Pour la deuxième fois, les paysages arides de la vallée de Coachella, en Californie, accueillent d'étranges et attirants ovnis posés là par une vingtaine d'artistes. La biennale Desert X, installée çà et là sur un vaste territoire autour de Palm Springs, ponctue à merveille un road trip sous le soleil.

Ce volume rouge, posé au milieu de nulle part, détonne dans le paysage. Baptisée Specter, cette pièce de l'artiste Sterling Ruby, de Los Angeles, est l'une des plus visitées - et photographiées - de la biennale. Sur certains clichés, le « spectre » semble avoir été ajouté après coup, comme sur un collage. L'effet est semblable sur place.

Western Flag, une installation de John Gerrard, propose une réflexion sur l'exploitation des ressources des régions désertiques. Les images projetées sur place ont été captées sur le lieu d'un ancien puits de pétrole aujourd'hui épuisé au Texas. L'écran s'illumine au lever du soleil et s'adapte en temps réel à la luminosité ambiante. L'oeuvre veut rappeler à la fois la richesse et la fragilité des écosystèmes arides.

Cette oeuvre en deux temps de Nancy Baker Cahill s'observe... sur les téléphones des visiteurs, en réalité augmentée. À l'ombre d'éoliennes, Revolution se penche sur les insatiables besoins énergétiques de nos sociétés. Une autre installation, près de Salton Sea, un lac très salé du sud de la vallée, évoque les catastrophes environnementales causées par les humains.

Sur une série de panneaux publicitaires, l'artiste Cara Romero fait ressurgir du passé les peuples qui ont les premiers habité la région. Elle cherche ainsi à attirer l'attention sur les racines profondes qui unissent les Cahuillas, Chemehuevis, Serranos et Mojaves à ce coin de pays, où sont nées leurs cultures, caractérisées notamment par une riche tradition orale.

L'artiste a baptisé sa série photographique Jackrabbit, Cottontail & Spirits of the Desert. Pour l'admirer, il faut rouler en direction nord sur la Gene Autry Trail, vers Palm Springs, une ville construite là où vivaient auparavant les Cahuillas.

Cara Romero, qui vit et travaille à Santa Fe, au Nouveau-Mexique, est membre de la nation chemehuevie. Son travail porte essentiellement sur la vie quotidienne dans les réserves du Sud-Ouest.

La présence de fossiles sous-marins à plus de 150 km des côtes révèle que la vallée de Coachella était une étendue d'eau il y a 6 millions d'années. Avec en tête le réchauffement climatique et la montée appréhendée du niveau de la mer, le collectif danois Superflex propose cette construction rudimentaire qui peut accueillir la vie à la fois sur terre et sous l'eau.

La structure s'appelle Dive-in. La texture poreuse de ses murs rappelle les coraux des fonds marins, une évocation du passé de l'endroit... et d'un avenir qui pourrait lui ressembler.

Dans un abribus, l'artiste Mary Kelly a voulu rendre hommage au mouvement de femmes qui s'est battu contre la multiplication des tests nucléaires dans le sud-ouest des États-Unis, pendant la guerre froide. Intitulée Peace Is the Only Shelter (La paix est le seul abri), l'oeuvre souligne aussi la résurgence contemporaine de la menace nucléaire.

Voici l'étrange palmier conçu par Kathleen Ryan. Ghost Palm est une reconstitution faite d'objets divers d'un spécimen de l'espèce indigène de Californie, le Washingtonia filifera (ou palmier à jupon). Dans les environs de la faille de San Andreas, la présence de sources a favorisé l'émergence d'oasis, où prolifèrent ces palmiers emblématiques du désert. L'installation se veut un hommage aux forces de la nature.

Fait de blocs de béton, cet immense ruban de Möbius (une forme sans fin qui n'a ni intérieur ni extérieur) symbolise la conscience humaine, sa logique comme son côté irrationnel, dans le temps comme dans la forme. L'artiste Julian Hoeber présente avec ce Going Nowhere Pavilion #01 une série de toiles intitulée Execution Changes, qui vient soutenir sa réflexion sur l'expérience humaine.

Autre oeuvre très populaire de Desert X, Lovers Rainbow est faite d'une armature peinte de couleurs vives. Sa structure, habituellement associée au développement, évoque ici, une fois tordue et déformée, les rêves brisés. Mais l'arc-en-ciel est aussi un symbole d'espoir, et l'oeuvre de la Mexicaine Pia Camil, qui compte deux structures jumelles, invite à réfléchir aux politiques migratoires américaines dans cette région frontalière du Mexique. 

Desert X se poursuit jusqu'au 21 avril.