Comment passer d'une planète à l'autre sans se ruiner avec un vol spatial? En orbitant autour du Mývatn, lac du nord de l'Islande, où foisonnent des bizarreries géologiques à la limite du fantastique: terrains de jeux lunaires, bouilloires de boue et cratères colériques. Tour d'horizon de cet univers où l'intense activité volcanique a forgé de grands espaces.

Jour 1

9h

Vers le Hverfjall

Hameau aussi paisible que minuscule, Reykyahlid est notre quartier général, sur les bords du lac Mvatn. Premier objectif se profilant à l'horizon: le Hverfjall, intrigante colline en forme de cône inversé. Une agréable randonnée de 7 km à travers les champs, où nous sommes escortés par des moutons gloutons, nous mène à son pied. Là commence une montée à pic, où nos souliers s'enlisent dans un marais de cendres et de graviers.

Ce n'est qu'une fois en hauteur qu'on est frappé par la dimension lunaire de la bête, toute de gris vêtue: elle abrite un cratère béant, né d'une explosion volcanique il y a plus de 2500 ans. Sa rondeur parfaite, les stries de ses parois internes et la petite butte en son centre font qu'elle s'apparente à un gigantesque presse-agrumes. On pourrait y presser une orange de plus de 1 km de diamètre. Avec la vue panoramique sur le lac et ses environs, dès midi, la petite pause devient grandiose.

Midi

Au pays de l'«art noir»

La tête nous tourne encore lorsqu'on redescend du cercle de lune, par le flanc opposé. Subitement, le décor s'assombrit, et l'on pénètre dans un labyrinthe géant de pierres calcinées. Bienvenue à Dimmuborgir, les «châteaux noirs» ! Cette galerie de colonnes de lave noircie se dressant dans les airs a été sculptée naturellement, dans des formes alambiquées. À ne pas manquer: une immense arche aux allures de rocher Percé, en plein milieu du dédale. Drôle de planète brûlée!

15h

Les cratères se mettent au vert

Du gris, du noir... il est temps de se mettre au vert en mettant le cap sur Skutustadir, au sud du lac. Le relief de ce chapelet d'îles et de presqu'îles y est unique, ponctué d'une légion de trous verdoyants. Il s'agit de pseudo-cratères, formés par une explosion de vapeur lors du contact entre les coulées de lave et les eaux du lac. Résultat: un tapis vert pareil à une énorme éponge à trous. Heureux celui qui a les moyens de se payer un survol en avion pour admirer cette curiosité depuis les cieux. Mais il ne pourra côtoyer de près les adorables chevaux nains islandais, qui broutent sur les bords du lac...

18h

Sous le signe du poisson

Difficile d'échapper aux filets poissonneux de l'Islande, pays de pêcheurs. Les campeurs opteront pour une lamelle de saumon fumé, déposée sur une tranche de geysirbread (un pain cuit sous la terre, dans un fourneau géothermique naturel). Les occupants des chambres d'hôtel se tourneront vers l'excellente brandade de morue. Plus délicat à avaler: l'addition. En Islande, les prix s'envolent vite et nous ramènent sur terre.

Minuit

Une boréale, S.V.P.

En fonction de la période de l'année, les chasseurs d'aurores boréales peuvent espérer satisfaire leur appétit de couleurs, loin de toute pollution lumineuse. On peut faire des tentatives dès la mi-septembre, même si les chances d'en observer restent maigres avant l'hiver. Dès la fin de l'été, attention aux chutes du mercure, qui descend souvent dans le négatif. Mais imaginer le spectacle des reflets colorés dansant sur le lac donnera le courage de patienter dans le froid.

Jour 2

10h

Fumerolles en furie

Avez-vous aperçu Mars dans le ciel, durant la nuit? Il est temps de s'y rendre... à vélo. Au départ du lac, on se met en selle pour emprunter la route vers l'est, qui serpente entre des collines rougeoyantes (et propices à la randonnée hors piste). Pour se guider, il suffit de suivre les signaux de fumée, au loin. Une usine chimique? Non, un véritable magma à ciel ouvert. Au pied d'une montagne aride, le site de Hverir offre, au choix, des mares de boue en constante ébullition, des rigoles d'eau brûlante et des solfatares, fumerolles crachant des volutes de vapeurs sous pression. Le spectacle, qui s'étend sur un sol entremêlant bleu et orange pastel, recèle quelque chose de surnaturel...

Midi

Helviti, un lac d'enfer

Un peu hébété, on se remet à pédaler, vers le nord, pour croiser un monstre d'acier - en fait, une centrale géothermique. L'Islande a eu la lumineuse idée d'exploiter ces ressources énergétiques souterraines inépuisables. Elles couvrent près du quart des besoins en électricité et 80% du chauffage.

Dominant l'édifice, un pic montagneux réserve une belle surprise: un lac géant, Helviti, s'est niché en son sein, arborant une teinte variant avec la météo: tantôt vert émeraude, tantôt bleu azur. Helviti, quel nom inapproprié! En effet, il signifie «enfer», ce qui contraste avec cette vue paradisiaque.

14h

On craque pour le Krafla

Après avoir gambadé au gré de ces chefs-d'oeuvre naturels, rendons visite au chef d'orchestre de cette cacophonie géologique: l'incroyable Krafla! Ce volcan hyperactif a composé le visage de la région, à grand renfort d'éruptions - son dernier opus datant de 1984.

Dans un décor de désolation, de style «post-guerre nucléaire», on déambule sur les coulées de lave durcie, admirant les étendues noircies à perte de vue. De la fumée s'échappe encore par certaines fissures! On espère en revanche ne pas assister à la reprise de la symphonie volcanique de maître Krafla.

17h

Du bain et des jeux

En Islande, les touristes s'agglutinent au Lagon bleu, bassin thermal stratégiquement situé entre l'aéroport international et Reykjavik. Mais entre le Krafla et le lac Mvatn se trouve une solution de rechange idéale: le Jardbodin, copie conforme du Lagon bleu... la cohue en moins. Dans ces eaux insolites d'un bleu laiteux, opaques, chargées de silice, le randonneur las de vagabonder se prélasse et se demande, pour une dernière fois, sur quelle nouvelle planète il vient d'amerrir.

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