(Paris) Recueillement, compassion ou curiosité: fermée aux visiteurs, la cathédrale Notre-Dame en partie détruite va continuer d’attirer les touristes, même si l’incendie représente un coup dur dans la foulée du mouvement des «gilets jaunes» qui a mis à mal l’image de la France, selon des acteurs du secteur.

«Le point commun avec les attentats de 2015, c’est l’immense émotion que cela suscite. Mais la grande différence est que, si les attentats avaient fait fuir les étrangers, cet incendie va provoquer l’effet inverse», souligne Jean-François Rial, PDG de Voyageurs du monde.

La fréquentation touristique «ne va pas du tout souffrir de la catastrophe, au contraire, on a envie d’aller se recueillir, surtout que la cathédrale a été sauvée», souligne à l’AFP le responsable du groupe qui comprend les marques Terres d’aventure, Comptoir des voyages ou encore Allibert Trekking.

Jean-Pierre Mas, représentant des agences de voyages françaises, dit «ne pas être inquiet: il n’y aura pas d’effet négatif sur la fréquentation touristique, en tout cas beaucoup moins que le mouvement des “Gilets jaunes”. La France a tellement d’autres attraits».

M. Mas ajoute que «les gens vont venir se recueillir. Et si la cathédrale ne sera pas un sanctuaire parce qu’on va la reconstruire, il peut y avoir un effet compassion, solidarité voire même du tourisme mémoriel, mais ce sera à la marge».

Lundi soir, de nombreux touristes étrangers, mêlés aux Parisiens, ont passé des heures entre cris et pleurs à observer les flammes dévorer la cathédrale Notre-Dame de Paris, où quelque 12 millions de touristes se pressent chaque année.

«Il y a beaucoup de regrets et de tristesse chez les touristes chinois actuellement en voyage à Paris, qui n’avaient pas encore eu l’occasion de visiter la cathédrale», résume Pierre Shi, président de l’Association chinoise des agences de voyages en France (Acav).

Dans l’actualité «pour une mauvaise raison»

«Mais ils vont continuer à vouloir aller voir Notre-Dame, ils auront même plus envie qu’avant», selon lui.

En pleine visite d’un château dans le Val-de-Marne mardi matin avec un groupe de visiteurs chinois, Pierre Shi souligne qu’«ils se posent tous la même question: comment un monument aussi important, aussi symbolique pour l’Histoire de France, peut brûler aussi vite, dans sa quasi-intégralité, sans qu’on puisse l’arrêter? Ils sont très étonnés».

«Cet incendie n’est pas quelque chose de négatif pour la fréquentation touristique, mais par contre ça l’est pour l’image de la France, surtout après les “gilets jaunes”», estime-t-il.

«Le cumul d’événements qui n’ont rien à voir entre eux, cette addition de circonstances négatives, à force ce n’est pas très bon. Paris est encore une fois au cœur de l’actualité mondiale pour une mauvaise raison», renchérit Jean-Pierre Nadir, président du portail Easyvoyage.

Évoquant les grèves dans l’aérien et le ferroviaire au printemps 2018 puis les manifestations parfois violentes et destructrices des «gilets jaunes» sur les Champs Élysées depuis novembre, et le gigantesque incendie de Notre-Dame, il estime que «tout cela finit par donner l’image d’une situation en France qui n’est pas gérée, pas maîtrisée, un sentiment de laisser-aller», selon lui.

«Alors oui il peut y avoir un élan de solidarité, un mouvement collectif autour de Notre-Dame, mais ça ne durera pas longtemps. Il y aura forcément des répercussions sur le tourisme: quand ils ont le choix, les gens peuvent aller ailleurs en vacances, car ce qu’ils veulent c’est de la quiétude, du calme, et un voyage sûr», estime Jean-Pierre Nadir.

En 2018, l’Hexagone a connu une fréquentation touristique record malgré les grèves dans les transports et les manifestations des «Gilets jaunes», avec un total de 438,2 millions de nuitées dans les hébergements collectifs, selon des données de l’Insee.