Parce qu'on manque parfois de temps pour faire un grand voyage, les balades permettent de découvrir un nouveau coin du Québec ou de le voir autrement. Cette semaine, détours dans les chemins de traverse de Lanaudière.

L'Assomption 

On croit souvent que L'Assomption, à une petite vingtaine de kilomètres de Montréal, n'est qu'une banlieue parmi d'autres. Erreur! Une fois passées les habituelles enseignes de bouffe minute et de stations-service, on découvre un coquet petit centre-ville plein de cachet, tout rempli de commerces et de restos sympathiques. 

L'Assomption est en outre le premier bourg fondé dans l'arrière-pays de Nouvelle-France, et il subsiste de cette époque plusieurs bijoux architecturaux, notamment rue Saint-Étienne (l'ancienne rue principale du village). 

L'un des plus remarquables est sans doute le superbe bâtiment d'esprit français construit en 1811 qui abrite aujourd'hui L'Oasis du Vieux Palais. On tombe à la renverse quand on apprend qu'il était abandonné et voué à la démolition lorsque Françoise Mayrand, l'actuelle propriétaire, en a fait l'acquisition en 1986. Impeccablement restauré, le bâtiment comprend notamment une salle de tribunal restée inchangée depuis son aménagement, en 1860.

Il paraît que l'endroit est habité de fantômes, et les amateurs de phénomènes paranormaux s'en délectent. Une partie de l'immeuble sert de gîte du passant, tandis que le reste accueille divers événements - «soupers-procès», mariages et autres. Mme Mayrand, toute menue dans les dentelles qu'elle affectionne, semble elle-même sortie d'un autre siècle.

L'Oasis du Vieux Palais

255, rue Saint-Étienne

L'Assomption

450 589-3266

www.oasisvieuxpalais.com

Sainte-Marcelline-de-Kildare

Sainte-Marcelline, gentil village lové dans les premières ondulations des contreforts laurentiens, abrite une maison qui ravira les amateurs d'art populaire et d'histoire. Joanne Renaud a créé là un petit musée-hommage consacré à feu son premier mari, Pierre Bélanger, et à l'art du fléchage, pour lequel ce dernier se passionnait au point de le hisser au rang d'art pur et simple.

La Maison du fléché donne à voir des pièces de collection d'une finesse inouïe, oeuvres d'artisanes connues ou non et de Pierre Bélanger lui-même, ainsi que divers objets liés à cette technique dont l'origine se perd dans la nuit des temps. 

Mme Renaud en conte l'histoire, étroitement liée à celle de la région de Lanaudière et à la présence autochtone, avec une affabilité et une verve intarissables. Elle vous fera aussi les honneurs de son jardin de plantes tinctoriales, où l'on apprend tant de choses que l'on se dit qu'il faudra absolument revenir. Ça tombe bien: Mme Renaud adore la visite. Il suffit de lui téléphoner pour s'annoncer. 

Maison du fléché Bélanger 

810, 10e Rang Sud 

Sainte-Marcelline

450 883-5438

PHOTO IVANOH DEMERS, LA PRESSE

Joanne Renaud, dans le petit musée qu'elle a créé à Sainte-Marcelline-de-Kildare, en hommage à son propre mari.

Sainte-Émélie-de-l'Énergie 

Passé Sainte-Marcelline, les fermes cèdent peu à peu la place à la forêt, qui enserre de près la route 343, puis la 347, laquelle nous emmène à Sainte-Émélie-de-l'Énergie. C'est un village tout sage et tout mignon qui doit son nom à la femme du premier colon à s'être installé ici et, dit-on, à l'énergie que celui-ci a déployée pour inciter ses commettants à le suivre. 

Rue Desrosiers, une joyeuse façade jaune attire l'oeil. C'est le Café de la Paix. Presque plus brocante que café, on y trouve une quantité ahurissante d'objets anciens, insolites, kitsch ou drôles, à vendre ou pas, selon l'attachement que leur vouent les propriétaires. 

Carolina Grashof, née en Argentine de parents allemands et arrivée au Québec en 2002, tient depuis deux ans cet adorable établissement avec son Québécois de mari. Les deux sont des collectionneurs invétérés. «Au début, on a commencé à mettre des objets un peu partout pour que les gens aient quelque chose à regarder pendant que je préparais le café - je n'avais aucune expérience, explique-t-elle en riant avec son bel accent roucoulant. Et puis c'est devenu ça!» 

On passerait des heures à examiner «ça», mais aussi à deviser avec Carolina, si aimable qu'on en oublierait de commander. Erreur! Outre une variété de paninis, soupes, gaufres, cafés, thés et tisanes, Carolina propose du maté, cette boisson tonique sans laquelle les Argentins ne pourraient vivre. 

«À partir de l'automne, le café deviendra officiellement aussi une boutique d'objets anciens, précise Carolina. On organise également des projections de documentaires et de vieux films ainsi que des réunions mensuelles de jeux rétro.»

