Le sentier de l'Appalachian Trail s'étend sur plus de 3500 km sur le dos des Appalaches dans le Nord-Est américain. Il attire de plus en plus de randonneurs. Cette année, quelque 5000 d'entre eux ont tenté de le parcourir en totalité, ce qu'on appelle un thru-hike. Moins d'une personne sur quatre réussit. Notre journaliste en fait partie. Récit.

Conquérir les Appalaches

J'ai fait plusieurs randonnées de 350 km. Cette fois, j'en voulais plus. Dix fois plus. Avec une amie qui s'est jointe à moi, je me suis lancée à la conquête des 3524 km qui séparent le Maine de la Géorgie. Un défi de presque cinq mois, où il faut accepter l'inconfort, l'imprévu et un peu de souffrance.

Bzzz...

«Avance, sacrifice!», me crie mon amie, alors que je contemple un champignon fantaisiste et qu'un régiment grondant de maringouins sonne la charge. On s'est enfoncées, à la fin du mois de juin, dans la dense forêt du Maine après avoir conquis avec fébrilité l'illustre mont Katahdin (1606 m). C'est là que l'Appalachian Trail (AT) commence pour les uns ou finit pour les autres. Un brouillard opaque gâchait le splendide panorama auquel on rêvait depuis longtemps, mais pas notre euphorie.

Le sentier boueux traverse depuis des marécages, des ruisseaux, longe des étangs et des lacs. Chaque jour, les moustiques m'énervent davantage. Ma vengeance éclate le soir: je tue avec délectation chaque vampire ayant osé s'inviter dans ma tente.

Le sentier est parfois un doux tapis d'aiguilles de conifères, bordé de lichen, de mousses ou de fougères. Mais il est surtout accidenté, truffé de grosses roches à gravir ou à descendre et de millions de racines où trébucher.

C'est d'ailleurs accrochée à un arbre dans une section escarpée que mon amie m'affirme s'ennuyer de l'asphalte. On en pleure de rire: il reste 3200 km!

Qu'importe, lorsque notre regard embrasse mille collines d'un vert sombre et des lacs argentés qui s'effacent dans le lointain bleuté, comme aux monts Baldpate, Bigelow ou Saddleback, on oublie aussitôt le sang et la sueur perdus en chemin.

Misérables

Il pleut depuis 2 h du matin. Pas envie de sortir de ma tente, mais pas le choix d'avancer! Je réalise la chance que nous avons eue la veille: c'est au sec qu'on a grimpé, rampé ou sauté dans l'incroyable empilade de rochers qu'est Mahoosuc Notch, une section réputée pour sa difficulté.

On quitte notre campement sous la pluie. Tandis qu'on monte l'abrupt sentier, ô combien glissant, on croise un randonneur en short, couvert de boue jusqu'à mi-cuisses, un genou en sang. Il explique être tombé dans 1 mètre de bouette.

On disparaît dans la purée de pois sur la montagne Goose Eye, couverte d'une prairie alpine imbibée comme une éponge. Quelques chicoutais, petites baies orangées et acidulées, illuminent nos papilles. Puis, je comprends où le malheureux s'est embourbé: j'enfonce mon bâton de marche jusqu'à la poignée dans une piscine de boue en la sondant autour de l'unique et mouvant bout de bois censé aider à la traverser.

Le soir, je soigne mes pieds ratatinés qui ont macéré 11 heures dans du jus brun. Je me réconforte: aujourd'hui, on a franchi la frontière entre le Maine et le New Hampshire.

360°

Au New Hampshire, je dévore les paysages et avale quelques «vitamines I» pour mes genoux endoloris - si populaire parmi les thru-hikers, l'ibuprofène a son propre surnom. Le sentier enfile les vallées verdoyantes et les sommets dénudés. Il zigzague sur les longues crêtes rocheuses des montagnes Blanches, qui regroupent les plus hauts sommets du Nord-Est américain, dont les fameux monts Washington (1917 m) et Lafayette (1600 m). Depuis ces doigts de granit, qui chatouillent le ciel d'azur ou déchirent les nuages, s'étendent à perte de vue des montagnes entassées.

En chemin, on croise des refuges de l'Appalachian Mountain Club. Les clients paient environ 120 $ US pour une nuit et deux repas. Tels des moines des montagnes habillés de vêtements techniques dernier cri, les thru-hikers y recueillent des restants gratuits ou des collations: gruau (froid) aux pommes, brioches, brownies, etc.

