Des chemins sinueux, bordés de cyprès et des collines à perte de vue: un écrin idyllique pour Pienza, un petit village situé à une cinquantaine de kilomètres de Sienne.

Pienza n'est pas un bourg de Toscane comme les autres: il s'agit de la première «cité idéale» à avoir vu le jour au XVe siècle.

C'est à Pie II (1405-1464) que l'on doit ce petit bijou d'urbanisme. Élu pape en 1458, il décide de lancer un vaste chantier dans sa ville natale dès 1459, aidé par les plus grands techniciens de la Renaissance, et quelque 20 000 ouvriers selon les estimations.

Une ville dans laquelle les habitants pourraient vivre en paix les uns avec les autres, et en harmonie avec la nature, grâce à l'organisation rationnelle des espaces et des perspectives.

«Pienza est née d'un rêve, le rêve d'un grand humaniste», résume Vittorio Carnesecchi, conservateur du Palais Piccolomini, la résidence papale portant le nom de famille de Pie II. Ce pape hors normes était aussi un écrivain touche-à-tout, qui a rédigé en latin aussi bien un traité d'éducation des enfants qu'un roman érotique («L'histoire de deux amants»).

«Tout ce que vous voyez dans le centre de Pienza, ce palais (Piccolomini), les palais des cardinaux qui se font face, la cathédrale, le palais communal, le Palais de l'Évêché, tout a été construit en trois ans», s'émerveille M. Carnesecchi.

Une véritable prouesse pour la toute première «cité idéale» jamais réalisée. Un concept qui sera d'ailleurs souvent repris au fil des siècles par les plus grands urbanistes et architectes, par exemple Brasilia, capitale du Brésil conçue de toutes pièces par l'urbaniste Lucio Costa (avec l'architecte Oscar Niemeyer) entre 1957 et 1960.

À Pienza, rien ou presque n'a bougé depuis plus de 500 ans: du Palais Piccolomini à la promenade sur les murailles qui fait face au spectaculaire Val d'Orcia, en passant par la place principale et la cathédrale, un mélange entre gothique et style Renaissance. Et pour cause, Pie II, très prévoyant, avait menacé d'excommunication quiconque en modifierait l'aspect!

Un projet visionnaire salué par Manlio Sodi, professeur à l'Université pontificale salésienne de Rome: Pie II «a su avec ses architectes, par exemple Rossellino et tant d'autres, mettre en place une union formidable entre les hommes et le territoire».

«Ici, sur cette place, tout le monde se retrouve, parce que c'est le lieu où les murs, les monuments, les gens réussissent à mieux dialoguer entre eux», s'enthousiasme-t-il.

Une oeuvre admirée chaque année par des centaines de milliers de touristes qui tombent sous le charme de rues aux doux noms (rue de l'Amour, rue du Baiser...), à l'ombre des palais des cardinaux qui bordent placettes et rues, ou face à la vue spectaculaire sur la nature, omniprésente.

«La campagne est magnifique avec ses belles collines en pente douce. Nous sommes de Melbourne en Australie, et venir d'une grande ville dans un endroit comme celui-ci, très calme et paisible, est idyllique», confie Kay, une touriste australienne.

«Je ne sais si je pourrais vivre ici toute l'année, mais ça a l'air d'être un endroit idéal», ajoute-t-elle.

Et cela devrait encore le rester pour longtemps: il est interdit de construire dans un rayon de plusieurs kilomètres autour de Pienza. En outre le village, tout comme le paysage du Val d'Orcia, est classé au patrimoine de l'Humanité de l'UNESCO.