Stockholm comme dans Millenium

Je l'avoue, je suis une groupie de Lisbeth Salander.

Tellement fan, que j'avais envie de voir son appartement, le dépanneur où elle achète sa pizza industrielle, son bureau à Milton Securities, le café où elle retrouve son comparse Mikael Blomkvist.

Folle?

Peut-être, mais je ne suis pas seule.

Plus de 12,5 millions d'exemplaires de la trilogie Millénium - dont Lisbeth est l'héroïne - ont été vendus dans le monde, dont 300 000 au Québec. Le film, une production suédoise pas du tout hollywoodienne qui vient de sortir, cartonne lui aussi. Et parmi les amateurs, des milliers ont déjà eu la même idée que moi: découvrir Stockholm, cette ville cosmopolite, riche et complexe où Salander et Blomkvist pourchassent les criminels.

«Millénium, vous aussi?» m'a-t-on dit à l'hôtel Story (où je venais d'arriver en constatant qu'il était juste à côté de la place Sturplan, montrée au début de Millénium Le Film, avec son écran de télé géant...)

Deux visiteurs français venus découvrir l'univers Millénium étaient passés juste avant moi.

«C'est génial comme façon de découvrir une ville!» m'a rassurée Laurence Fort, une touriste arrivant de Suisse avec fils et conjoint et ravie de suivre le tour Millénium organisé par le musée de Stockholm.

«Pour un ado, c'est amusant. Je fais ça pour pratiquement tous nos voyages. J'apporte des polars. Des Nestor Burma à Paris, le commissaire Montalbano en Italie...»

J'avoue que j'ai pris moi aussi cette habitude il y a plusieurs années. Avant Lisbeth, je suis partie sur les traces de Zola ou d'Arsène Lupin, à Paris. Et c'est à cause de Frison-Roche, quand j'étais pré-ado, que toute la famille s'est retrouvée à Chamonix.

Puis, plus tard, j'ai cherché les personnages de Jorge Amado à Salvador de Bahia, au Brésil, et John Fante m'a aidé à voir Los Angeles autrement.

À Stockholm, la visite de Södermalm, le quartier où se passe une bonne partie de l'action de Millénium, où habitait l'auteur, Stieg Larsson, tient aussi un peu du pèlerinage, du tourisme hommage. Puisque Larsson est mort et qu'il n'y aura pas d'autres livres, à part les trois déjà publiés, aller sur les lieux où il a vécu, où il a campé ses personnages, est une façon de prolonger les romans en leur donnant une nouvelle dimension urbaine, réelle.

Et chemin faisant, on découvre un Stockholm vrai, rempli tout autant de cafés écolos que de maisons du 18e siècle, de pistes de jogging ensoleillées et de terrasses perchées. Celui des gens qui l'habitent et lui donnent vie.

Faut-il avoir lu les livres pour apprécier Stockholm? Pas du tout. Le phénomène marche dans les deux sens. Millénium nous fait découvrir la ville. Et la ville, elle, nous donne envie de ne jamais la quitter en rapportant à la maison toutes les pages qui la racontent.

* * *

Quelques arrêts

1- Slussen

Cette place est la porte d'entrée de Södermalm, un ancien quartier populaire de Stockholm devenu bourgeois-bohème, où habitent les «bons» des romans de Stieg Larsson. C'est dans ce quartier aussi qu'habitait l'auteur et qu'étaient les bureaux de son magazine Expo. Sur la place Slussen sont les bureaux (fictifs) de Milton Securities et le (vrai) musée de la ville de Stockholm où l'on trouve une micro-exposition sur Millénium, qui présente des exemplaires des fausses unes de journaux utilisées dans les films. Rigolo. Sur Slussen, il y a aussi l'hôtel Hilton dont on parle dans le tome 3.

Pour les gourmands, on y trouve en outre des comptoirs à hareng frit, servi sur du pain avec marinades, dans la plus pure tradition suédoise. Excellente façon de faire le plein avant de commencer la marche - ou de la conclure. On mange sur une des tables à pique-nique, avec vue sur la ville. Sur la place, il y a une station City Bike où on peut déposer son vélo, pour ceux - et je le recommande - qui se déplacent avec ces «Bixi» stockholmois.

2- Angle Götgatan et HökensGata

C'est là, au-dessus des locaux de Greenpeace, que sont installés, selon le livre, les bureaux de Millénium. Une fois cela constaté, ce qui est surtout intéressant, c'est de marcher le long de Götgatan, rue commerciale bordée de restos, bars et petites boutiques sympas, comme l'échoppe du célèbre Tiogruppen, un regroupement de designers d'imprimés et une succursale de Ordning&Reda, une chaîne de papeterie moderne allumée. Un peu plus au sud, il y a aussi le dépanneur 7-Eleven où Lisbeth fait son épicerie, et achète les Billys Pan Pizza, fast-food version suédoise...