Ceux qui se dirigent vers le nord ont marché quelque 3000 km; maigres comme des clous, ils puent souvent la sueur surie et ont les cheveux ou la barbe en broussaille.

Un soir, on obtient de rares places pour les thru-hikers dans l'un de ces refuges. En échange d'un bon coup de balai, on dort dans la salle à manger et on boude les rations qui pèsent dans notre sac à dos. Au lieu de pâtes insipides et de noix, du sempiternel beurre d'arachides et de tortillas, on s'empiffre de soupe aux lentilles et de nouilles au boeuf, de crêpes à la citrouille et au chocolat... Le bonheur!

Serpents à sonnette dans le «tunnel vert»

Les montagnes s'affaissent avec les jours. Seuls mes genoux apprécient. L'ennui me gagne: on avale des kilomètres de terre, de roches et de racines dans le «tunnel vert», surnom de l'Appalachian Trail. Vermont, Massachusetts, Connecticut, New York, New Jersey, Pennsylvanie... Les points de vue sont plus rares, parfois seulement là où la forêt est rasée pour les pylônes électriques. Je désespère.

Je m'accroche à mon défi tant bien que mal. Je brise la monotonie en notant, chaque jour, un petit moment de joie.

Il y a ces ravissants tritons orange vif, cousins de salamandres, ces chevreuils et ces tortues qui figent à notre passage ou ces serpents à sonnette qui agitent leur cascabelle.

Il y a ces pins qui bruissent sous le vent, ces chênes qui nous bombardent de leurs glands et ces rhododendrons qui nous enveloppent dans le Sud.

Comme une bouffée d'oxygène, le sentier sort de la forêt pour traverser des prés où paissent des vaches, des champs de maïs ou de soya, des routes ou des villages qui servent à aller se ravitailler et à se... décrotter.

De riches échanges avec d'autres thru-hikers et la générosité des «Trail Angels», de purs inconnus qui offrent de la nourriture, de l'eau, un lift ou un toit, m'aident à tenir bon.

Un «test»

Le soir, on mange en vitesse afin de s'endormir tôt, souvent avec un concert apaisant de sauterelles. Chaque nuit, des douleurs liées à l'inconfort me réveillent. Mon lit me manque! Le matin, les premiers pas sont pénibles: on dirait que de la vitre éclate dans nos pieds surmenés.

La fatigue me gagne; on n'est qu'à la moitié de l'AT.

Un jour, alors que j'étais abattue par la chaleur et près de me noyer dans ma sueur, un thru-hiker qui terminait l'AT (il l'a parcourue de manière discontinue) me confie avoir réalisé ce défi pour «tester sa détermination». Son propos me fouette.

Un automne rôti

Un cruel manque de pluie assombrit les journées ensoleillées de l'automne. Les cours d'eau, d'où l'on puise et filtre notre or bleu, sont souvent à sec. Ça plombe notre moral, nous obligeant à transporter plus d'eau, à faire des détours pour en dénicher.

Toute la forêt est assoiffée. Les feuilles flétrissent, rôtissent. Le sentier est poussière. Le soir, on peine à rincer nos pieds noircis.

Le tunnel perd de son vert, pas juste à cause du manque d'eau. Ce sera mon automne le plus coloré à vie, à randonner vers le sud alors que les arbres se préparent pour l'hiver. À partir de la Virginie, les montagnes se redressent. Dans le parc de Shenandoah, un joyau de quelque 200 000 acres, je jubile comme une gamine devant les panoramas et l'explosion de couleurs.

La neige

Le 28 octobre. On se lève à 3 h 30 pour randonner 52 km afin de quitter le majestueux parc des Great Smoky Mountains, à cheval entre le Tennessee et la Caroline du Nord, et se rendre au prochain village. Une dépression s'amène avec des précipitations et des températures glaciales. On chemine sous la pluie ou le grésil incessants. Le vent mord. Trempées, on est transies dès qu'on ralentit. Dix-sept heures plus tard, le paradis: hôtel chauffé, douche brûlante, matelas douillet.

On est chanceuses: un ami thru-hiker m'écrira avoir d'abord avancé dans la pluie pour se retrouver coincé 42 heures dans un abri trois faces, avec des nuits à -10 °C jusqu'à la fin de la tempête de neige. Mouillé, son matériel a gelé.