Café de la Paix 

453, rue Desrosiers

Sainte-Émélie-de-l'Énergie

450 755-8256

PHOTO IVANOH DEMERS, LA PRESSE

Carolina Grashof, née en Argentine de parents allemands et arrivée au Québec en 2002, tient le Café de la Paix avec son mari.

Saint-Damien-de-Brandon

Reprenons la 347, qui fait le tour du très beau lac Matambin avant de nous mener à Saint-Damien, où Matthieu Huck et Geneviève Boudreault, potiers de leur état, ont choisi de s'installer il y a plusieurs années. Manque de pot (!), un incendie a complètement rasé leur vieille petite maison en décembre dernier. Qu'à cela ne tienne: ils ont retroussé leurs manches et construit de neuf une maison-atelier-boutique tout en bois blond, où la lumière et le paysage entrent à flots. Leur production, en partie cuite au feu de bois, tire de ce procédé des reflets et des tonalités uniques, impossibles à reproduire d'une pièce à l'autre. Tons de terre et de feu, motifs inspirés de la nature et des traditions (dont le fléchage, imaginez donc)... Tout est irrésistiblement beau, zen et charmant, à l'image des artisans, qui semblent tous les deux avoir bu quelque élixir de jeunesse. C'est l'air de Lanaudière qui fait ça, on dirait.

Poterie L'Arbre et la Rivière 

6757, rue Principale 

Saint-Damien-de-Brandon 

www.larbreetlariviere.com

Saint-Damien (bis) 

Amis des deux précédents, Jacob Lapierre et Anik Mondor sont aussi du genre pas tuable. En mars, la vieille étable dans laquelle ils avaient aménagé leur chèvrerie a décidé qu'elle n'en pouvait plus et s'est en partie effondrée. Ceux qui avaient foncé tête baissée dans l'élevage caprin il y a quatre ans seulement n'ont fait ni une ni deux: pas question d'abandonner. Ils ont confié à un voisin leur cheptel, heureusement indemne, le temps de construire un nouvel abri aux quelque 100 chèvres et chevreaux que compte maintenant le troupeau. 

En attendant que tout ce petit monde regagne ses nouveaux quartiers, on peut toujours arrêter à la boutique pour se procurer une céleste mousse de foie de chevreau au porto ou des saucisses qui, quand on les aura goûtées, feront qu'on n'en voudra plus d'autres. En prime, le sourire radieux et l'énergie contagieuse des deux éleveurs, que l'on peut aussi rencontrer au sympathique petit marché fermier de Joliette, les jeudis de 15 h à 18 h. 

Chèvrerie Barbe Bouc 

1211, chemin Beauparlant Est 

Saint-Damien-de-Brandon 

450 835-2052 

Boutique ouverte du vendredi au dimanche de 10h à 16h ou sur rendez-vous.

www.lachevreriebarbebouc.com

PHOTO IVANOH DEMERS, LA PRESSE

Les potiers Geneviève Boudreault et Matthieu Huck dans leur nouvelle maison-atelier-boutique de Saint-Damien-de-Brandon.

Saint-Jean-de-Matha 

Prenez le 6Rang pour gagner la route 131, qui mène à Saint-Jean-de-Matha à travers champs et bois. Vous voudrez peut-être vous arrêter à la Maison Louis-Cyr, où a vécu «l'homme le plus fort de tous les temps», pour en apprendre plus sur son époque et ses exploits. 

Ensuite, cap sur la Ferme Vallée verte 1912, qui fabrique le meilleur yogourt de la planète. Surtout, ne vous fiez pas à votre GPS pour la trouver. Il faut rouler 2 km dans le rang Guillaume-Tell après avoir quitté la route 131, faute de quoi, si vous écoutez votre GPS, vous pourriez vous retrouver devant une maison gardée par trois chiens et un propriétaire aussi peu amènes les uns que les autres. 

À la ferme, joie: ça sent bon le petit lait dans l'impeccable boutique, d'où l'on a vue sur l'aire de fabrication des fromages. Essayez les yogourts fermiers (celui à l'érable vous envoie directement au ciel) ou le lait à l'ancienne dans ses jolies bouteilles de verre. 

Une petite plateforme permet en outre d'aller faire coucou aux vaches, dans l'étable, où elles se déplacent librement et sont traites quand bon leur semble par un robot digne d'un roman de science-fiction. Aucun meuglement ne se fait entendre, et ça sent presque la rose. Faut croire qu'elles sont heureuses, ces bonnes bêtes.

Ferme Vallée verte 1912

180, rang Guillaume-Tell 

Saint-Jean-de-Matha

450 886-2288 

www.fermevalleeverte.com

PHOTO IVANOH DEMERS, LA PRESSE

Pancarte annonçant la Ferme Vallée verte 1912.