Dans les quartiers touristiques de Bangkok, les vacanciers qui déambulent vendredi entre les temples et les kiosques de souvenirs font peu de cas du coup d'État de la veille et des mises en garde des gouvernements étrangers.

Alors qu'une junte militaire a pris le pouvoir jeudi et que des soldats patrouillent près de lieux stratégiques, le coeur historique de la capitale thaïlandaise fourmille toujours de visiteurs étrangers flânant au soleil.

Nombre d'entre eux expliquent ne pas vraiment s'inquiéter de ce putsch intervenu après sept mois de manifestations et d'une crise politique meurtrière qui a déjà porté un coup au tourisme, secteur clé de l'économie du «Pays du sourire».

«Nous avons vu les bars fermer. C'était bizarre de voir tout fermer, parce que ça ne ferme jamais» en temps normal, commente Maayan Sher, étudiante israélienne de 22 ans, faisant référence au couvre-feu imposé depuis jeudi entre 22H et 05H00.

«Je ne me suis pas du tout sentie menacée. Nous avons compris que nous ne sommes pas une cible», poursuit-elle en se promenant près du Palais royal.

Mais ses amis envisagent de raccourcir leur séjour. «Ce n'est pas parce que nous avons peur, mais parce que tout ferme, et nous voulons faire la fête», explique Taluri Dvash, 26 ans.

Le jeune homme s'est rendu sur l'un des sites de manifestations après le couvre-feu jeudi soir, mais s'est trouvé bien déçu devant le calme des manifestants en train de plier bagage et les kiosques de nourriture faisant penser «à un marché».

La Thaïlande est secouée depuis sept mois par un mouvement de rue réclamant la chute du gouvernement finalement renversé jeudi par l'armée, une crise qui a fait 28 morts et des centaines de blessés.

Lors de ce nouveau coup d'État, dans un pays qui en a désormais connu 19, réussis ou non, en 80 ans, l'armée a interdit d'antenne nombre de chaînes de télévision, suspendu partiellement la Constitution et interdit les rassemblements politiques de plus de cinq personnes, s'attirant les foudres de la communauté internationale.

«Se coucher plus tôt»

Les aéroports sont toujours ouverts, et les passagers internationaux font partie des quelques exemptés du couvre-feu, pour peu de pouvoir prouver l'heure de leur vol.

De nombreux pays ont appelé leurs citoyens à être très prudents lors de leur visite en Thaïlande ou à éviter le pays, notamment la Chine, la Grande-Bretagne ou les États-Unis dont de très nombreux ressortissants se rendent dans le pays chaque année.

Les États-Unis ont recommandé aux Américains de «réexaminer tout voyage non essentiel», tandis que Londres mettait en garde contre un «risque de violente réaction» au coup d'État.

Pékin a appelé les Chinois à «prendre conscience du danger» et à «prendre des mesures de sécurité plus importantes».

Le tourisme a déjà subi l'impact des sept mois de violences politiques, tout comme l'économie dans son ensemble qui s'est contractée au premier trimestre avec un PIB en repli de 0,6% par rapport à la même période de 2013, une contraction inédite depuis les inondations historiques de 2011.

Les arrivées de touristes étrangers sur les quatre premiers mois de 2014 ont diminué de 5% par rapport à la même période de l'année précédente, à 8,6 millions, selon les chiffres officiels.

Les visiteurs d'Asie sont en particulier concernés par cette baisse, notamment les Chinois avec moins 18%, à 1,3 million, et les Japonais à moins 20%.

Lors d'une réunion jeudi, une porte-parole du Département d'État américain, interrogée sur ce que devaient faire les Américains ayant programmé lunes de miel ou enterrements de vie de garçon en Thaïlande, a simplement conseillé de suivre les recommandations du site internet.

Mais Robin et Brandon, en voyage de noces, ne sont pas inquiets. «Les gens ici gèrent les choses avec calme, alors s'ils ne sont pas inquiets, je ne suis pas inquiète», assure Robin en déambulant autour de stands de souvenirs.

Les jeunes mariés arrivés à Bangkok mercredi ont trouvé une solution pour faire face au couvre-feu: simplement «se coucher plus tôt»...