Bardé d'une quarantaine de kilos d'équipement, dont une combinaison parfaitement étanche, Andreï s'élance d'un Zodiac. Il pénètre alors pour la première fois dans les eaux de la mer Blanche, une dépendance de l'océan Arctique.

Le centre de plongée Cercle polaire, situé dans le village de Nilmogouba, en Carélie (nord-ouest de la Russie), est l'un des rares endroits au monde où même des plongeurs amateurs peuvent découvrir les fonds marins de l'extrême nord du globe terrestre.«C'est un peu un rêve de gamin. Rien que l'idée de pouvoir plonger au niveau du cercle polaire vaut le voyage», explique Andreï, la cinquantaine, en émergeant d'une eau à 10 degrés après une plongée à une quinzaine de mètres de profondeur.

Pour se rendre à Nilmogouba, il faut s'armer de patience : 30 heures de train et de voiture depuis Moscou, ou alors s'envoler pour Mourmansk puis rouler pendant une demi-journée pour voir le centre se détacher au coeur de la forêt.

Revêtir l'équipement est aussi complexe : vêtements et sous-vêtements thermiques, puis une combinaison en néoprène avec une fermeture éclair étanche identique à celles qu'utilisent les cosmonautes, entre 15 et 20 kilos de plombs et, bien sûr, la bouteille d'air.

Mais une fois sous la surface, c'est un univers unique qui s'étend devant le plongeur immergé dans la pénombre, car l'eau de la mer Blanche est presque noire, en raison des organismes qui y vivent. Le vert foncé des algues y côtoie les jaunes et les roses des coraux mous. Une multitude de méduses flottent, telles des soucoupes volantes en apesanteur. Les sables sont jonchés d'innombrables étoiles de mer.

Pour repérer les poissons et les crevettes qui s'abritent sous les rochers ou dans des algues feuillues, il faut avoir l'oeil.

«La mer Blanche est surtout connue pour sa micro-vie. Il faut avancer très lentement, regarder avec attention sous chaque rocher pour voir l'araignée de mer ou le poisson qui s'y cache», explique Ekaterina Kourmanova, instructrice de plongée de 23 ans.

Pour 250$ la journée (logement, repas et plongée compris), le centre accueille surtout des Russes, mais sa clientèle étrangère commence à se faire plus nombreuse, notamment en hiver lorsque la glace recouvre la mer Blanche.

Car si en été l'eau est parfois trouble, les passionnés sans prédisposition pour la claustrophobie peuvent profiter d'une visibilité presque infinie en plongeant sous la banquise dans une eau flirtant avec les -2°C.

«Sous la glace, ça peut faire un peu peur», prévient, sourire en coin, Ekaterina, tout en soulignant que «l'expérience est inoubliable».