Faim au ventre

«Boom!» Mon amie et moi venons à peine de nous coucher après une journée de 39 km, en Géorgie, lorsque ce bruit nous alerte. Nos deux sacs de nourriture, accrochés au bout d'une corde pendue à la branche d'un arbre pour les protéger des animaux, viennent de tomber et... il en manque un! La corde traîne par terre, intacte. On ne comprend rien. On la réinstalle plus loin du tronc.

Blottie dans mon sac de couchage, je scrute la noirceur. Trente minutes plus tard, une masse noire s'approche à pas feutrés.

Un ours! Il a réussi à ouvrir le petit mousqueton, qui retenait nos sacs à la corde, avec ses grosses pattes.

Bien qu'on l'apeure avec du bruit, cet habitué du coin revient sans cesse grimper dans l'arbre pour dérober le deuxième sac de nourriture. Ah, le maudit gourmand!

Ses va-et-vient et l'incertitude nous tiennent éveillées. À minuit, on plie finalement bagage en emportant le reste de nos calories comme un trésor. Le prochain village est - heureusement - à seulement 27 km de là. On y arrivera au matin, affamées.

Mont Springer

À quoi ressemblent les paysages en Géorgie? Aucune idée: 126 km de brouillard et de pluie! Mon amie suggère qu'on trouve un moyen pour se motiver dans les derniers milles. Je propose une chanson en précisant qu'on doit se rendre au chiffre «2190» (la distance de l'AT se calcule en milles). Je commence: «Un mille à pied, ça use, ça use, un mille à pied, ça use les souliers...» Elle chante quelques couplets puis me supplie d'arrêter. Au chiffre 44, elle s'enfuit à la course et je la pourchasse en chantant.

Puis, enfin, ça y est. Nous voilà au mont Springer. C'est terminé. Cent quarante et un jours. Quel périple, quelle longue marche, quelle folie!

Émue. Muette. Les yeux embués. Je suis si fière, si... nostalgique, aussi: la nature, la forêt, les montagnes, au quotidien, me manquent déjà. Mais d'ici au prochain défi... vivement mon lit!

Photo Marie-Soleil Desautels, La Presse

Parcourir l'Appalachian Trail, c'est aussi s'enfoncer dans un «tunnel vert», surnom du sentier.

Une générosité qui donne des ailes

Parcourir l'Appalachian Trail, c'est être témoin d'une générosité qui donne des ailes. Des inconnus, appelés trail angels, sèment de la magie en aidant les thru-hikers. Ils leur offrent de la nourriture, de l'eau, un endroit où dormir, une douche, un repas, du transport, etc. Autant d'expériences bouleversantes d'humanité.

L'heure du barbecue (et de redonner au suivant)

Alan Lessard, 57 ans, a parcouru l'AT avec son fils en 2014. La générosité des trail angels l'a tellement touché - il en a les larmes aux yeux lorsqu'il raconte son expérience - qu'il redonne au suivant depuis.

Deux fois par été, il se rend avec ses glacières dans une auberge du Maine, où il a lui-même séjourné, afin de cuisiner pour les thru-hikers. Ce soir: côtes de porc sur le barbecue et spaghetti pour 35 personnes. Demain matin: oeufs, bacon et pain doré.

Photo Marie-Soleil Desautels, La Presse

Alan Lessard redonne au suivant.

Pizza, bière, crème glacée... et glace sèche

«Une crème glacée?» nous offre un couple au beau milieu de la montagne, peu avant le mont Lafayette, dans le New Hampshire.

David et Monica Metsky ont randonné 7 km et monté 1000 m de dénivelé pour se rendre ici. Sur leur dos: glace sèche, 18 sandwichs à la crème glacée, 2 pizzas complètes et 6 bières.

Ils sont venus saluer l'un de leurs amis thru-hiker qui passait par là aujourd'hui et en gâter plusieurs autres.

Photo Marie-Soleil Desautels, La Presse

David et Monica Metsky et leur restant de glace sèche.

Une omelette de 24 oeufs 

Presque chaque jour de l'été depuis deux ans, Carl Spring, «The Omelette Guy», se rend à son installation broche à foin près de l'AT, dans le New Hampshire.

Il transporte jusqu'à 20 douzaines d'oeufs par jour, en plus d'oignons, de poivrons, de jambon, de fromage, de muffins maison, de bananes, de café, de jus. Il nourrit ainsi gratuitement des centaines d'estomacs sur deux pattes.

