Lieu de conflit pendant des années, les collines verdoyantes qui s'étendent à perte de vue à l'extrême nord de l'Irak, sont devenues un parc naturel, attirant touristes et chercheurs.

Les autorités de la province autonome du Kurdistan irakien ont créé il y a un an leur première réserve naturelle, adossée à la frontière avec l'Iran, mais il leur reste fort à faire.

Car ces vallées boisées, entourées de montagnes aux cimes enneigées, ont été fortement marquées par la guerre Iran-Irak dans les années 1980, et les autorités procèdent toujours à un patient travail de déminage pour ouvrir ces contrées inconnues aux visiteurs.

Outre le danger que représentent les mines, la région a récemment été visée par l'aviation turque qui tentait de frapper des éléments du PKK, des rebelles kurdes de Turquie réfugiés en Irak, et par l'Iran qui bombardait à l'artillerie les bases arrières de ses propres rebelles kurdes.

Ces bombardements ont cessé et les champs de mines sont maintenant circonscrits, en attendant que des organisations non gouvernementales achèvent le travail de déminage.

Les 1100 kilomètres carrés de réserve naturelle, baptisée «parc national d'Halgourd Sakran», abritent les montagnes les plus hautes du pays, aux confins du nord de l'Irak. La route qui y mène longe sommets et cascades avant de déboucher sur des lacs et des forêts.

Les autorités ont créé le parc pour encourager le tourisme, mais espèrent que sa réalisation aidera aussi à sensibiliser les habitants aux questions de protection de l'environnement.

«L'objectif de cette réserve naturelle est de protéger l'environnement, et d'encourager un retour à la civilisation et à notre culture ancestrale», explique Abdoulwahid Kuwani, directeur de l'autorité locale responsable pour le parc et maire de Choman, principale ville de la région.

«Nous voulons que ce parc devienne un centre de tourisme pour les habitants du Kurdistan, d'Irak, et du Moyen-Orient, qu'ils puissent venir voir les animaux sauvages», précise-t-il.

L'abattage d'arbres et la chasse ont été interdits dans la réserve qui abrite cerfs, ours, et tigres. Les autorités locales cherchent à encourager les habitants du parc, qui vivent de l'élevage de moutons, à entreprendre des travaux d'artisanat et à vendre des produits locaux aux touristes.

Plus de 2,2 millions de visiteurs, pour la plupart irakiens, ont visité l'an dernier le Kurdistan, comparé à 1,2 million les six premiers mois de cette année.

La région autonome du Kurdistan, qui profite d'un environnement sécuritaire bien meilleur que le reste du pays, affiche un fort taux d'expansion économique.

Elle possède des réserves de pétrole --que lui dispute le gouvernement fédéral--, son propre parlement et son propre régime pour la délivrance de visas pour les visiteurs étrangers.

La réserve naturelle doit jouer un rôle important dans le développement touristique de la région, mais il reste du chemin à faire pour convaincre tous les habitants de la nécessité de protéger leur patrimoine.

Deux tigres sont récemment morts dans le parc, dont un empoisonné par des habitants qui avaient déposé de la viande mélangée à du poison pour tuer des loups responsables d'attaques contre leur cheptel.

Selon Nadir Rosti, porte-parole du département du tourisme de la région, les autorités envisagent maintenant d'agrandir la réserve et de créer de nouveaux parcs aux alentours.

Enfin, le projet est également un projet scientifique, qui vise à aider les universités irakiennes et kurdes «à effectuer des recherches sur l'environnement et les différents animaux qu'on trouve ici», ajoute le maire.

«C'est un endroit incroyable», explique Gunther Loiskandl, un expert autrichien de la faune. «La région est riche en animaux et en variétés de plantes -- elle a tout ce qu'on peut espérer trouver dans une réserve naturelle».

«Nous devons travailler pour les générations à venir», ajoute l'expert, car «il va falloir du temps pour reconstituer l'environnement et la faune».