Les sociétés de croisières mettront à l'eau 11 nouveaux paquebots, cette année, pour une capacité totale de 27 267 lits, soit l'équivalent d'une cinquantaine de grands hôtels montréalais. La majorité de ces navires flambant neufs - soit six sur onze - entameront leur carrière commerciale en navigant en Méditerranée ou le long des rivages d'Europe du Nord. Ce qui aurait été impensable il y a cinq ans ! Un nouveau paquebot était alors presque automatiquement affecté à la zone géographique la plus populaire auprès des croisiéristes : les Caraïbes. Même en 2008, la décision d'affecter tant de capacité à des itinéraires en Méditerranée ou en mer Baltique aurait été qualifiée de «commercialement suicidaire» par les experts.

Traditionnellement, le gros de la clientèle des sociétés de croisière est américaine. Or, les Américains, encore traumatisés par les attentats du 11 septembre 2001, répugnaient à s'éloigner de chez eux. L'an dernier, c'est la crise économique qui les a retenu aux États-Unis. La décision des dirigeants des sociétés de croisière est aujourd'hui fondée sur deux facteurs. Le premier, c'est que les Américains ont recommencé à voyager. Le second, c'est que l'éventail des clientèles s'élargit et que les Européens sont de plus en plus nombreux à bord des navires de croisière. Par exemple, sur les paquebots d'Azamara, la marque haut de gamme du holding Royal Caribbean, 45 % des passagers ne sont pas américains (et 11 % sont canadiens).

Parmi les paquebots flambant neufs qui seront déployés dans des eaux européennes, l'été prochain, on mentionnera notamment le Celebrity Eclipse (2850 passagers), le Nieuw Amsterdam, de la Holland America (2104 passagers), le Sojourn, de la société de grand luxe Seabourn (450 passagers), et le dernier bébé de la Cunard, le Queen Elizabeth (2092 passagers).

C'est sans compter les navires qui avaient déjà leurs habitudes en Méditerranée ou en mer Baltique. Certains paquebots - notamment le Norwegian Jade de Norwegian Cruise Line - passent même l'hiver en Méditerranée.

L'engouement pour les croisières en Europe se fait également sentir au Québec. «C'est quasiment automatique : après avoir essayé deux croisières dans les Antilles, nos clients achètent une croisière en Méditerranée et la Baltique suscite de plus en plus d'intérêt», constate Guy Bergeron, propriétaire de l'agence Croisières pour tous, à Laval.

Les grands voyagistes québécois comme Vacances Transat misent sur la hausse de la demande. C'est d'abord pour aider Vacances Transat à vendre les croisières au départ de Venise (cinq navires sur lequel le grossiste détient d'importants contingents de cabines) qu'Air Transat dessert Venise en vol direct de Montréal, de mai à octobre.

Depuis l'an dernier, Tours Mont-Royal commercialise le Bleu de France, un paquebot de 752 passagers exclusivement vendu dans la francophonie, qui fait une série de croisières en Italie, en Tunisie et en Espagne au départ de Marseille.

Malgré la hausse de capacité qui sera mise en marché, il semble que les prix se maintiendront. «Les tarifs sont intéressants, mais on ne sent pas de tendance à la baisse comme c'était le cas l'an dernier», observe Éric St-Pierre, chef de produits chez le voyagiste Évasion Croisières Encore.

En ce qui concerne les escales, il ne faut pas s'attendre à une pléthore de nouveautés, comme cela a été le cas au cours des dernières années, alors que certains navires ont commencé à fréquenter les ports de la côte dalmate - Split notamment -, les bouches de Kotor au Monténégro ou encore les stations touristiques de la mer Noire (Sinop, en Turquie, Sotchi, en Russie - maintenant fréquentées par des paquebots de la Holland America).