Presque 50 ans après la première diffusion de la série culte Le prisonnier à la télé britannique, Portmeirion reste pour beaucoup associé au personnage de «numéro 6», qui tentait par tous les moyens de s'évader du «village», avant d'être avalé par d'énormes bulles blanches.

Mais dans la vraie vie, Portmeirion n'est pas un endroit d'où l'on veut s'échapper. Au contraire. Comptant un hôtel de 55 chambres et 15 maisons-appartements, 4 restaurants, 1 spa et 25 km de sentiers, ce havre de paix situé à l'embouchure de la rivière Dwyryd, au pays de Galles, est l'un des lieux de villégiature les plus ensorcelants de Grande-Bretagne.

Certains l'ont comparé à une version décalée de Portofino en Italie. D'autres au parc Güell, de l'Espagnol Gaudí. Mais dans les faits, cette oeuvre en trois dimensions, créée par l'architecte gallois Clough Williams-Ellis (1883-1978), est unique et excentrique à sa façon.

Cette maison, que l'on croit immense, est en fait minuscule. Celle-ci n'a qu'une fenêtre, même si l'on en voit cinq. Vous pensiez tourner à gauche, mais vous voilà à droite. Mais où sommes-nous donc?

Entre illusions d'optique, effets en trompe-l'oeil, angles biscornus et bâtiments pastel ornés de fioritures rococo, tout ici contribue à subjuguer le regard et à confondre le visiteur. Il y a des statues antiques, des colonnes grecques, des chemins labyrinthiques, des palmiers et les seuls véhicules autorisés sont des voitures de golf. L'expérience est d'autant plus envoûtante que ce monde étrange est pris en sandwich entre une plage de sable blond et une forêt quasiment tropicale.

Retraite à Portmeirion

Dès sa création, en 1925, Portmeirion est destiné à n'être qu'un lieu de passage. Personne n'y habite à longueur d'année, mais on peut y venir pour un jour, une semaine ou un mois, selon ses besoins... et ses moyens.

Plusieurs célébrités y ont séjourné. George Harrison y a fêté son 50e anniversaire. Brian Epstein, premier gérant des Beatles, venait régulièrement y trouver refuge. L'écrivain Noel Coward y a puisé l'inspiration pour l'un de ses livres.

Aujourd'hui, l'endroit accueille en moyenne 225 000 personnes par an, incluant les visiteurs d'un jour. Des couples y célèbrent leur mariage. On y tourne des émissions de télé. Sans oublier les nombreux amateurs du Prisonnier, dont le pèlerinage s'achève généralement dans l'ancienne maison de «numéro 6», qui abrite désormais une boutique de souvenirs consacrée à la série. Depuis 1977, des dizaines de beaux fous envahissent d'ailleurs chaque année le village pour recréer, deux jours durant, les scènes les plus marquantes de la série.

Soucieux de renouveler leur clientèle, les responsables de Portmeirion ont aussi créé un festival de musique rock (Number Six) en 2010, où se sont produits des artistes comme Beck, Björk, New Order ou les Pet Shop Boys. L'initiative s'est avérée profitable. «Ça nous a fait connaître auprès d'une nouvelle génération», se réjouit Meurig Jones, l'un des porte-parole du village.

Bizarrement, Portmeirion n'est toujours pas classé au patrimoine britannique, ce qui le rend techniquement vulnérable aux altérations.

La chose peut paraître étonnante, considérant l'originalité de ce projet urbanistique sans équivalent. Mais selon Daffyd Iwan, chanteur gallois bien connu et membre du conseil d'administration de Portmeirion, ce n'est qu'une question de temps avant que l'endroit soit apprécié à sa juste valeur, et non comme un simple décor de série télé.

«Pendant plusieurs années, le monde de l'architecture voyait Williams-Ellis comme un excentrique et Portmeirion comme une sottise. Mais de plus en plus de gens commencent à voir que c'est une oeuvre de génie à sa façon. Les autorités reconnaîtront sûrement bientôt que les bâtiments doivent être classés.

«Après tout, Portmeirion est l'un des joyaux de la couronne galloise...»

http://www.portmeirion-village.com/

http://portmeiricon.com/

http://www.festivalnumber6.com/

Photo Thinkstock

Dans la vraie vie, Portmeirion n'est pas un endroit d'où l'on veut s'échapper. Au contraire.