Les importantes précipitations de neige tombées sur le Québec ont peut-être fait grincer des dents quelques préposés à la pelle, mais surtout pas les adeptes de ski et encore moins les propriétaires de stations. Partout au Québec, l'industrie du ski vit un hiver hâtif qui pourrait s'avérer lucratif.

Selon l'Association des stations de ski du Québec (ASSQ), 33 établissements parmi ses membres accueillaient skieurs et planchistes en cette première fin de semaine de décembre. Un nombre inhabituellement élevé en cette période de l'année.

Pour la directrice des communications et du marketing de l'ASSQ, Josée Cusson, les bordées de neige des derniers jours valent mieux que la meilleure des stratégies publicitaires.

« Quand il y a de la neige dans notre environnement, ça incite à aller jouer dehors », résume-t-elle. L'effet d'entraînement se fait sentir un peu partout au Québec où l'achalandage semble beaucoup plus élevé qu'à l'habitude ajoute Mme Cusson.

Un constat que partage le directeur général de la station Mont-Édouard, au sud de la rivière Saguenay, Claude Boudreault. De son propre aveu, son équipe n'était pas prête à recevoir 1,2 mètre de neige d'un coup. « Ça nous est tombé dessus, mais on s'est mobilisé pour ouvrir les pistes », a-t-il commenté.

« On a ouvert (vendredi) avec un achalandage monstre et encore (samedi) matin, la billetterie avait une demi-heure à trois quarts d'heure d'attente », a souligné celui qui n'avait jamais ouvert ses 32 pistes un 30 novembre en neuf ans à la tête de la station.

Même l'Outaouais, où la neige et le froid se font parfois attendre, bénéficie d'un bon tapis blanc en montagne.

« On a l'impression d'être à la fin décembre ou en janvier, observe le directeur de la station Sommet Edelweiss Jean-Sébastien Saia. On a plus la tête au ski que par des années précédentes. »

Hâtif ne rime pas avec lucratif

Du côté de l'ASSQ, on tempère légèrement l'enthousiasme financier en ce début de saison. Si ces revenus sont les bienvenus, il ne s'agit tout de même pas d'une mine d'or. On évalue l'achalandage avant la période des fêtes à environ 5 % de la fréquentation totale de la saison.

Un chiffre qui correspond aux données de la station du Mont Sutton, dans les Cantons-de-l'Est, confirme la directrice des communications Nadya Baron. « Sur une année financière, une ouverture hâtive peut représenter environ 2 % du chiffre d'affaires », précise-t-elle.

Sutton soutient tout de même avoir enregistré une hausse des abonnements de 13,5 % par rapport à l'hiver dernier, ce qui s'annonce positif.

Pour Claude Boudreault, au Mont-Édouard, ces revenus représentent tout de même des fonds imprévus appréciables.

« On commence nos budgets pour le mois de décembre, mais (vendredi) on se serait cru en mars ! C'est vraiment incroyable. Habituellement on est ouvert à 100 % pour le début des Fêtes, vers le 15 ou 20 décembre seulement », ajoute-t-il.

Le nerf de la guerre dans l'industrie, c'est justement d'être prêt pour le temps des Fêtes. Si la neige est au rendez-vous pour que les pistes soient skiables à Noël, la saison sera bonne.

« De manière générale, le temps des Fêtes représente 30 % du chiffre d'affaires, la relâche scolaire représente un autre 30 % et le reste de la saison se partage le reste », résume Nadya Baron.

Pénurie de main-d'oeuvre

Autre effet inattendu de ces bordées de neige automnales, plusieurs stations n'étaient tout simplement pas prêtes par manque de personnel. D'après Josée Cusson de l'ASSQ, plusieurs centres ont préféré ne pas devancer leur ouverture pour cette raison.

Comme c'est le cas dans l'industrie de la restauration et d'autres domaines de l'industrie touristique, la pénurie de main-d'oeuvre représente tout un défi.

« Habituellement, on a presque terminé l'embauche. Cette année, on note un léger ralentissement. On a des postes à combler dans la restauration, au service à la clientèle et pour l'opération des télésièges », énumère la porte-parole du Mont-Sutton.

Du côté du Sommet Edelweiss, Jean-Sébastien Saia reconnaît que tous les employeurs saisonniers traversent une période difficile, mais il mise sur une ouverture progressive pour combler les postes disponibles.

Ces enjeux de recrutement ne vont tout de même pas gâcher l'ambiance sur les pentes du Québec, alors que l'industrie de la glisse estime ses retombées économiques à 800 millions par année.

Les stations ont d'ailleurs investi pas moins de 476 millions pour améliorer leurs systèmes de remontées mécaniques, de fabrication de neige et pour rénover leurs chalets.

Tout ça pour le plus grand bonheur des quelque 1,4 million de Québécois mordus de ski et de planche en espérant que leur enthousiasme fasse boule de neige auprès des grincheux qui rêvent déjà du printemps.