«Aucun thru-hiker ne reste sur sa faim!», jure ce sympathique retraité de la construction qui cuisine sans hésiter des omelettes de plus de 24 oeufs par personne.

Photo Marie-Soleil Desautels, La Presse

Carl Spring, «The Omelette Guy», cuisine sans hésiter des omelettes de plus de 24 oeufs par thru-hiker.

Avant le «trail magic»

Chaque premier week-end d'août depuis quatre ans, Joseph F. Cook s'installe dans un stationnement près d'une intersection entre l'AT et une route passante qui mène à Manchester, dans le Vermont. Il offre des maïs, des hot-dogs, de la bière et du jus.

Cet avocat a complété l'AT il y a 45 ans, «avant que le trail magic existe», dit-il, avec fierté.

Il entretient aussi bénévolement le sentier avec le club local de randonnée.

Photo Marie-Soleil Desautels, La Presse

Joseph F. Cook a parcouru l'AT avant que le trail magic existe.

Camping à volonté

Depuis 1979, Tom Levardi a accueilli des centaines de randonneurs chez lui, dans le village de Dalton, au Massachusetts. L'AT passe devant sa maison. Il les autorise à camper dans sa cour ou à dormir sur son porche.

L'an dernier seulement, plus de 800 thru-hikers y ont séjourné.

«Ça leur permet de camper gratuitement en ville, près de l'épicerie, et moi, de rencontrer des gens extraordinaires, de partout dans le monde», dit-il. À l'occasion, il offre beignes, fruits et café.

Photo Marie-Soleil Desautels, La Presse

Tom Levardi accueille des campeurs chez lui depuis près de 40 ans.

Notre père Noël

Mon amie et moi avons rencontré le père Noël en faisant du pouce pour aller nous ravitailler et nous décrotter à Front Royal, en Virginie. Il s'est arrêté, nous a conduites en ville et, une fois à l'hôtel, nous a offert une bouteille de vin ainsi que des sachets de nourriture lyophilisée: 10 repas, des fruits et même de la crème glacée.

Larry Smith, retraité de l'armée qui gâte ainsi quelque thru-hikers par année, est revenu le lendemain avec les cadeaux dans son... traîneau rouge!

Photo Marie-Soleil Desautels, La Presse

Larry Smith, retraité de l'armée, gâte quelque thru-hikers par année.

Bienvenue chez nous

Ashley et Jerry Mullens nous ont reçues comme des reines dans une grande simplicité. Tandis qu'on traversait un champ en Virginie, le jeune homme, sur son quatre-roues, s'est arrêté pour discuter. Il nous a demandé où l'on prévoyait dormir.

En cette période de sécheresse, je lui ai répondu: «Là où il y aura de l'eau!» Il nous a dit qu'il en avait chez lui, qu'on pourrait s'y doucher et faire notre lessive, qu'il avait une chambre et de quoi nous nourrir, dont des hot-dogs au chili.

Une rencontre inoubliable.

Photo Marie-Soleil Desautels, La Presse

Ashley et Jerry Mullens nous ont accueillies comme des reines, dans leur domicile, en Virginie.

À boire!

De l'eau. Des locaux en déposent régulièrement à la jonction d'une route avec l'AT. En période de sécheresse, lorsque les cours d'eau se tarissent, découvrir de telles cruches d'eau est un véritable don du ciel.

Impossible de remercier en personne ces trail angels qui les déposent anonymement, souvent, jour après jour.

Parfois, il y aura aussi des boissons, de la bière, des fruits et quelques collations à se mettre sous la dent.

Photo Marie-Soleil Desautels, La Presse

Trouver de l'eau près de l'AT est comme un don du ciel, surtout lorsque celle-ci se tarit.

L'Appalachian Trail, c'est...

2189,8 milles: la longueur de l'Appalachian Trail était de 2189,8 milles (3524 km) en 2017, depuis le mont Springer (1153 m), en Géorgie, jusqu'au sommet du mont Katahdin (1605 m), dans le Maine. La distance varie d'une année à l'autre en fonction de nouveaux tracés.

14 États: le sentier de l'Appalachian Trail, terminé en 1937, traverse 14 États américains. Il passe aussi à travers 12 villes, que ce soit dans la rue principale ou dans une rue en périphérie.

