J'ai connu Liverpool il y a une douzaine d'années. J'y avais enseigné le français, langue seconde, dans un high school de troisième zone. Je n'y étais pas retourné depuis, pour préserver intact un souvenir chéri. Malgré le caractère rugueux des lieux, qui se remettaient à l'époque d'une longue dépression, j'avais adoré mon séjour. Quand la ville a été désignée capitale culturelle de l'Europe pour 2008, j'ai réalisé que l'occasion de me fabriquer de nouveaux souvenirs était trop belle pour que je la laisse passer. Je m'étais laissé dire que je renouerais avec une ville ragaillardie. Je ne m'attendais pas à trouver une véritable ruche, bourdonnant d'activité...

Le centre-ville, parsemé de chantiers, est en train de subir un facelift majeur. L'imposante aire commerciale Liverpool 1, qui regroupe quantité de boutiques à la mode, permet aux locaux de s'adonner à un de leurs passe-temps préférés : le magasinage.

 

À quelques jets de pierre de là, sur le bord de la rivière Mersey, la promenade construite sur le défunt Albert Dock abrite maintenant plusieurs musées et boîtes dans le vent. Les amateurs de culture y trouveront l'excellent Musée maritime ainsi que l'incontournable galerie Tate Liverpool. Les fans de branchitude y repéreront le bar-restaurant Babycream, densément fréquenté la fin de semaine.

La promenade le long des quais, fortement recommandée, permet de jeter un coup d'oeil sur le squelette du Liverpool Museum. Avec ses allures de hangar d'aéroport, la construction en devenir laisse pour le moins perplexe. Il faudra attendre jusqu'en 2010 avant de voir comment le vaste bâtiment changera le paysage classique du Pier Head, où, depuis presque un siècle, trônent les Trois Grâces (les Liver, Cunard et Port of Liverpool Buildings).

Je termine ma balade en visitant les deux cathédrales liverpooliennes : l'étonnante catholique, avec sa forme simili-conique rappelant un tipi, et l'imposante anglicane, pur produit de style néogothique. Mais l'heure avance, et il est temps d'aller communier à un autre autel.

Vendredi soir, rue Slater. Les filles, arborant leurs robes trop courtes, caquettent en se dirigeant vers leur pub préféré. Au passage, les garçons s'amusent à leur lancer quelques remarques piquantes. Dans le très grouillant quartier Ropewalks, ancien nid de manufactures désaffectées, les enseignes colorées attirent les jeunes fêtards comme autant de papillons de nuit. L'ambiance est électrique. Il y a comme l'urgence de faire le plein après une autre semaine de boulot. Quand les pubs fermeront, à 23h, on ira s'entasser dans une discothèque ou une salle de concert pour gigoter jusqu'aux petites heures.

Manchester

Pendant ce temps, au coeur du chaud quartier de Deansgate Locks, la jeunesse de Manchester s'abandonne aux mêmes plaisirs. On écluse quatre ou cinq pintes de houblon avant d'engloutir une assiette de fish and chips bien huileuse, puis on sort se trémousser en boîte jusqu'à très tard - ou très tôt, c'est selon. Faire la bamboula la fin de semaine? Un sport national auquel Manchester et Liverpool excellent depuis toujours.

J'ai découvert Manchester à la même époque où je transmettais quelques rudiments de français du côté de Liverpool. J'en gardais le souvenir d'une ville grise et sale. Les quelques fois où j'y avais mis les pieds, je m'étais fait doucher toute la journée - la ville est, paraît-il, la plus pluvieuse d'Angleterre. C'était à l'hiver 1996, juste avant qu'une bombe posée par l'IRA vienne labourer les environs du centre commercial Arndale, en plein coeur de la métropole.

Paradoxalement, c'est ce triste événement qui a donné à Manchester l'élan nécessaire à moderniser certains quartiers clés. Les amateurs d'architecture décoiffante apprécieront le sidérant bâtiment de verre Urbis. La chose regroupe, sur six étages, musée, galerie, café et boutique. De là, cap sur Picadilly Gardens, glorieux jardin urbain réinventé, qui se cache derrière le toujours hideux mail Arndale. Comme quoi certaines choses n'ont pas changé!

Après une courte balade en tramway, je descends dans le secteur Salford Quays, autre exemple de la revitalisation manchesteroise. Cette zone, il y a 10 ans, avait tout d'un no man's land. Aujourd'hui, en cheminant le long du canal de Manchester, j'y découvre des édifices hauts en couleur. Entre autres, l'étonnante galerie d'art Lowry, de forme cylindrique, qui ressemble un peu à une cheminée. Mais le clou du spectacle est sans contredit l'Imperial War Museum North, dessiné par Daniel Libeskind. Son contenant et son contenu sont également remarquables.

Sur le rivage opposé, je remarque une intrigante structure en pleine construction. «C'est le futur quartier général de la BBC», m'informe une résidante en transit... S'ensuit un brin de discussion sur l'état des lieux et la renaissance de Manchester. Puis vient la question qui tue : «Quelle est votre prochaine destination, alors? Liverpool? Ah bon! On dit que c'est bien. Remarquez, je n'y suis jamais allée de ma vie...» Le grand amour, qu'on vous disait.

Repères

Transport : nombreux vols vers l'aéroport international de Manchester, par Londres ou l'Europe.

Climat : pluvieux et humide, évidemment. Cela dit, le soleil se fait moins rare qu'on le pense.

Foot : le Liverpool F.C. joue à Anfield. Manchester United, à Old Trafford. Les deux clubs, éternels rivaux, figurent parmi le gotha du football européen.

Langue : l'anglais, vous direz... Oui, mais parlé avec un accent très prononcé, et qui n'est pas le même à Manchester qu'à Liverpool. Coloré.

Adresses

Liverpool : www.liverpool08.com/francais

Manchester : www.visitmanchester.com