Roulement de tambour: après des rénovations qui auront finalement coûté plus de 70 millions de dollars, l'emblématique Château Frontenac nouvelle version accueille ses clients dès aujourd'hui. Pour une nuitée ou un repas. Aperçu des nouveautés.

Dans les faits, l'hôtel emblématique n'a jamais fermé ses portes, même pendant les rénovations les plus importantes. Les restaurants étaient fermés, le lobby aussi, mais les clients étaient toujours accueillis dans les chambres qui dévoilaient leur nouveau look, en lot. Il faut s'attendre à un style plus contemporain, mais toujours classique. On pense davantage au décor des chambres du Ritz-Carlton de Montréal qu'à celles du W.

Les habitués seront néanmoins agréablement surpris. Le style lourd, voire poussiéreux de l'hôtel a disparu grâce à de multiples petites améliorations, plus ou moins visibles. On a par exemple changé la moquette partout. C'est 12 km de corridor qui ont dit bye bye à cette carpette foncée qui assombrissait dramatiquement les allées.

Parmi les disparus se trouvent aussi les bains. Les salles de bains des chambres étant petites, il a fallu sacrifier le bain qui faisait aussi office de douche. Plus très chic, le rideau de douche dans une chambre d'hôtel cinq étoiles. Seules quelques chambres plus familiales conservent une baignoire, car les parents qui voyagent avec des petits aiment bien en avoir une dans la chambre, précisait le directeur général du Château, Robert Mercure, lors d'une visite du chantier, plus tôt cette année.

Environ 200 chambres, rénovées, ont aussi conservé une décoration plus classique, pour plaire aux clients qui aiment bien ce style «hôtel chic des années 70».

Un hôtel dans l'hôtel

Restait aussi à combler une clientèle exigeante qui est prête à payer plus cher pour avoir un meilleur service et de petites attentions. Les clients typiques des hôtels boutiques, plus petits, qui sont déjà bien servis à Québec.

«Nous ne sommes pas un hôtel boutique de 100 chambres qui peut se concentrer sur un seul marché, explique Robert Mercure. Nous devons jouer sur plusieurs marchés. Et protéger l'un et l'autre.»

Une soixantaine de chambres «Or» situées du 12e au 17e étage sont donc destinées à cette clientèle qui, à l'inverse de la majorité, va choisir la chambre offrant le tarif le plus élevé pour une nuitée, cherchant la crème de la crème de l'hôtellerie. Ces clients auront notamment droit au petit-déjeuner et aux canapés à l'apéro, servis dans un lounge privé. Sur le site de l'hôtel, une chambre Or pour un samedi d'été s'affiche à 639$ alors que la chambre ordinaire est offerte à partir de 349$, pour la même nuit.

De nouvelles attentions sont aussi mises en place pour mieux satisfaire toutes les clientèles. La clientèle d'affaire, très importante au Château Frontenac, et les groupes bénéficieront d'une entrée réservée à leur arrivée. On leur permettra aussi de déjeuner dans une salle à part. Ce qui satisfera également la clientèle de plaisance, qui pourra ainsi déjeuner en paix, loin des collègues de bureau bruyants avec des étiquettes autour du cou.

Des restaurants pour les Québécois

Les nouveautés les plus remarquées dans le nouveau Château Frontenac seront certainement les restaurants, complètement revus, tant dans leur décor que dans leurs menus. Il y en a maintenant trois, plutôt que deux: le 1608, bar à vins et à fromages québécois, Le Sam, petit bistro, et le Champlain, dont seul le nom est demeuré inchangé. «Nous avons fait beaucoup de recherches, explique Stéphane Modat, nouveau chef des restaurants de l'hôtel. En commençant par se demander où est rendue la cuisine québécoise aujourd'hui.» Et d'où elle vient, de toute évidence, car il y aura aussi une saveur historique au menu. Notamment avec des carottes blanches et la poule Chanteclerc, cette race patrimoniale qui est devenue le plat signature du Champlain. Elle sera servie cuite sous vide dans du cidre de glace, farcie de champignons.

Le homard, par contre, est apprêté avec... de la noix de coco! Certains ingrédients exotiques font partie de notre patrimoine alimentaire depuis si longtemps, explique Stéphane Modat, qu'ils sont devenus familiers. Et le chef ne voulait surtout pas servir un menu figé ou caricatural au Château. Il laisse les bines à d'autres. «C'est une cuisine québécoise réactualisée», précise le chef.

Le chef des cuisines, Baptiste Peupion, qui dirige l'ensemble des services de restauration du Château, abonde dans le même sens. Précisant que tant dans le menu que dans le service, les restaurants seront conviviaux. «Nous voulons travailler les produits de saison, dit le chef Peupion, et avoir une cuisine qui ressemble au Québec.»

La direction du Château admet que l'un des buts de ce renouveau est de ramener une clientèle locale dans ses restaurants. Que le Champlain ne soit pas que le restaurant de l'hôtel, mais la table où il faut aller à Québec. «Faire revenir les gens, c'est être plus proche d'eux, précise Baptiste Peupion. Désacraliser le lieu tout en gardant le côté sacré.»