16 fois le mont Everest: le dénivelé total de l'AT équivaut à monter et à descendre 16 fois le mont Everest, du niveau de la mer jusqu'à son sommet (8848 m). L'altitude maximale de l'AT n'est toutefois que de 2025 m.

5 millions de pas: il faut mettre un pied devant l'autre quelque 5 millions de fois pour parcourir l'AT.

165 000 balises: le sentier est balisé d'environ 165 000 traits de peinture blanche tracés sur des arbres, des roches, l'asphalte, etc.

261 abris: il y a 261 abris, dits shelters, le long de l'AT. La majorité sont des abris trois-faces, c'est-à-dire avec trois murs et un toit.

6000 bénévoles et 240 000 heures: l'entretien de l'AT repose en grande partie sur des bénévoles. En 2017, près de 6000 d'entre eux, impliqués dans l'un des 31 clubs de randonnée associés à l'AT, ont donné 240 000 heures. Ils ont, entre autres, élagué des arbres, retiré des obstacles, dévié des tronçons pour contrer l'érosion, creusé des fossés pour évacuer l'eau, restauré des sites de camping illégaux, réparé des abris, peint et repeint des balises ou ramassé des déchets.

Thru-hiker: il faut avoir fait l'AT en moins de 12 mois pour être considéré comme un thru-hiker. Un section-hiker parcourra tout le sentier sur plusieurs années.

Poing fermé: les thru-hikers se saluent en se frappant le poing plutôt qu'en se serrant la main pour limiter la propagation des germes.

45 jours, 12 heures et 15 minutes: record de vitesse établi en 2017 par l'Américain Joe McConaughy pour terminer l'AT sans l'aide d'une équipe.

82 ans: le plus vieux thru-hiker de l'AT l'a parcouru à l'âge de 82 ans, en 2017. Il s'agit de Dale «Grey Beard» Sanders.

6000 calories: un randonneur brûle jusqu'à 6000 calories par jour sur l'Appalachian Trail.

S'organiser

L'internet regorge de renseignements pour ceux qui désirent se lancer sur l'Appalachian Trail. On retiendra entre autres le site de l'Appalachian Trail Conservancy, le site de randonneurs The Trek.co ou encore White Blaze. Plus de 80 % des randonneurs parcourent l'AT en partant en Géorgie, souvent en mars. Le sentier y est facile par rapport au Maine, ce qui permet un début progressif. D'autres commencent au milieu de l'AT. Pour s'orienter sur le sentier, la grande majorité des randonneurs utilise The A.T. Guide Handbook de David «AWOL» Miller; ils ne transportent pas de cartes topographiques. Il n'y a pas de permis spécial requis pour réaliser l'AT, mais deux parcs nationaux exigent que les thru-hikers se procurent un accès (l'un est gratuit, l'autre coûte 20 $US).

Source: Appalachian Trail Conservancy

http://www.appalachiantrail.org

https://thetrek.co/

https://theatguide.com/

Rencontrés sur la route

L'Appalachian Trail est un défi hors norme, rempli de hauts et de bas. Rencontrés en chemin, des randonneurs de longue distance - qui s'identifient traditionnellement par un surnom -  nous parlent de leur expérience.

Tom «Grey Eagle» Young, 75 ans

Pourquoi ce défi? Pour être tout ce que je peux être à 75 ans!

Votre endroit favori? Katahdin: objectif atteint!

Votre meilleure anecdote? J'ai été frappé par la foudre lors d'un orage... et je suis encore en vie. Un éclair orange a jailli près d'où j'étais, a touché mon pied gauche et je me suis retrouvé dans les buissons.

Le plus difficile? Redescendre du sommet après avoir été frappé par la foudre. J'ai eu la jambe puis les orteils tout engourdis.

Vous auriez dû... Avoir une alimentation plus complète en protéines et glucides.

Des conseils? Mettez-vous en forme avant de partir!

Votre parcours: 165 jours, dont 10 journées de pause (départ le 22 mars en Géorgie)

Photo Marie-Soleil Desautels, La Presse

Tom «Grey Eagle» Young, 75 ans

Robert «Doc» King, 55 ans et Meredith «Tunes» King, 18 ans, père et fille

Pourquoi ce défi? Pour vivre une expérience unique ensemble.

Votre endroit favori? Le Maine, accidenté, mais magnifique et sauvage avec ses lacs.

Votre meilleure anecdote? En mars, on s'est réveillés dans le blizzard. On avait 32 km à marcher jusqu'à un abri. À 18 h, il y avait 45 cm de neige. On a ajouté 11 km pour aller dormir au chaud dans un village.

