Les touristes qui arpentaient lundi Bangkok s'inquiétaient pour leur sécurité, alors que de nombreux gouvernements étrangers, dont le Canada, ont conseillé à leurs ressortissants d'éviter la capitale thaïlandaise en proie à de violentes manifestations.

La ville aurait dû résonner lundi des cris de joie de milliers d'enfants s'aspergeant au pistolet à eau sous la chaleur tropicale, comme il est de tradition lors de Songkran, une des fêtes les plus gaies du «pays des sourires». A la place, Bangkok s'est réveillée au son de puissantes rafales d'armes automatiques, avec des blindés dans les rues et sous les colonnes de fumée noire émises par des autobus incendiés et des cocktails molotov, alors que des centaines de manifestants se heurtaient à l'armée.

Les violences étaient circonscrites autour du carrefour Din Daeng et de quelques autres quartiers, tandis que le calme continuait à régner dans le reste de la ville, soumise à l'état d'urgence depuis la veille.

Mais, de nombreux commerces et grands magasins ont choisi de fermer, d'autres imposaient des fouilles de bagages à main à l'entrée, et les rares marchands de pistolets à eau étaient bien en peine de trouver des clients.

«Je suis déçu. Où est l'ambiance? Il faudra attendre l'an prochain», se désolait Matthew Tan, homme d'affaires de Singapour qui séjourne à Bangkok chaque année pour Songkran.

De nombreux gouvernements étrangers ont conseillé à leurs ressortissants d'éviter Bangkok, ou de rester dans leurs hôtels. Au Grand Hyatt, la réception a indiqué que quelques clients avaient décidé de partir en raison de la situation, mais que la plupart étaient juste stupéfaits de la tournure des événements.

«On ne sait pas jusqu'où ça peut aller. C'est effrayant. J'ai deux petits enfants avec moi», se plaignait une touriste philippine de 43 ans, Sharon Pangilinan, qui repartait pour Manille dans la soirée.

«On aimerait aller au Grand palais mais je ne sais pas si c'est possible. Nous allons juste marcher et voir quels endroits nous pouvons visiter», racontait Marion, une touriste parisienne de 23 ans.

«Nous n'avons pas peur. Nous savons que les combats n'ont rien à voir avec les touristes», se rassurait-elle.

Les violences à Bangkok constituent une catastrophe de plus pour le secteur touristique thaïlandais, un des moteurs de l'économie du pays, qui emploie 1,2 million de personnes et se remet difficilement d'une autre série de turbulences politiques fin 2008.

En novembre, les deux aéroports de Bangkok, occupés cette fois par des manifestants royalistes, étaient restés fermés pendant huit jours, coupant la Thaïlande du reste du monde.

«Les licenciements sont inévitables. Nous pourrions perdre jusqu'à 200 000 emplois cette année si la situation n'est pas résolue», a averti Apichart Sankary, président de l'Association thaïlandaise des agents de voyage.