Les plus grands noms de l'hôtellerie de luxe se précipitent à Shanghai, qui accueillera l'an prochain les dizaines de millions de visiteurs de l'Exposition universelle, en dépit d'une conjoncture internationale encore morose.

Le Peninsula, seul nouveau bâtiment construit en 60 ans sur l'emblématique boulevard de la capitale financière chinoise, le Bund, vient d'ouvrir, tout à fait dans l'esprit de l'âge d'or de la métropole, avec sa Rolls-Royce Phantom 1934 conduite par un chauffeur et une piscine que n'aurait pas renié Gatsby le magnifique.

 

Le propriétaire du prestigieux Peninsula, Hong Kong and Shanghai Hotels Limited, fait son retour dans le «Paris de l'Orient» après une absence de 60 ans, et va devoir affronter une redoutable concurrence, à six mois de l'ouverture de l'Exposition universelle.

Ritz Carlton, de son côté, est en train d'édifier un deuxième hôtel, Hyatt a déjà trois établissements, et Shangri-La va passer de un à quatre hôtels dans la métropole de près de 19 millions d'habitants.

Conrad, Jumeirah, Waldorf Astoria et le légendaire Peace Hotel - géré par le groupe Fairmont - sont tous dans la course au riche client, avec des établissements récemment terminés ou fraîchement rénovés à coups de millions de dollars.

«Est-ce de la folie?» demande Graham Kiy, directeur général du complexe de deux hôtels du Zendai conçu par l'architecte japonais Arata Isozaki.

L'hôtel, membre des Leading Hotels of the World, qui regroupe des établissements de luxe dans le monde entier selon des critères très sélectifs, doit ouvrir en septembre 2010.

Crise économique

«Le secteur du voyage de luxe lui-même a toujours été moins touché par les crises économiques», dit M. Kiy; il est «un peu en recul, mais pas aussi déprimé que les secteurs des trois ou quatre-étoiles».

Le taux d'occupation moyen des cinq-étoiles (équivalent d'un quatre-étoiles en France) est de 50-55%, et même de 60-65% dans les hôtels les mieux situés à Shanghai.

L'ouverture de nouveaux hôtels de luxe, qui vont ajouter près de 3900 chambres cinq étoiles, coïncide avec l'Exposition universelle que Shanghai accueillera à partir de mai prochain pendant six mois, et lors de laquelle 70 millions de visiteurs sont attendus, la plupart chinois.

«Nous sommes persuadés que l'Expo va être bénéfique à Shanghai en termes de visiteurs et de couverture médiatique, mais 2011 va être difficile parce qu'il y aura une surcapacité dans l'hôtellerie de luxe», dit M. Kiy.

La Chine a fait face à la crise économique mondiale mieux qu'aucun autre marché du voyage, dit Philip Ho, vice-président Asie-Pacifique de Leading Hotels of the World, dont le dernier établissement, le PuLi Hotel and Spa, vient d'ouvrir à Shanghai.

Selon des études menées par son groupe auprès d'un nombre non précisé de personnes, seulement 15% des sondés en Chine et à Hong Kong en avril dernier ont annoncé leur intention de renoncer à des projets de voyage en raison de la crise au cours des 12 mois suivants, comparativement à 40% dans le monde.

Quatre-vingts pour cent des personnes interrogées ont indiqué qu'elles n'envisageaient pas de passer des nuits dans des hôtels moins luxueux.

«Le monde est entré en récession», dit M. Ho, «mais pas la Chine», où plus de 364 000 personnes disposent de liquidités supérieures à 1 million de dollars, selon la banque Merrill Lynch.

Un chiffre très encourageant pour le secteur de l'hôtellerie de luxe.

«La Chine est un immense marché et il y a de la place pour tout et pour tout le monde», dit le directeur général du Peninsula, Paul Tchen. «Avec notre arrivée, nous offrons une nouvelle option, dit-il. Le choix en lui-même est un luxe.»