Le plus difficile? On a eu la maladie de Lyme à cause de morsures de tiques. On était dans un état lamentable; on a dû être traités.

Vous auriez dû... Ne pas transporter de crampons au début: inutiles.

Des conseils? N'abandonnez pas lors d'une mauvaise journée!

Votre parcours: 155 jours, dont 23 jours de pause (départ le 16 février en Géorgie)

photo fournie par Robert et Meredith King

Robert «Doc» et Meredith «Tunes» King, père et fille, 55 ans et 18 ans

Kristen «Brightside» Geary, 24 ans

Pourquoi ce défi? Pour me dépasser avant mes études de droit.

Votre endroit favori? Coucher de soleil splendide à Tinker Cliffs, en Virginie.

Votre meilleure anecdote? Il pleuvait. J'étais installée dans un abri trois-faces presque plein pour la nuit. Trois randonneurs sont arrivés et tout le monde s'est tassé pour qu'ils aient un toit. Il y a tellement de gentillesse tout le temps.

Le plus difficile? Le sud du Maine: très accidenté et j'étais très fatiguée.

Vous auriez dû... Ralentir et passer un peu plus de temps dans des villages.

Des conseils? Souriez devant les kilomètres ! Le sentier ne va nulle part: votre bonheur doit être votre priorité.

Votre parcours: 137 jours, dont 12 journées de pause (départ le 25 février en Géorgie)

Photo fournie par Kristen Geary

Kristen «Brightside» Geary, 24 ans

Linda «Ghosthiker» Moore, 52 ans

Pourquoi ce défi? J'adore randonner.

Votre endroit favori? Les fabuleuses montagnes de Virginie.

Votre meilleure anecdote? Un ours est passé à moins de trois mètres de moi... alors que je faisais mon numéro deux.

Le plus difficile? Une engelure au premier degré après trois jours de marche dans la neige avec de vieilles chaussures très usées.

Vous auriez dû... Prendre moins de journées de pause.

Des conseils? Faites du camping sauvage, seul, c'est fantastique.

Votre parcours: 205 jours, dont 55 jours de pause (départ le 15 mai en Virginie-Occidentale)

Photo fournie par Linda Moore

Linda «Ghosthiker» Moore, 52 ans

Travis «Finn» Sindewald, 23 ans et John «Thor» Sindewald, 30 ans, frères

Pourquoi ce défi? Pour randonner en famille.

Votre endroit favori? L'arête rocheuse du mont Lafayette était épique.

Votre meilleure anecdote? Nos neuf premiers jours dans le Maine: à cause d'erreurs, on a marché 240 km au lieu de 180 km avec des rations déjà très insuffisantes... dont des tortillas «infusées» de notre poudre pour le corps, car on les avait rangées à côté. Dégueulasse!

Le plus difficile? Se retrouver au même endroit le midi et en soirée; on a parfois mal communiqué et on s'est cherchés.

Vous auriez dû... Alléger nos sacs à dos en investissant le temps et l'argent nécessaires.

Des conseils? Ne vous laissez pas influencer par les autres: faites votre propre randonnée.

Votre parcours: 145 jours, dont 14 jours de pause (départ le 20 juin dans le Maine)

photo fournie par Travis et John Sindewald

Travis «Finn» et John «Thor» Sindewald, frères de 23 et 30 ans

Charlie «T. N. C.» Arsenault, 54 ans

Pourquoi ce défi? Je rêvais de plein air.

Votre endroit favori? Tout le Maine, si beau, sauvage et reculé.

Votre meilleure anecdote? Pour briser l'ennui, je me disais que je verrais quelque chose que je n'avais jamais vu à chaque courbe ou détour du sentier. Et c'était vrai.

Le plus difficile? Être éloigné de ma famille et de mes amis aussi longtemps. Je me suis ennuyé d'eux.

Vous auriez dû... Ne pas débuter en Géorgie, il y a trop de monde. Un itinéraire discontinu, en partant du milieu, par exemple, aurait été préférable.

Des conseils? N'attendez pas qu'il soit trop tard. Allez-y maintenant.

Votre parcours: 185 jours, dont 51 jours de pause - plusieurs à la maison (départ le 28 mars en Géorgie)

Photo Marie-Soleil Desautels, La Presse

Charlie «T. N. C.» Arsenault, 54 ans