Les experts, missionnés pour analyser la sécurité des vols chez Air France, estiment dans leur rapport, dont l'AFP a obtenu une copie mardi, que la sécurité ne semble pas être la priorité absolue au sein du personnel et ils pointent du doigt le comportement d'une minorité de pilotes.

«Lorsqu'ils sont interrogés sur la sécurité des vols, les cadres supérieurs d'Air France (...) placent indiscutablement la sécurité comme priorité numéro 1. Mais ce message ne semble pas avoir été diffusé au sein des effectifs. On n'entend pas couramment la sécurité avant tout», écrivent-ils dans ce rapport présenté lundi en interne.

«Ceci conduit certains employés à croire que les considérations de sécurité sont secondaires par rapport aux considérations commerciales», ajoutent-ils.

La direction d'Air France avait indiqué lundi que la mission, mise en place fin 2009 pour répondre à la méfiance d'une partie des personnels après l'accident du Rio-Paris, avait listé 35 recommandations. Elle avait alors précisé que ce rapport n'avait pas vocation à être rendu public.

«L'équipe indépendante sur la sécurité estime que, d'une manière générale, il manque une direction forte dédiée à la sécurité, nécessaire pour appréhender correctement la sécurité et prendre des décisions au quotidien», souligne également le rapport.

En ce qui concerne les pilotes, leur manuel opérationnel leur permet de ne pas appliquer strictement les procédures Air France, «si nécessaire pour la sécurité des passagers et de l'avion», ce qui est généralement admis lorsqu'il y a un danger imminent, notent les experts.

«Malheureusement, il y a un petit pourcentage de commandants qui abuse de cette philosophie générale et ignore systématiquement certaines directives», écrivent-ils. Ces derniers font enfin état de relations difficiles entre pilotes et personnels de cabine ou de la maintenance, certains pilotes se comportant de manière «autoritaire» et «arrogante».

Huit experts indépendants ont participé à cette mission dont un ancien ingénieur en chef du constructeur américain Boeing, Curtis Graeber ou un ancien administrateur de l'autorité américaine de l'aviation civile (FAA).

Le rapport épingle par ailleurs la formation des personnels de cabines. «La qualité de l'entraînement des personnels de cabine affectent leur capacité à mener leur mission de façon satisfaisante». Les pilotes comme les hôtesses et stewards ont déploré leur formation qu'ils jugent «inefficace, trop théorique et routinière».

La mission conclut que «la direction des ressources humaines en charge des personnels de cabine a perdu de son efficacité chez Air France» qui n'a pas su évoluer comme chez d'autres compagnies.

Parmi les 35 recommandations, figure la création d'un comité de sécurité, déjà annoncée par la compagnie. Les experts invitent en outre à revoir le recrutement initial des pilotes et leurs programmes de formation suggérant des pilotes au comportement «non élitiste».

«Le SNPL se satisfait que ces mesures soient sans complaisance, ce qui confirme la qualité du travail effectué», indique le principal syndicat de pilotes dans un communiqué publié mardi.

Il ajoute qu'il sera «vigilant quant à la mise en place de ces mesures» tout en se félicitant «que la direction ait pris l'engagement que les mesures proposées par la mission externe (...) soient mises en oeuvre».