Depuis plus d'un demi-siècle, trois fois par semaine, le train Le Canadien de Via Rail parcourt 4500 km pour assurer la liaison Toronto-Vancouver pendant trois jours et trois nuits, filant à une vitesse moyenne de 60 km/h. Ce voyage hors du temps, qui s'effectue dans des wagons en acier de style streamline, fascine autant les Canadiens que les étrangers.

Deux passagers de l'Hexagone, Olivier Barrot, journaliste et présentateur de l'émission Un livre un jour que l'on peut voir sur TV5, et Alain Bouldouyre, dessinateur, ont fait la traversée à bord de ce train mythique. Ils nous racontent leurs impressions, en images et en mots, dans leur livre Carnet transcanadien, qui vient de paraître aux éditions Actes Sud.

 

M. Barrot, de passage à Montréal récemment afin de donner des cours sur le cinéma à l'Université de Montréal, a été émerveillé par cette odyssée ferroviaire. «Le charme du Canadien, c'est qu'il ne s'agit pas d'un train purement touristique. Il dessert encore, sans interruption, les petites localités canadiennes. Lors de mon voyage, début décembre (il y a deux ans), la majorité des passagers se déplaçaient par affaire», dit-il.

Évidemment, pour deux Européens, un train si vieux (il est en service depuis 1955), roulant à si petite vitesse, est un anachronisme. «En Europe, voyager à ce rythme est impensable. Chez nous, le train a une fonction très utilitaire, comme l'avion, alors qu'ici, c'est encore un moyen de transport propice à la rêverie», dit-il, profitant de l'occasion pour s'étonner qu'il n'y ait pas encore de TGV entre Montréal et Toronto.

Prendre ses aises

Avec de menus détails, le récit raconte la vie à bord du Canadien. L'habitacle assez spartiate de la cabine, mais néanmoins confortable, les repas gastronomiques qui brisent la monotonie du voyage, les heures à contempler les paysages sous le dôme de verre de la voiture panoramique, les rencontres avec les autres passagers et les brefs arrêts dans des gares aux noms inusités (Sioux Lookout, Gogama, Portage La Prairie, etc.). Le tout est parsemé de détails sur l'histoire et la géographie du Canada.

«J'ai été particulièrement étonné par le service très attentionné de Via Rail. On est traité, avec classe, comme un voyageur d'une autre époque. Au fil des kilomètres, on prend ses aises à bord, un peu comme un animal dans sa tanière. On en profite pour lire, se détendre et vivre à un autre rythme», dit M. Barrot, aussi directeur de la rédaction de Senso, magazine consacré aux plaisirs.

Le récit à bord de ce Transsibérien d'Amérique, qui franchit trois fuseaux horaires, est enrichi par les illustrations du compagnon de voyage de M. Barrot, Alain Bouldouyre. Ce dessinateur traduit, par ses aquarelles et ses photographies, l'immensité du territoire canadien: le territoire lacustre du nord de l'Ontario, des Prairies et des Rocheuses.

Selon M. Barrot, qui a fait plusieurs recherches avant d'effectuer ce périple, Carnet transcanadien serait le premier récit de voyage portant spécifiquement sur ce voyage en train. «Il existe une panoplie de livres techniques sur la construction des chemins de fer canadiens, mais aucun ne relatait l'expérience de la traversée», dit-il. L'écrivain souhaite donc que son livre fasse son nid à bord de la boutique souvenirs de Via Rail.

On peut imaginer, pour un Européen, quel dépaysement propose ce périple de quelques jours en train. Mais les lecteurs d'ici trouveront aussi leur compte, malgré le fait que les particularités régionales soulignées dans ce récit nous sont connues. Et cette lecture nous transmet néanmoins le goût du voyage. All aboard!

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Carnet transcanadien

Olivier Barrot et Alain Bouldouyre

Actes Sud, 144 pages.

Prix: 39,93$