Pour goûter au meilleur barbecue du monde, il faut compter une douzaine d'heures de cuisson, et quelques-unes de plus dans la file d'attente. Compte rendu.

On parle ici du barbecue du sud-ouest américain, cuit au feu de bois à très basse température, au contact de la fumée plutôt que de la flamme - une tradition culinaire qui fait l'objet d'un véritable culte aux États-Unis. Lorsqu'Aaron Franklin et sa femme Stacy ont commencé à vendre de la brisket (poitrine de boeuf) dans la capitale texane en 2009, il ne manquait pas de bonnes adresses dans les environs. Pourtant, des files sont rapidement apparues devant leur petite caravane de camping transformée en cantine.

Au printemps 2011, Franklin a accroché son enseigne à un vieux resto d'East Austin. Le calme allait être de courte durée. En juin, le magazine Bon Appétit lui décernait le titre de meilleur barbecue aux États-Unis et, deux ans plus tard, le classait parmi les 20 restos les plus importants au pays. La même année, Texas Monthly le plaçait au sommet de son top 50 des meilleurs barbecues du monde (le magazine, pas chauvin du tout, n'a retenu que des adresses texanes...). Depuis, c'est la folie.

L'endroit est ouvert le midi seulement. On sert à partir de 11h jusqu'à ce qu'il n'y ait plus de viande. La fin de semaine, les premiers clients arrivent avant l'heure du petit-déjeuner et la file s'étire sur quelques centaines de mètres.

Nous pensions nous en tirer à bon compte en nous pointant un matin de semaine, hors saison touristique, vers 10h30. Erreur.

Une centaine de personnes attendent déjà, et le bruit court qu'il n'y aura pas assez de côtes levées et de porc effiloché. Nous sommes tellement loin dans la file qu'on nous remet la fameuse affichette «Last Man/Woman Standing», inscription griffonnée chaque jour sur du papier de boucherie. Traduction? Après vous, le restaurant ne garantit rien. Vous pouvez toujours faire la queue, mais il ne restera peut-être plus de viande.

Les deux Californiennes derrière décident de tenter leur chance. Elles sont venues de San Francisco pour goûter aux barbecues de la région, Franklin est le dernier, et le clou, de leur liste. À vrai dire, le BBQ est le sujet numéro un dans la file. Les conversations se nouent spontanément, on échange des adresses in-con-tour-na-bles, la plupart dans des coins perdus du Sud profond.

Nous arrivons au comptoir vers 14h30, l'appétit aiguisé par les effluves de feu de bois de chêne, de marinade sèche et de sauces sucrées. Les employés, suants mais souriants, répondent aux questions en coupant la viande d'une main experte. Chaque client est accueilli comme s'il était le premier de la journée.

Si on nous avait dit qu'il nous faudrait attendre quatre heures pour manger chez Franklin, nous n'y serions jamais allés. Et nous aurions manqué quelque chose. La brisket est incroyablement fondante et la chair des côtes levées, juteuse à souhait. Même la dinde est tendre. Les viandes sont savoureuses, assaisonnées à point et le goût de fumée est tout en finesse. C'est par pure curiosité, et non par nécessité, qu'on essaie la fameuse sauce maison à l'expresso.

Si vous y allez, à moins d'être très matinal, ce qui vous permettra d'attendre sous la galerie couverte, prévoyez un couvre-chef et de la crème solaire. Certains arrivent avec chaise pliante et glacière, mais on peut acheter des boissons à prix raisonnable dans la queue.

Franklin Barbecue

512 653-1187900, East 11th Street

franklinbarbecue.com