Désertée l'année dernière par les vacanciers étrangers qui craignaient une guerre civile, la plage de rêve de Tofo grouille à nouveau de monde alors que s'achève la haute saison estivale. Au soulagement des professionnels du tourisme du Mozambique, qui préfèrent cependant ne pas crier victoire trop tôt.

«Les touristes reviennent, même s'il y a moins de gens qu'avant», constate Jorge José Oliveira, un vendeur d'artisanat posté depuis 2008 à l'entrée du marché de cette petite station balnéaire, haut lieu de la plongée sous-marine situé à 500 kilomètres au nord de la capitale Maputo.

«L'année dernière, ils ne sont pas venus à cause de la guerre dans le centre du pays. Mais maintenant c'est résolu», veut-il se convaincre.

La guerre dont il parle, c'est l'insurrection déclenchée en avril 2013 par la Renamo, l'ancienne rébellion armée pendant la guerre civile de 1976-92 qui avait décidé de reprendre les armes après être devenue la principale formation de l'opposition.

Même si les combats sont restés limités, l'instabilité a eu vite fait de décourager les visiteurs étrangers jusqu'à la signature d'un cessez-le-feu en août.

«Cela a affecté l'image du pays entier», constate M. Oliveira, même si «nous étions loin des lieux des affrontements» dans la région de Tofo.

«En tout cas, l'esprit est définitivement meilleur que l'année dernière», ajoute Carlos Neves, le chef du Tofo Mar, l'unique hôtel du coin qui affichait complet ces derniers jours.

À Maputo, l'Institut national du tourisme (Inatur) confirme ce regain d'optimisme, même si les chiffres officiels ne seront pas connus avant juin, faute de système informatisé.

Le tourisme au Mozambique a connu un bond phénoménal, passant de 5000 touristes en 2000 à 700 000 en 2005, puis à 1,4 million en 2012. Le souvenir de la guerre civile s'éloignant, le public a découvert le Mozambique, ses grands espaces et ses plages idylliques, dont le potentiel reste encore largement inexploité par les grands tour-opérateurs.

Une destination chère

Mais le nombre de touristes stagne désormais, laissant transparaître des difficultés plus structurelles, comme le soulignent à Tofo des propriétaires de lodges.

«Il y a moins de Sud-Africains qu'avant», pointe Laura Devoti, la propriétaire italienne de Casa na Praia, une maison d'hôte située en bord de mer. «Regardez sur la plage, il n'y a que dix tentes (caractéristiques des Sud-Africains, qui y déploient leurs attirails de vacanciers. Avant on en voyait au moins une quarantaine».

En 2013, il y a eu 100 000 touristes sud-africains en moins qu'en 2012. Et ils sont loin d'être tous revenus en 2014. Or, l'Afrique du Sud, voisine et relativement riche, est le premier pays d'origine des visiteurs au Mozambique, et de loin.

À Casa Barry, le plus ancien lodge de la région qui affichait complet ces dernières années, le taux d'occupation n'a pas dépassé 60% pendant la haute saison du 15 décembre au 15 janvier. «Nos visiteurs sud-africains se plaignent du taux de change, mais aussi des contrôles routiers incessants», les policiers mozambicains ayant la fâcheuse réputation de racketter les automobilistes étrangers, explique Graeme Warrick, l'un des propriétaires, lui-même sud-africain.

De manière générale, le Mozambique est une destination certes exotique, mais coûteuse.

«Entre la peur d'Ebola (en fait totalement absent du pays ndlr), le fait que certaines ambassades mettent en garde les voyageurs sur le Mozambique, et l'augmentation excessive des prix des visas, la saison est très calme», soupire Joan Bestler, qui a une entreprise de plongée.

Elle se souvient des années glorieuses de Tofo, qui en ont fait un spot incontournable pour les aficionados désireux de nager parmi les requins blancs et les raies manta. «Et puis, avec les découvertes récentes de gaz et de charbon, le gouvernement semble moins préoccupé par le développement du secteur», ajoute-t-elle, alors que le tourisme pèse environ 4% du PIB mozambicain.

«Si l'on constate que les touristes (étrangers) restent moins longtemps, on voit aussi une forte augmentation du tourisme intérieur», note Nuno Fortes, directeur du marketing de l'Inatur. «C'est un phénomène nouveau.» Un phénomène dont on pourra véritablement juger de l'ampleur une fois les chiffres seront connus, en juin.