Pendant 30 ans, les Français Chantal et Marc Moreau n'ont jamais pris de vacances, trop occupés par leur travail. Puis un jour, juste avant la cinquantaine, ils ont décidé de tout plaquer et de partir à vélo. Neuf ans plus tard, ils pédalent toujours, ayant parcouru plus de 100 000 km dans le monde!

Leur dernier voyage, ces anciens gestionnaires d'un concessionnaire automobile viennent de le terminer au Québec, au Vermont et dans les Maritimes. Trois mois à sillonner les routes des Cantons-de-l'Est, de la Gaspésie, du Nouveau-Brunswick et de la Nouvelle-Écosse. Bilan: ils ont a-d-o-r-é. Avant, l'Australie figurait en tête de liste de ses destinations préférées mais, aujourd'hui, le Canada y est aussi, soutient le couple, rencontré dans un café montréalais juste avant qu'il rentre au bercail.

 

Les coups de coeur: l'accueil des gens, les très nombreuses pistes cyclables («Vous vous rendez compte comment vous êtes chanceux?») et... les Tim Hortons. «C'est pas cher et c'est très pratique», expliquent-ils au journaliste québécois. Le coup de gueule: la météo. En juillet, le temps a été exécrable. Sur une bécane, le manque de soleil frappe encore plus durement.

Le cyclotourisme, pour Chantal et Marc Moreau, n'est plus simplement un «trip». C'est un mode de vie. Chaque fois, Chantal, 56 ans, et Marc, 57 ans, retournent à la maison à reculons. «Notre corps s'habitue à pédaler huit à 10 heures par jour. Quand on s'arrête, on se sent malade comme jamais», raconte Marc. L'envie de repartir n'en est que plus forte.

Leurs trois enfants, majeurs et vaccinés, ne les comprennent plus. «Ils croyaient au départ qu'on avait simplement perdu la boule et que tout se replacerait au bout de quelques mois. Eh bien! non, on est encore fous!» disent-ils en rigolant.

Depuis 2000, ils ne lâchent plus le guidon. D'abord, ils ont fait un périple en France, en Espagne et au Maroc. Puis, l'Amérique latine pendant un an, de Cancún à Ushuaia. Ensuite, ils ont pédalé de la maison jusqu'en Inde. Et ainsi de suite, année après année. Leur voyage le plus long: 27 mois, de la France jusqu'en Chine, avec un crochet par l'Australie!

Des aventures, ils en ont vécu à la tonne, mais ce sont les mauvaises qui leur viennent le plus rapidement à la mémoire. Par exemple, des brigands ont tenté de voler leurs vélos, attachés à leur tente, au Mexique, mais n'ont réussi qu'à briser la tente. Résultat: le maire du coin, embarrassé, s'est vu forcer de les héberger dans la prison locale... «C'était très confortable. Il y avait même des douches.»

Au Moyen-Orient, ils ont connu l'enfer. En Iran, Chantal a dû se voiler pour faire du vélo! «J'étais constamment la cible de lanceurs de pierre, car les femmes n'ont pas le droit de pédaler là-bas», explique-t-elle. Au Pakistan, on leur a interdit le passage. «Les douaniers voulaient nous forcer à prendre une escorte militaire, à nos frais, bien entendu», se rappelle Marc. Ils ont finalement traversé ce pays dans un car bondé. Un périple infernal qui a duré 20 heures.

Le couple raconte ses mésaventures avec de grands sourires comme si, finalement, l'expérience en devenait plus intéressante. Malgré les dangers, il n'est plus question de mettre pied à terre. Pour ne pas interrompre son voyage, Chantal a même choisi de se faire opérer en Inde pour une péritonite, bien que son assureur lui ait offert de la rapatrier.

Comment font-ils pour survivre? Ils ne vont jamais à l'hôtel (ou presque). Ils demandent l'hospitalité chez les gens, montent leur tente et se font à souper à l'extérieur. «Cette façon de voyager nous permet de faire le maximum de rencontres. Au Canada, ç'a été très facile. Nos hôtes nous apportaient des chaises et nous invitaient à manger», disent-ils, plus que ravis.

Leur odyssée au Canada leur a donné le goût de voir le Québec en hiver. Ils seront donc de retour en février, pour donner des conférences (un des moyens de financer leurs aventures) en partenariat avec l'organisme Les aventuriers voyageurs (voyez le site www.lesaventuriersvoyageurs.com pour connaître les dates ou pour réserver une conférence). Pour la première fois en 10 ans, ils troqueront leurs vélos contre une paire de raquettes.