Il y a les voyages consacrés à l'aventure et au dépaysement. Et il y a les vacances. Des journées à se la couler douce, pour recharger ses batteries. C'est dans ce but que j'ai décidé de passer une semaine à l'Auberge du parc, à Paspébiac, dans la baie des Chaleurs, pour une cure de thalassothérapie. Journal d'une semaine à se faire traiter aux petits oignons.

Arrivée

Après 800 km au volant, j'arrive groggy à l'auberge. La propriétaire, madame Lemarquand, m'accueille sur le seuil de la porte. «Madame Morin, on vous attendait...»

Steve, le maître d'hôtel, me fait visiter la maison principale (ici, tout le monde se présente par son prénom, sauf la patronne.) Tout dans le vieux manoir construit au début du XIXe siècle inspire la détente: le solarium avec ses jetées épaisses, la salle de cinéma et ses divans moelleux, la piscine chauffée à l'eau de mer.

Ma chambre, située dans un bâtiment adjacent de type motel, est plus rudimentaire, mais le lit est confortable. C'est l'essentiel...

Jour 1

Lise m'accueille à l'étage de la maison pour me présenter mon programme de soins. Dans le salon de relaxation, les thérapeutes s'activent comme dans une ruche autour des clients en robe de chambre, dont le teint varie du vert olive (les nouvellement arrivés) au rose plus frais (ceux qui ont déjà quelques jours de soins à leur actif).

Lise me prévient que les curistes vivent souvent d'étranges situations pendant leur séjour. «Les émotions peuvent sortir sans prévenir. Il est aussi possible que vous confondiez votre dos et votre ventre. Le cerveau décroche tellement...»

Ma semaine de soins commence en force, avec le massage sous la pluie, le soin chouchou de la maison. Suivent l'enveloppement aux algues, le massage du dos, la presso-thérapie... Après trois heures à me faire bichonner, j'ai l'impression d'avoir été heurtée par un train.

Mon exploration du terrain de l'auberge, avec ses magnifiques jardins et la mer à un jet de pierre, devra attendre. J'ai tout juste l'énergie pour me présenter au souper...

Jour 2

Ici, les repas des curistes commencent tous de la même façon: avec une décoction d'algues (pleine de minéraux et d'oligo-éléments) qu'on s'envoie cul sec pour y goûter le moins possible! C'est bien le seul désagrément des moments passés dans la salle à manger. Contrairement à d'autres centres de santé, l'Auberge du parc ne soumet pas ses clients à un régime. «Les gens sont en vacances, après tout», lance madame Lemarquant. Pas de germinations insipides ou de portions faméliques.

La nourriture est saine et goûteuse: poissons, viandes rôties ou en sauce, soupes généreuses. Et les desserts... faits maison, avec ce petit goût de recette de grand-mère: tartes aux pommes, gâteau aux carottes, gâteau à la salade de fruits nappé d'une sauce au caramel on ne peut plus cochonne.

Après trois heures supplémentaires de bains d'algues, de réflexologie et de massage, je retraite illico à ma chambre. Pour meubler ma semaine, j'avais prévu siestes, lecture et photographie. Il semble qu'il y ait deux éléments de trop à la liste.

Jour 3

Lise m'avait prévenue: lors de la troisième journée, les curistes frappent toujours un mur. Le mien doit être un proche parent du mur de Berlin. J'en viens à me demander si je vais réussir à sortir un jour d'ici pour retourner affronter «la vraie vie».

Je suis dans un état près de la catatonie, surtout après être passée entre les mains de Rolande pour le drainage lymphatique. Cette femme peut vous endormir en deux temps trois mouvements avec ses mains. Je peine à rester debout jusqu'à 20h. Comme l'imageait (avec beaucoup de justesse) un copain ostéopathe, je me sens comme de la viande hachée...

Jour 4

La vie revient doucement en moi, au point où je réussis une poussée jusqu'à la mer. L'auberge est juchée en contrefort du site historique du Banc-de-Pêche-de-Paspébiac. Une langue de terre s'avance dans la mer, insensible aux marées. Au bout de cette bande insubmersible, on est cerné par l'eau sur trois côtés, si bien qu'on se sent comme à la proue d'un navire. Sur le chemin du retour, je fais un saut au musée. Les bâtiments retracent la vie des pêcheurs côtiers gaspésiens aux XVIIIe et XIXe siècles.

Je décide de m'offrir le luxe suprême: un massage complet qui s'ajoute à mes trois heures de soins matinaux. L'ortothérapeute qui a formé toutes les employées du centre de santé, monsieur Achermann, est de passage à l'Auberge. À 83 ans, ce Suisse-Allemand d'origine réussit à masser ses clients pendant plus de deux heures, d'une main plus ferme que bien des jeunesses. Et son humour n'a pas une ride...

Jour 5

Brigitte, la directrice et reine des abeilles du centre de soins, me rassure. Même si l'énergie revient, les noeuds ne partiront pas tous, même après une semaine à me faire masser et à me rouler dans les algues. Et l'énergie mettra aussi quelques jours à revenir. Même les mains vigoureuses d'Erma, qui m'a donné le troisième massage sous la pluie de mon séjour, n'y pourront rien. Aussi bien me détendre et savourer.

Jour 6

Le départ a sonné. Après mes trois dernières heures à me faire chouchouter, un dernier plongeon dans la piscine d'eau salée, un dernier morceau de tarte à la cuisine, je réintègre ma voiture. Je quitte l'Auberge du parc avec une conviction: celle de revenir, si possible, l'an prochain. En six jours, mon moral a remonté et mes épaules ont descendu. Ça, c'est des vraies vacances.

www.aubergeduparc.com 1-800-463-0890

Photo: Stéphanie Morin, La Presse

Une aire de repos, au milieu du jardin d'eau de l'Auberge du parc.