3- Le bar du Södra Teatern

Non loin de l'appartement de Lisbeth, le Södra Teatern comprend des lieux de spectacle mais aussi un bar aux très hauts plafonds, avec bougies partout allumées même en plein jour - une tradition en Scandinavie - et une terrasse avec une vue spectaculaire sur Stockholm. C'est là que Lisbeth prend une bière dans le tome 3. Je n'en dis pas plus. Idée: faire la même chose. Tant pis s'il y a un vent frisquet: en Scandinavie, les bars et restaurants fournissent les couvertures pour se réchauffer.

4- Le 9, rue Fiskargatan

Immeuble où Lisbeth achète un appartement de luxe sur deux étages, avec vue sur tout l'est de la ville. La veuve de l'auteur, Eva Gabrielsson, m'a raconté que cet appartement appartenait réellement à un riche homme d'affaires, Percy Barnevik, qui a dû le vendre en catastrophe au moment où Larsson écrivait ses romans. On remarque que rien d'ostentatoire n'annonce le faste des lieux. En Suède, la richesse se fait toujours très discrète.

5- 1, rue Bellmansgatan

C'est l'adresse officielle de Mikael Blomkvist, même si cela est incohérent avec le livre. Le 1 est en effet une adresse où l'on accède par une passerelle alors que dans le livre, la porte de l'appartement est au rez-de-chaussée. La veuve de l'auteur m'a expliqué que l'appartement que Larsson avait en tête est ailleurs dans cette jolie rue. Toute cette zone de Söder est par ailleurs adorable, avec ses rues pavées de roches rondes, ses escaliers, ses passerelles, ses escarpements. Certains immeubles datent du XVIIIe siècle. Parfois, avec ses dénivelés et ses rues étroites, Södermalm fait penser à Montmartre ou Naples.

6- Monteliusvägen

Ce chemin, qui longe la corniche nord de l'île de Södermalm, grimpé à 500 m au dessus de l'eau, offre des vues spectaculaires sur la ville. De là, on peut voir tout Stockholm, y compris l'hôtel Sheraton, l'hôtel de ville, le palais de justice, la cour d'appel et autres grands bâtiments mentionnés au cours des romans ou montrés dans les films. En outre, on aperçoit de là-haut les chemins bucoliques qui longent l'eau, autant du côté de Södermalm que du quartier Kungsholmen - plus au nord -, magnifiques pistes de jogging du personnage de Monica Figuerola (tome 3) et pourquoi pas les vôtres?

7- Mellkvist Kaffebar

Au 78, rue Hornsgatan, on retrouve le café Mellkvist, où Mikael Blomkvist aime bien se retrouver. Le café apparaît dans le tome 1 et joue un rôle crucial au début du tome 2. Dans la vraie vie, Stieg Larsson aimait bien y aller, surtout quand les bureaux d'Expo, son magazine, étaient situés juste au-dessus, dans le même immeuble. «Mais on y allait aussi car le café était très bon», m'a raconté Eva Gabrielsson, veuve de l'auteur. Et c'est encore vrai. Une jolie terrasse permet en outre de s'y prélasser, en grignotant des brioches typiquement suédoises, à la cannelle ou à la cardamome.

REPÈRES

> L'hôtel Story (www.storyhotels.com) n'est pas à Södermalm, mais Mikael Blomkvist aimerait sûrement ce nouvel établissement indépendant, aux prix raisonnables, central, où art contemporain et architecture durable sont aux rendez-vous.

> Le grand hôtel moderne de Södermalm s'appelle le Clarion (www.clarionstockholm.com). Il y a aussi un Hilton sur la place de Slussen (mentionné dans le tome 3 de Millénium) et un hôtel boutique appelé le Rival (www.rival.se) propriété d'un des membres de ABBA!

> Il existe des tours guidés Millénium organisés, en français, par le musée de la Ville. Info: www.stadsmuseum.stockholm.se Coup de coeur pour la guide Elisabeth Daude.

> Pour se rendre à Södermalm, soit on prend le métro arrêt principal Slussen, station que l'on voit plusieurs fois dans Millénium, le film soit on loue un vélo municipal. Info: www.citybikes.se Sur l'île, il y a plusieurs stations pour déposer un vélo et en reprendre un autre.

> Autres infos: www.stockholmtown.com