J'avais un an au moment de l'Exposition universelle de 1967. Voilà, c'est fait, vous connaissez mon âge. Adepte d'architecture et d'art moderne, j'ai retrouvé certains vestiges de l'Exposition universelle tout en me baladant dans la verdure du parc Jean-Drapeau, qui s'étend sur les îles Notre-Dame et Sainte-Hélène.

Dimanche matin. Direction pont de la Concorde. J'apporte un guide avec moi: Sur les traces du Montréal moderne et du domaine de l'Estérel au Québec (Civa, 2007). Cet ouvrage présente sept promenades dont une consacrée à l'Expo 67.

 

Avant d'atteindre l'île Notre-Dame, je m'arrête quelques minutes pour admirer l'un de mes bâtiments montréalais préférés: le complexe résidentiel Habitat 67, avenue Pierre-Dupuy. Des adeptes de surf défilent derrière l'immeuble à la recherche de vagues et de sensations. La mégastructure en béton affiche les affres du temps. N'empêche, l'oeuvre aux allures de sublime sculpture (signée Moshe Safdie) me fascine à tout coup.

Le Casino, un joyau

Le pavillon de la France, occupé par le Casino de Montréal, est une sorte de joyau géant. En façade, j'admire le jeu des lames brise-soleil d'aluminium. Face à l'entrée principale, l'Obélisque oblique, une sculpture aux formes acérées en acier inoxydable pique ma curiosité. Après l'Expo, la France a fait cadeau du bâtiment et de la sculpture à la Ville de Montréal.

Tout près, le pavillon du Québec, maintenant annexe du Casino, scintille au soleil. En 1996, lors de la rénovation de l'édifice (alors en ruine), le mur-rideau bleuté d'origine a été remplacé par du verre doré opaque. Raison? L'isolement est un impératif pour le jeu. Auparavant, le verre miroir réfléchissait le ciel le jour et laissait voir l'intérieur, le soir. Dommage, je n'ai jamais pu contempler cet effet autrement qu'en photos. Dans le bassin surgit une sculpture (intitulée Acier) formée de plaques d'acier froissées. Elle a été conçue par Pierre Heyvaert et représente les trois grands thèmes du pavillon: le défi, le combat et l'élan.

Les rides après 40 ans

Le pavillon de la Jamaïque est flanqué d'échafauds. Sur un panneau il est écrit que le pavillon (décrépit) se refait une beauté grâce à la Société du parc Jean-Drapeau, avec la collaboration de la Ville de Montréal. Malgré son mauvais état, on distingue son architecture inspirée de l'auberge jamaïcaine.

J'aperçois le Centre des arts du pavillon du Canada. Déception: l'édifice (le seul «survivant» des neuf structures que comportait le pavillon du Canada) semble négligé. Exemple? Le vinyle blanc de la toiture - formée de pyramides inversées - aurait grandement besoin d'être nettoyé ou carrément renouvelé. Derrière les fenêtres on aperçoit les bureaux de l'Administration de la Société du parc Jean-Drapeau. «Pour le moment, il n'y a pas de travaux de rénovation prévus», affirme Ève Cardinal, coordonnatrice des communications.

Bien sûr, à l'origine, ces pavillons n'avaient pas été construits pour durer pendant des décennies, mais pour accueillir les visiteurs pendant six mois. N'empêche, les bâtiments encore debout ne pourraient-ils pas être restaurés?

Avant de mettre le cap sur l'île Sainte-Hélène, je jette un oeil au mât totémique Kwakiutl. Cet imposant totem est le seul témoignage de la présence du pavillon des Indiens du Canada. Sa restauration réalisée en 2007 par des membres de la famille du sculpteur est excellente. Quant au pavillon de la Corée, le bois de son impressionnante toiture affiche des signes de vieillissement.

Bella Biosphère

Arrivée à l'île Sainte-Hélène, je fonce vers la Biosphère. Ce dôme géodésique figure parmi les bâtiments les plus avant-gardistes du XXe siècle. Superbe boule de dentelle métallique, la structure n'a pas pris une ride. Il faut dire que le travail du concepteur du projet de rénovation, l'architecte montréalais Éric Gauthier, est remarquable. À l'intérieur, une phrase du concepteur du pavillon des États-Unis, Richard Buckminster Fuller, attire mon attention: «La meilleure façon de prédire l'avenir est de le façonner.»

Je longe le bassin d'eau et me dirige tranquillement vers L'Homme... le stabile du sculpteur Alexander Calder. Fascinante, sa structure en acier inoxydable se détache nettement sur le ciel azur. Sous ses arches effilées surmontées de disques et de pointes se trouve une plaque. On peut lire: «Des documents relatifs à la cérémonie du 17 mai 1967 ont été scellés sous cette plaque avec l'espoir qu'ils se conserveront en bon état et que le 17 mai 2067, le maire de Montréal voudra en prendre connaissance.»

Cap sur le Cosmos

Plusieurs sculptures se cachent dans la verdure du parc. Après avoir facilement repéré les Girafes faites de barres d'acier, l'animal de fer Migration et l'Orbite optique en béton, dans l'entrée de La Ronde, j'ai longuement marché pour trouver le Phare du Cosmos et le Signe solaire.

Faute de plan précis et de signalisation (!), j'ai demandé à plusieurs personnes si elles avaient aperçu un robot géant (c'est la forme du Phare du Cosmos). Toutes m'ont d'abord regardée bizarrement pour ensuite me répondre non. J'ai donc fait signe à un employé du parc. Jean-Guy Marchand, responsable de l'équipe de sécurité des artificiers, m'a guidée. Le Phare se trouve non loin du pont de la Concorde, m'a-t-il dit. OEuvre de l'artiste québécois Yves Trudeau, ce superbe robot au style rétro-futuriste était à l'époque animé par un système de rotation et émettait des bruits cosmiques!

J'ai terminé mon voyage dans le temps (ou dans l'espace) à proximité de la passerelle du Cosmos, à l'intersection du chemin MacDonald. C'est ici que se trouve l'étonnant Signe solaire, une mystérieuse sculpture couleur bronze signée Jean Le Fébure.

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Pour de l'information sur le circuit culturel (profil Art public) du parc Jean-Drapeau: www.parcjeandrapeau.com