Où peut-on apprendre à chasser à Montréal? Dans un local des Chevaliers de Colomb de Pointe Saint-Charles, bien sûr! C'est dans ce lieu inusité, au décor défraîchi, que le Club de chasse et pêche Cabou offre, plusieurs fois par année, les cours qui permettent d'obtenir le certificat de chasseur, l'attestation obligatoire pour acquérir un permis de chasse au Québec.

En ce samedi matin de septembre, une trentaine de personnes, en majorité des hommes, ont choisi, comme moi, de sacrifier leur précieux week-end pour apprendre les règles de la chasse sportive, sachant que plus tard, gros panache en mains, ils ne regrettaient pas les heures perdues à l'ombre, ni le lever aux aurores (le cours commence à 7h30).

 

Deux chasseurs chevronnés donnent bénévolement cette formation qui comprend deux volets: le cours canadien de sécurité dans le maniement des armes à feu (CCSMAF) et le cours d'initiation à la chasse. Pour recevoir son certificat de chasseur, il faut obtenir la note de passage aux deux examens, qui ont lieu à la fin de la journée.

Il s'agit donc d'un week-end intense à comprendre, de A à Z, l'éthique du chasseur moderne. Offerte depuis 1972, cette formation donne des résultats. Les accidents de chasse diminuent constamment, bien que le nombre de chasseurs augmente, tandis que les comportements en forêt se civilisent. Des alcooliques se baladant avec une arme à feu chargée en forêt, ça se voit de moins en moins, soutiennent Denis Dumoulin et Gilles Labine, nos deux formateurs.

Avez-vous remarqué que le traditionnel défilé des panaches sur les camions tend à disparaître? L'extinction de cette coutume n'est pas le fruit du hasard. La formation insiste sur l'importance de ne pas heurter la sensibilité du public avec ce genre de rituel. Même dans l'examen final, une question portait sur le sujet.

La première journée, nous avons suivi le CCSMAF (seuls les gouvernements peuvent pondre d'aussi beaux acronymes!) qui porte sur les armes à feu. Grâce à ce cours, je connais maintenant la différence entre un fusil et une carabine (je pourrais donc couvrir les faits divers...), en plus de posséder un vocabulaire à rendre jaloux un armurier. Au menu: tout ce qu'il faut savoir pour manipuler une arme sans danger, y compris son entreposage sécuritaire.

Le cours d'initiation à la chasse touche aux lois et règlements, et à la sécurité au sens large. Savez-vous que le plus grand danger, à la chasse, ce n'est ni l'ours noir ni le tir erratique du beau-frère? Dans la plupart des cas, c'est le chasseur qui s'inflige lui-même des blessures. Et la cause principale des accidents, c'est le mirador! Rien de mieux pour surprendre le gibier que de se percher dans les airs, mais cette technique comporte ses risques. Après quelques heures de guet, le chasseur sent la fatigue, s'endort sous le doux soleil d'automne et bang! Il tombe. D'où l'importance d'utiliser un harnais.

Les mousquets, arme d'une autre époque? Eh bien! Non. Les chasseurs utilisent encore des fusils dont le chargement se fait par la bouche du canon, comme dans le temps de la bataille des plaines d'Abraham! C'est aussi archaïque, à mes yeux, que des flèches à plumes! Mais les passionnés, tout comme les animaux, y trouvent leur compte, car le gouvernement accorde plus de jours de chasse aux premiers, tandis que les seconds ont le temps de déguerpir pendant que le chasseur recharge son arme et comprime la charge avec sa baguette.

La partie la plus intéressante du cours porte sur la connaissance de la faune, car le chasseur sachant chasser connaît le comportement des animaux. Période de rut, poids, grosseur des panaches, milieu de vie, les gros gibiers n'ont plus de secrets pour moi. Quelques mythes passent également à la moulinette. Exemple: que la grosseur des bois (ou le nombre de pointes) détermine l'âge d'un cervidé. Or, le fait qu'un orignal (ou un cerf ou un caribou) arbore un immense panache indique seulement qu'il se nourrit bien et qu'il est en excellente santé. Autrement dit, que sa viande est succulente!

Les deux formateurs, qui ne manquaient pas d'anecdotes croustillantes, ont réussi à nous transmettre le goût d'essayer cette activité patrimoniale en respectant les règles de l'art. Cependant, ce cours ne nous apprend pas les mille et une astuces du chasseur aguerri. Le seul moyen de les acquérir, c'est de partir dans le bois et d'observer les pros.

J'entends déjà l'appel de l'orignal!

Pour connaître l'horaire des formations du certificat de chasseur, consultez le site de la Fédération des chasseurs et pêcheurs du Québec: www.fqf.qc.ca