Samedi, 22 h 30, à l'angle de U Street et de la 14e, en plein coeur de l'ancien Black Broadway de Washington. Sheldon A. Scott, le patron du Marvin, gère la file de fêtards qui s'allonge à vue d'oeil à l'extérieur. Des Noirs, des Blancs, de superbes femmes, des gens bien ordinaires. «C'est la folie comme ça tous les week-ends», dit-il.

Ce resto-bar est devenu l'automne dernier le lieu de rassemblement préféré des organisateurs politiques de Barack Obama. Et depuis l'accession du premier président afro-américain à la Maison-Blanche, la popularité de l'endroit n'a cessé de croître dans le grand public. C'est LA place où sortir à Washington.

 

Le Marvin, comme bien des établissements de la région, vit aujourd'hui à l'heure d'Obama. Le portrait géant du leader peint sur la façade du bâtiment ne laisse aucun doute sur la ferveur démocrate de ses proprios. Plusieurs commerces des environs arborent aussi le visage souriant du président sur des drapeaux ou des bannières, qui flottent doucement en cette nuit printanière.

Demandez à n'importe quel habitant de Washington et il vous répondra que la ville a bien changé depuis quelque temps. Des quartiers malfamés ont été retapés. Des restos inventifs ont ouvert leurs portes. De nouveaux musées sont venus bonifier une offre culturelle déjà impressionnante.

Ce renouveau ne peut être attribué à l'arrivée d'Obama, élu depuis à peine six mois. Mais le changement de garde politique semble avoir cristallisé le virage amorcé par la capitale il y a quelques années. Comme si, après huit ans d'administration Bush, Washington avait poussé un grand soupir de soulagement, défait sa cravate et était maintenant prêt à siroter un cocktail.

Les Washingtoniens ne sont pas les seuls à redécouvrir leur ville. Les autorités touristiques s'attendent à voir débarquer en masse les visiteurs qui avaient boudé la capitale américaine pendant les années conservatrices de Bush.

«Des Européens m'ont littéralement dit: nous voulons venir visiter Washington maintenant que l'administration a changé, lance Chris Geickel, de l'organisme Destination DC. J'ai reçu des appels de Français dès le lendemain de l'élection du président.»

Washington demeure malgré tout une ville gouvernementale et cela se sent. À l'exception de quelques secteurs consacrés au nightlife, les rues - immaculées - des quartiers centraux sont très tranquilles le soir, une fois les foules de touristes disparues. Certains commerces sont fermés le dimanche, voire le samedi.

D'autres quartiers périphériques restent dangereux et carrément déconseillés aux touristes. La majorité des visiteurs se contenteront de rester dans le centre de la ville, où ils pourront s'occuper pendant des jours à visiter les dizaines de monuments et de musées presque tous gratuits. Et la Maison-Blanche des Obama, bien sûr.

Sur les traces des Obama

L'obamania frappe fort à Washington. Pour combler les fanatiques de la nouvelle famille présidentielle américaine, l'organisme Destination DC propose un itinéraire qui permet de suivre les Obama pas à pas, ou presque. Voici quelques étapes du pèlerinage.

> Hôtel Hay-Adams

C'est là que les Obama ont résidé avant d'emménager à la Maison-Blanche. Michelle y a aussi fait une récente séance de photo très glamour pour Vogue.

> Madame Tussauds

Le musée vient de dévoiler deux nouvelles statues de cire à l'effigie du couple présidentiel.

> U Street

Ce quartier était autrefois considéré comme le «Black Broadway» de Washington. On y trouve entre autres le célèbre Ben's Chili Bowl, un resto fast-food où Barack Obama a mangé récemment.

> Marvin

Ce resto-bar, au coin de la 14e et de U Street, était le lieu de rassemblement de prédilection des partisans d'Obama pendant la campagne présidentielle. À noter: l'artiste visuel Shepard Fairey, concepteur du célèbre portrait bleu-blanc-rouge Hope d'Obama, a peint lui-même une murale sur la façade extérieure.

D'autres suggestions sur le site washington.org/visiting/browse-dc/sample-itineraries

Faites-le à vélo!

À court de temps pour tout voir pendant un court week-end à Washington? Pour rentabiliser au maximum son séjour, on peut faire une visite des principaux sites et monuments historiques à vélo. Bike and Roll, par exemple, offre des balades guidées au coût de 45 $US. Ces randonnées permettent d'en apprendre beaucoup sur les principales attractions - comme le Washington Monument, le mémorial du Vietnam et la Maison-Blanche - en trois petites heures.

bikeandroll.com/washingtondc

La scène culinaire en ébullition

«Je viens d'Europe et quand je suis arrivée ici il y a 10 ans, c'était toujours un gros steak dans l'assiette avec des légumes à côté. Ça fait juste deux ou trois ans que la scène culinaire a explosé.»

Marianna Alfa sait de quoi elle parle. La jeune femme dirige le restaurant Adour du célèbre chef Alain Ducasse, ouvert l'automne dernier à quelques pâtés de la Maison-Blanche. Les nouveaux restos se sont multipliés dans la capitale, souligne-t-elle, et ils attirent de plus en plus une clientèle réellement intéressée à la gastronomie. Pas seulement à frimer pendant un «power lunch» entre lobbyistes et politiciens.

Le chef Wolfgang Puck a ainsi inauguré The Source à deux pas du Capitole l'an dernier. Michael Mina a installé son Bourbon Steak à l'hôtel Intercontinental. Et le chef Jean-Georges Vongerichten, véritable institution new-yorkaise, s'apprêterait à ouvrir son premier restaurant washingtonien l'été prochain dans le nouvel hôtel W.

De l'avis général, c'est le chef espagnol José Andres qui a contribué à secouer la scène culinaire locale en ouvrant une série de restaurants au fil des dernières années. Il en compte maintenant une demi-douzaine dans la région de Washington, dont Jaleo, Minibar et Oyamel.

Et qu'en est-il de la crise économique? Les effets ne se font pas sentir pour l'instant dans les restos de Washington, ville protégée par son fort secteur public. Tous ceux que nous avons visités pendant notre séjour étaient bondés, le midi comme le soir. Mieux vaut réserver si l'on tient à avoir une table.

L'info au musée

Le Newseum ouvre ses portes à un moment tristement bien choisi, alors que les faillites de journaux se multiplient aux États-Unis.

Ce nouveau musée consacré au journalisme devrait constituer un incontournable pour quiconque s'intéresse de près ou de loin à l'information. Il présente sur six étages des expositions éducatives et parfois touchantes sur le monde des médias et le travail de ses artisans au fil des siècles.

On visite le Newseum de haut en bas, en commençant par un petit tour sur la terrasse du sixième étage. La vue y est imprenable sur le Capitole, situé à quelque centaines de mètres.

Parmi les points forts, la News History Gallery, une collection de plus de 30 000 journaux, retrace 500 ans d'actualité. On y revisite l'histoire récente de l'humanité à travers ses événements marquants: le tremblement de terre meurtrier du Guatemala de 1541, Hiroshima, la mort de Marilyn, la tuerie de Virginia Tech en 2007, pour ne nommer que ceux-là.

Les attentats 11 septembre 2001 occupent aussi une place importante. Le musée présente un bref documentaire sur la façon dont les journalistes ont vécu - puis raconté - cette journée historique. Bien des visiteurs avaient les yeux humides à la fin de la présentation, très réussie.

Le Newseum, bâti au coût de 450 millions US et inauguré il y a un an, impressionne autant par la richesse de son contenu que par son architecture spectaculaire. Il faut compter un minimum de deux heures pour bien profiter de sa visite.

www.newseum.org