « Il y a des risques partout sur la planète », a-t-il indiqué, en précisant qu'il n'a pas l'intention d'encourager les gens qui souhaitent aller en France à revoir leurs plans.

« Ce n'est pas notre travail de dissuader quelqu'un qui veut partir en voyage, à moins qu'il ne s'agisse d'une zone à risque. Notre travail, c'est de l'avertir », estime Patrick Giguère.

À ce chapitre, à la lumière des témoignages recueillis par La Presse, bon nombre de voyageurs qui doivent se rendre sous peu à Paris ne semblent pas vouloir bouder la capitale française.

C'est le cas de Patrice Valade, un résidant de Longueuil, qui s'envolera vers l'Hexagone le 15 décembre pour deux semaines. « Nous avons habité cinq ans [de 2005 à 2010] sur le boulevard Voltaire, près du Bataclan, raconte-t-il. Nous connaissons bien le coin et étions ravis d'y retourner pour retrouver nos amis et nos anciennes habitudes. Malgré les circonstances, nous maintenons nos plans. Il est hors de question d'annuler notre voyage.

« J'étais en Thaïlande en 2004, lors du tsunami. Il ne faut pas que ça nous empêche de vivre. Ce serait comme arrêter de voyager parce qu'il y a un avion qui tombe. »

Pour sa part, Pierre Huot croit que le pays du général de Gaulle sera épargné pour les prochains mois. « Il n'est aucunement question que je remette mon voyage prévu dans trois semaines. Il faut savoir que les extrémistes de France vont, pour les mois à venir, se tenir bien tranquilles. Je serais plus inquiet d'aller dans d'autres pays européens. »

« TRÈS FLEXIBLE »

Tous ne sont toutefois pas aussi sereins. Les trois filles de Renaud Tilquin, âgées de 11, 10 et 7 ans, devaient prendre l'avion seules pour Paris en février, pour ensuite séjourner chez leur oncle. À la suite des attentats de vendredi, M. Tilquin et sa femme ont décidé d'annuler le voyage de leurs enfants.

« C'était déjà difficile de les laisser partir seules en avion pour la première fois. Nous n'aurions pas dormi tranquilles de les savoir là-bas, sachant que l'état d'urgence devrait durer trois mois, probablement jusqu'en février », affirme Renaud Tilquin.

Les transporteurs aériens continuent quant à eux d'effectuer des vols à destination de Paris. Certains d'entre eux, comme Air France, offrent à leurs clients qui devaient s'envoler entre le 17 et le 22 novembre et qui souhaitent attendre que la poussière retombe avant de boucler leurs valises pour la France de modifier sans frais leurs dates de voyage. Leur séjour peut être reporté jusqu'au 15 décembre.

Même scénario pour les passagers d'Air Canada, qui pourront eux aussi modifier leur billet sans devoir mettre la main dans leur poche. Du côté d'Air Transat, le porte-parole Pierre Tessier assure que depuis vendredi dernier, l'entreprise s'est montrée « très flexible ». « Nous traitons les demandes de façon individuelle, au cas par cas. »

Par ailleurs, le gouvernement canadien n'avait publié aucun avertissement hier à l'intention des voyageurs qui souhaitent se rendre en terre française. Il les invite toutefois à la plus grande prudence « en raison de la menace terroriste présentement élevée ».