Pendant que South Beach faisait la fête, Mid-Beach s'est développé. Sans trop faire de bruit. Le petit quartier qui s'articule autour de la 30e Rue, sur Collins Avenue, est devenu la nouvelle destination de Miami Beach. Aussi chic et chère qu'Ocean Avenue, plus au sud, mais plus tranquille. Et peut-être même un peu plus raffinée.

Un exemple : la magnifique Casa Claridge, dans un édifice des années 30 au style méditerranée, qui fait partie du réseau des hôtels historiques des États-Unis. L'endroit a beaucoup de style et une ambiance très romantique. 

C'est toutefois l'ouverture de l'hôtel Thompson, à la fin de l'année dernière, qui a marqué les esprits. Le Thompson est un parfait symbole de la renaissance de Mid-Beach. D'abord par son style : irréprochable, très Mid-century chic, sans être prétentieux, ce qui est si souvent le cas à Miami. L'hôtel a recyclé un petit bungalow qui se trouvait à l'origine de l'autre côté de l'avenue Collins. Il a été incorporé au jardin et son architecture a été mise en valeur. On a conservé le foyer original ainsi que les poutres de bois et leurs peintures espagnoles qui donnent un charme fou au pavillon. Il est devenu un bar à cocktails artisanaux. 

On est ici davantage dans la valorisation du patrimoine existant que dans le faux et le tape-à-l'oeil. Le meilleur coup du Thompson reste toutefois l'ouverture de son Seagrape, la brasserie floridienne de Michelle Bernstein, chef renommée de Miami. Elle aussi préfère l'authentique à l'exubérant. Le menu du Seagrape est simple, les plats servis sont sains et savoureux. Beaucoup de poissons, de fruits de mer, de verdure et de légumes racines. Moins d'ingrédients, plus de goût. 

Encore en développement 

C'est aussi à Mid-Beach, devant Indian Creek, que s'est installé le Freehand, version cool des auberges de jeunesse, qui attire les touristes plus branchés que fauchés, notamment grâce à son bar à cocktails, le Broken Shaker. 

Et c'est dans cette partie de la ville que l'ancien hôtel Saxony va rouvrir ses portes, plus tard cette année. L'hôtel des années 50 est la propriété du milliardaire argentin Alan Faena. Son aménagement a été confié au réalisateur australien Baz Luhrmann (Moulin Rouge, The Great Gatsby) et à sa femme costumière Catherine Martin. Le groupe Faena, qui construit aussi des tours de condos, a mis en vente l'appartement-terrasse de l'hôtel à la fin de l'année dernière. Prix demandé : 55 millions de dollars américains, ce qui fracassait le record du prix le plus élevé pour un appartement de Miami Beach. 

À son portefeuille immobilier dans Mid-Beach, Faena ajoutera aussi une salle de spectacle, entre la 33e et la 34e Rue. La transformation du quartier est loin d'être terminée. 

OÙ ? 

Mid-Beach n'est ni long ni large, pris entre la mer et Indian Creek. On peut calculer qu'on se trouve à Mid-Beach entre la 23e et la 41e Rue. Si vous avez les moyens, logez au Thompson (autour de 500 $ la nuit). Trois immeubles sont réunis dans cet hôtel, l'un des années 30, l'un des années 50, l'un des années 2000. Demandez une chambre dans le plus récent, car si on adore les immeubles recyclés, on doit vivre avec des constructions d'une autre époque. Dans la plus vieille partie, les portes des chambres sont très lourdes. Un détail, certes, mais qui peut déranger votre quiétude, car les chances que votre voisin fasse claquer sa porte au moment où vous venez de vous endormir sont assez élevées... Sinon, c'est un hôtel exceptionnel !

Cherchez le MiMo

On l'appelle MiMo, et ce nom lui va bien. Le mouvement Miami Moderniste est joyeux. Une fois que l'on sait le repérer dans les édifices, on s'amuse à reconnaître cette architecture typique des années 50 et 60, descendant de l'Art déco, mais assez différent pour qu'on sache intuitivement à qui on a affaire.

