Pour fêter son centenaire, Tel-Aviv vient de se doter de son premier musée d'histoire, d'architecture et d'urbanisme, situé au coeur d'un des quartiers historiques de la plus grande agglomération juive du monde.

L'imposant bâtiment de trois étages, construit au début des années 1920, est davantage conçu comme une véritable «Maison de la ville», le nom qui lui a été donné en hébreu («Beit Hair»), que comme un musée traditionnel, explique sa conservatrice Ayelet Bitan Shlonsky.

«Même si l'histoire classique, symbolisée par la reconstitution du bureau de Meïr Dizengoff, le premier maire de Tel-Aviv, est présente, cette Maison de la ville est conçue comme un espace public de discussions destiné à alimenter des débats sur l'architecture, l'urbanisme et l'histoire de Tel-Aviv, et à renforcer les liens entre la ville et ses habitants», souligne-t-elle.

La pièce principale du musée est constituée d'une galerie ouverte qui permet aux visiteurs de suivre les discussions et tables rondes prévues à l'étage inférieur.

Exemple d'interaction entre le musée et la ville, l'exposition inauguratrice: des photographies de Tel-Aviv de 1900 à 1940, issues d'un fonds constitué grâce aux dons des habitants.

Quelque 20.000 clichés, qui seront numérisés et consultables dans le musée, ont été collectés par 300 volontaires auprès des résidents les plus âgés de Tel-Aviv, afin de reconstituer son histoire architecturale, parcellaire, explique Adi Yekoutieli, responsable du projet.

«Nous manquions d'archives photographiques et d'archives tout court sur des quartiers entiers de Tel-Aviv, notamment pour les premières décennies de la ville. L'histoire d'Israël a été si mouvementée que la constitution de fonds documentaires n'a jamais été une priorité», relève M. Yekoutieli.

«Grâce à ces photos de famille, le portrait architectural de Tel-Aviv se précise, nous découvrons des bâtiments disparus dont nous ne soupçonnions pas l'existence. C'est une forme de mémoire collective créée par les habitants eux-mêmes», témoigne-t-il.

La «Maison de la ville» est située sur une petite place abritant la maison, aujourd'hui transformée en musée, dans laquelle vécut le poète national israélien Haïm Nachman Bialik dans les années 1920.

La place Bialik et la rue du même nom adjacente s'inscrivent dans un des quartiers de Tel-Aviv marqués par le Bauhaus, courant architectural d'origine allemande, qui ont valu au centre-ville d'être inscrit au patrimoine mondial de l'UNESCO en 2003.

À l'origine, le bâtiment de la «Maison de la ville» était un hôtel, construit en 1924 par un homme d'affaires juif américain pour accueillir les nouveaux immigrants attirés par le boom économique de Tel-Aviv.

En 1926, l'immeuble, dont l'imposante façade, agrémentée d'un balcon, se prête aux cérémonies officielles, est racheté par la municipalité et devient le lieu public central de la première ville juive, sous le mandat britannique (1920-47). Il est utilisé comme mairie de Tel-Aviv jusqu'en 1965, lorsque la municipalité décide de s'installer sur l'actuelle place Yitzhak Rabin, la plus grande place de la ville.

Sa rénovation, qui a duré trois ans et a coûté 6 millions d'euros à la municipalité, vient de s'achever.

«L'immeuble était en très mauvais état. Sa rénovation était un projet qui traînait depuis longtemps. Il était évident que cela faisait partie des choses que nous devions faire pour le centenaire «, explique Jérémie Hoffmann, directeur du patrimoine de Tel-Aviv.

Tel-Aviv, la «colline du Printemps», fondée en 1909, est aujourd'hui la première métropole juive du monde, devant New York, avec ses 400.000 habitants et plus d'un million d'âmes au total en intégrant ses faubourgs.

Contrepoids à l'austère Jérusalem, elle se veut le symbole d'une «normalité» israélienne et a pris comme slogan «la Ville qui ne s'arrête jamais».