Contrairement au héros de Charlie et la chocolaterie, les gourmands curieux n'ont pas besoin de ticket d'or pour découvrir l'atelier cacaoté de Christine Blais, niché dans le vieux village de Mont-Tremblant.

Il n'est pas bien grand, le lieu de travail dans lequel l'artisane autodidacte travaille comme une fourmi. Difficile de croire qu'en si peu d'espace parviennent à se masser la Tanzanie, l'Équateur, Trinidad, Madagascar ou le Viêtnam, sous forme de gigantesques sacs de fèves entassés dans l'entrée.

Été comme hiver, Christine Blais puise dans ces réserves puis trie, torréfie, casse, vanne, broie, moule, cuit avec minutie.

« Le cacao est plus fragile que le café, certaines étapes comme la torréfaction sont critiques pour la saveur », explique celle qui a accumulé, par ses propres moyens, de nombreuses techniques et connaissances sur le processus de fabrication du chocolat. « J'ai étudié et travaillé dans le domaine du design et de l'architecture, mais je n'ai aucune formation de chocolatière », confesse-t-elle.

« Une fois que mes trois enfants ont grandi, j'ai voulu faire quelque chose avec mes mains. Certains font des vins, moi, c'est du chocolat. » - Christine Blais

Inspirée par la popularité grandissante des productions artisanales « maison » où les tablettes sont conçues de A à Z à domicile (le « bean-to-bar »), elle s'est résolue à pourvoir son petit local de Mont-Tremblant des équipements nécessaires pour transformer le cacao en magie noire.

Le chemin est long et les manipulations sont nombreuses jusqu'au présentoir où les tablettes se retrouvent enveloppées dans d'élégantes enveloppes brunes. Ce sont les « Palettes de bine », moulées de façon à ressembler à des planches de bois.

« Mon père disait qu'il mangeait des "palettes" de chocolat, au lieu des tablettes », explique l'artisane, dont la famille avait déménagé dans les Laurentides dans les années 70.

On croque et on craque pour ces saveurs intenses, tantôt fruitées, tantôt corsées. Un savant mélange de fèves du monde, de sucre biologique... et de passion. Le tout, sans extra-beurre, insiste la chocolatière, qui caresse le projet de confectionner des tablettes 100 % bio.

Fèves en fête

À ce jour, jusqu'à 200 tablettes par semaine peuvent naître des mains de Mme Blais. L'artisane songe à réaménager l'espace de sa boutique, en adjoignant un comptoir de dégustation à l'atelier.

« Ma production pourrait grossir, mais je préfère y aller étape par étape. Le chocolat, c'est comme le vin ou le café : on assiste à une standardisation, et c'est une direction vers laquelle je ne veux pas aller. »

En attendant, elle régale la région des Laurentides : ses produits seront vendus au marché d'été de Mont-Tremblant (tous les samedis du 27 juin au 29 août, de 9 h à 13 h) et dans plusieurs points de vente, de Saint-Faustin à Sainte-Adèle. Et, à l'occasion, les chefs du coin (Chez Patrick, La P'tite Cachée) incorporent son or noir dans leurs desserts, par exemple sous forme de pana cotta ou de petits pots chocolatés.

Les « Palettes de bine » traversent même les ponts pour se rendre à Montréal, où on les retrouve dans les boutiques Geneviève Grandbois ou à La tablette de Miss Choco, entre autres.

Mais ce serait occulter l'envers du décor ; et un petit arrêt sur la route peut d'ailleurs y être tenté, Mme Blais étant généralement à la tâche dans son atelier du vendredi au lundi, entourée de poudre de cacao et de projets alléchants.

Alors si se dresse, un beau jour, une maison en chocolat dans les environs de Mont-Tremblant, nul doute que la chocolatière-architecte du coin y sera pour quelque chose.

Palette de bine

2048, chemin du Village, Mont-Tremblant