Se loger dans un «Love hôtel», la petite auberge d'une favela «pacifiée» ou louer un appartement sont les formules en vogue à Rio pour fuir les prix exorbitants des hôtels pendant le Mondial de soccer.

Porte d'entrée du tourisme au Brésil avec sa baie légendaire, Rio de Janeiro recevra du 12 juin au 13 juillet 400 000 des 600 000 touristes étrangers attendus dans tout le pays pour la Coupe du monde de football, estime l'organisme officiel du tourisme brésilien, Embratur.

Rio est déjà en temps normal la troisième ville la plus chère du monde pour les hôtels, devant New York et Paris, selon Embratur, avec un prix moyen de 247 $ la nuit. Et pendant le Mondial, les jours de matchs, le tarif moyen va grimper à 484 $ et jusqu'à 693 $ à Copacabana, son quartier touristique, selon une étude de TripAdvisor publiée en mars.

Mais Rio, c'est Rio, avec son Christ Rédempteur, son Pain de sucre, ses plages. Et pendant le Mondial, elle sera celle des 12 villes hôtes «qui aura la plus forte occupation hôtelière du pays, de plus de 90% et de 100% pour la finale au Maracana», assure à l'AFP, Alfredo Lopes, président de l'Association des hôtels.

«Chambre Sadomaso»

Des 4 milliards investis dans l'infrastructure hôtelière du pays, 1,5 milliard l'ont été à Rio pour la construction de 250 nouveaux hôtels d'ici à 2016.

«En 2010, on avait 29 000 chambres et il y en aura 6800 nouvelles pour le Mondial. En 2016 pour les jeux Olympiques, il y en aura 13 000 supplémentaires, soit 50 000 au total», explique M.Lopes.

Pour augmenter l'offre dès cette année, 12 des 60 «Love hôtels» de la ville -dont les chambres se louent à l'heure pour des rendez-vous galants- ont été mis à contribution et leurs chambres «reconverties».

«Les miroirs au plafond ont été retirés et les lits ronds changés pour des traditionnels», explique-t-il.

«Nos 87 chambres sont déjà réservées et même nos suites thématiques -la Sadomasochiste, l'Hollywoodienne, la Versailles et la Japonaise- qui n'ont pas été transformées, car très demandées», confie Antonio Cerqueira, propriétaire du Villa Reggia.

À midi ce jour-là, seules la «Sadomaso» aux murs noirs, lit rond en cuir clouté, et plafond très haut d'où pendent des chaînes et une «cage à supplices» ainsi que «l'Hollywoodienne», aux murs couverts de photos d'acteurs, sont libres et ouvertes à l'AFP.

«1000 chambres seront disponibles au total pour le Mondial dans ce type d'établissements, moins chères que dans les hôtels traditionnels (de 100 à 375 $» (pour une nuit entière, NDLR), souligne M. Cerqueira, également vice-président de l'Association des Love hôtels.

- Favelas pour les routards

En vue du Mondial et des JO, de petites auberges sont nées dans les premières favelas «pacifiées» en 2008 qui surplombent Copacabana, les plus recherchées par les jeunes routards et les supporteurs les moins argentés. Si la vue y est imprenable, l'accès n'est pas toujours facile. Il faut emprunter plusieurs ruelles escarpées, puis des escaliers...

Cristiane de Oliveira, 42 ans, a ouvert en 2010 la «Favela Inn» à Chapéu Mangueira. Elle dispose de trois chambres avec lits superposés, salle de bain et Wi-Fi à 20 $ par jour et par personne en basse saison et à 25 pendant la haute.

«Je ne prends pas très cher car je veux du monde toute l'année, mais pendant la Coupe du Monde ce sera 45 $», dit-elle à l'AFP.

Après une «très bonne année 2013», elle déplore «une baisse de touristes depuis novembre quand les trafiquants de drogue ont commencé à attaquer les Unités de police pacificatrice (UPP) mises en place pour sécuriser ces quartiers pauvres.

«Les médias ne reflètent qu'une image violente des favelas et ne montrent jamais le bon côté: la samba, la joie, l'entraide. Ca m'attriste».

- Appartement: 45 jours, 25 000 $ US

Pablo Gomes, 35 ans, a ouvert il y a un an le «Green culture hostel»  qui dispose de 25 places. «Pendant le Mondial ce sera entre 54 et 63 $ par jour, le même tarif que pendant le carnaval», dit-il.

«Ici, tout le monde se connaît. Il y a beaucoup de bons petits restaurants et bars ; c'est super sympa et on est en pleine nature», affirme une cliente, Myriam Glare, Suédoise de 25 ans, qui se sent «en toute sécurité».

De nombreux Cariocas profiteront également de la Coupe pour louer leur appartement.

«L'offre a augmenté de 900% en un an à Rio, à 9000 appartements disponibles pour le Mondial», affirme à l'AFP Fabio Nahon, qui gère la location d'une trentaine d'appartements.

«La moyenne est de 112 à 135 $ par personne, contre 538 dans un hôtel 4 étoiles», assure M. Nahon, qui empochera 25 000 $ pour louer son appartement pendant 45 jours à Copacabana, à huit supporteurs argentins.

Le gouvernement a voulu faire du Mondial un levier de développement dans les 12 villes hôtes, toutes à vocation touristique. Le ministère du Tourisme a assuré qu'il surveillera le prix des hôtels. «Sinon, nous tuons la poule aux oeufs d'or pour les prochaines décennies», avait averti l'an dernier Flavio Dino, président d'Embratur.