Plusieurs bâtiments bordant Collins Avenue, ce boulevard qui longe la mer, de South Beach jusqu'au nord de Miami, appartiennent clairement au MiMo. Ses deux représentants les plus raffinés se trouvent dans Mid-Beach : le Fontainebleau et l'Eden Roc. Les deux hôtels sont signés Morris Lapidus, célébrissime architecte des années 50 qui a conçu plusieurs bâtiments à Miami. 

Le MiMo est arrivé après la Deuxième Guerre mondiale. « C'est une coïncidence qui est assez intéressante », dit l'architecte Roberto Behar, professeur à l'Université de Miami. 

À cette époque, Miami Beach était une destination très populaire. Son climat tropical, la mer et la vie festive ont influencé son développement. « La géographie de chaque lieu suggère son architecture, qui se développe ensuite avec le mode de vie de l'endroit », précise le professeur Behar. Certains édifices de Miami Beach en sont la preuve bâtie. 

Sans être connaisseur, on reconnaît le MiMo. Il y a bien sûr les trous de fromage, indice le plus révélateur du courant. Mais aussi des cylindres, des courbes et des mouvements d'escaliers qui ne mentent pas ; des effets de papier plié et des coins de bâtiment exagérément longs. 

Les touristes qui ont vu tout ce qu'il y avait à voir en matière d'Art déco à South Beach, mais qui veulent poursuivre leur éducation architecturale ouvriront l'oeil. Le style MiMo, certainement par son côté charmeur, est très inclusif. Peu de gens résistent à son charme. C'est de l'architecture qui fait sourire. 

Version populaire 

L'architecture MiMo n'est pas réservée aux bâtiments luxueux. De nombreux motels de l'époque affichaient le style. Certains existent toujours. Beaucoup d'édifices MiMo se trouvent du côté ville, sur Biscayne Boulevard, entre la 50e et la 70e Avenue, au nord de Wynwood. Il n'en fallait pas plus pour créer un autre diminutif, le MiMo sur BiBo (pour Biscayne Boulevard). Ces férus d'architecture ont indéniablement l'esprit joyeux en Floride... 

On a d'ailleurs détourné la fête nationale mexicaine pour créer le Cinco de MiMo, un événement aux saveurs mexicaines (il y avait un concours de sosies de Frida Kahlo l'année dernière), qui se termine néanmoins avec le couronnement de Little Miss MiMo ! 

Dans ce secteur de Miami, le motel Vagabond (1953) vient d'être transformé en hôtel hip, ouvert il y a quelques mois. À moins de 200 $ la nuit, les amateurs d'architecture vintage ne trouveront pas de meilleur endroit pour loger à Miami. 

Cette partie de Biscayne Boulevard est l'un des quelques secteurs de Miami dont la transformation est des plus prometteuses. Des restaurants s'y installent. Michelle Bernstein a été l'une des pionnières du quartier, avec son Michy's, ouvert en 2006. À la fin de l'année, ce sera au tour de Panther Coffee de s'installer dans le quartier. 

Les jeunes entrepreneurs sont attirés dans ce coin, car les gens y vivent, ce qui en fait un quartier authentique. La valorisation du MiMo apporte un charme supplémentaire. 

La préservation des motels et autres bâtiments patrimoniaux est-elle particulièrement difficile à Miami, côté plage comme côté ville ? 

« C'est difficile, mais pas impossible, répond Roberto Behar. L'Art déco de South Beach a été très bien mis en valeur. Mais il ne faut pas oublier que Miami est une ville très jeune qui n'est pas toujours consciente de ses trésors. Et c'est une ville qui est encore en train de se développer. » 

« Il est aussi important de préserver que de construire, dit-il, mais ce qu'on construit doit avoir au moins autant de valeur que ce que l'on détruit. » 

OÙ VOIR LE MIMO ?

Une visite guidée en autobus des lieux MiMo, du côté plage comme du côté ville, est organisée chaque mois. Prochain départ, le 28 mars. Prix : 37 $ par personne (30 $US).

Photo Stéphanie Bérubé, La Presse

L'hôtel Eden Roc, signé Morris Lapidus.