Malgré la dévastation apportée par l’ouragan Maria en septembre 2017, l’industrie touristique de Porto Rico a maintenant le vent dans les voiles. La catastrophe naturelle a poussé les Portoricains à retrousser leurs manches pour rebâtir leur île aux mille charmes. Et en la visitant, on savoure autant le résultat qu’on y contribue.

Xavier Ramirez est heureux de voir des familles portoricaines remplir son petit hôtel de villégiature tous les week-ends. Il y a à peine un an et demi, les clients du Combate Beach Resort n’étaient pas des vacanciers, mais des rescapés de l’ouragan Maria.

« Nous avons été l’une des premières villes à retrouver l’électricité après l’ouragan et on n’a jamais perdu notre alimentation en eau, raconte aujourd’hui le propriétaire du petit hôtel de 47 chambres situé tout près de l’une des plus belles plages de Cabo Rojo, dans l’ouest de l’île. Alors que l’ouragan dévastait la région, nous étions ouverts et complets. On hébergeait nos employés et des familles évacuées », se souvient l’entrepreneur de 33 ans.

Des passants débarquaient aussi à l’hôtel pour recharger leur téléphone, utiliser la génératrice quelques minutes. « Dans toute l’île, les gens se sont vraiment serré les coudes », dit le père de Xavier, Tomas Ramirez.

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Le Capitole de Porto Rico, à San Juan. Comme celui des États-Unis, le bâtiment abrite la Chambre des représentants et le Sénat qui composent l’Assemblée législative bicamérale.

Les hôteliers ont d'ailleurs remarqué un élan d’entrepreneuriat accru dans leur communauté, mais aussi à la grandeur de l’île. Si plus de 200 000 personnes ont quitté Porto Rico après l’ouragan, beaucoup d’autres qui sont restées et qui se sont retrouvées sans emploi se sont lancées en affaires. Et l'industrie touristique en profite.

« Le nombre de restaurants à Combate Beach a plus que doublé. Il y a plus de services. Oui, certaines de nos attractions ont été transformées par l’ouragan, la nature se remet toujours, mais nous sommes ouverts ! »

Ce constat semble vrai pour toute l’île de Porto Rico.

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C’est à Rincón, sur la côte ouest de l’île, que les surfeurs trouvent les plus belles vagues.

Si on remarque encore des bâches bleues qui servent de toit à certaines maisons, quelques hôtels à la peinture écaillée, une poignée de panneaux routiers bringuebalants et des cratères formés par des arbres arrachés, signes du passage de la tempête, c’est d’abord l’enthousiasme qui se dégage de l’industrie touristique qui retient l’attention. La grande majorité des hôtels ont subi une cure de jouvence et ont rouvert leurs portes. Les plages, si elles ont été érodées par les vents et les pluies torrentielles, sont couvertes de vacanciers.

« Les gens nous demandent encore comment ils peuvent aider Porto Rico à se remettre. Le meilleur moyen est de passer leurs vacances ici », dit Tomas Ramirez. Le New York Times, qui a nommé Porto Rico destination numéro 1 de 2019, donne le même conseil.

Plage et plaisir

Une fois sur place, rassurez-vous, on est loin d’avoir l’impression de faire la charité. Le charme de l’île opère. Et son sens de la fête.

« Vous vous imaginez la vie qu’on vit ici. Après votre départ, je vais fermer mon magasin et aller surfer », dit Erdogan, propriétaire d’une boutique de bijoux turcs dans le Vieux-San Juan, qui a convaincu son frère jumeau de le rejoindre dans « l’île de l’enchantement », surnom de Porto Rico.

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Des perroquets portoricains dans une volière de la forêt nationale d’El Yunque

Ici, toutes les raisons sont bonnes pour faire la fête. L’auteure de ces lignes pensait être tombée sur une fête de rue en débarquant un lundi matin dans le Vieux-San Juan. La musique portoricaine retentissait dans la petite calle Tanta. On s’attendait à voir un stand de nourriture de rue sous une petite tente colorée érigée dans la rue, mais c’est avec stupéfaction que nous y avons plutôt trouvé… un cercueil. Comme le veut la tradition locale, les invités qui dansaient et jasaient autour tenaient tous à la main un éventail portant l’image du défunt. Aucun doute : Porto Rico sait faire face à l’adversité.

Le drôle de statut de Porto Rico

Ancienne colonie espagnole conquise par les États-Unis en 1898, Porto Rico a toujours à ce jour un statut bien unique, soit celui de territoire non incorporé des États-Unis ou, en d’autres termes, une colonie. Ce que ça veut dire ? Les Portoricains ont la citoyenneté américaine, mais ne peuvent pas voter lors des élections présidentielles. Ils ne versent pas d’impôt au gouvernement fédéral américain, mais choisissent un élu qui les représente à la Chambre des représentants des États-Unis… sans droit de vote. Depuis une centaine d’années, les Portoricains sont divisés sur la question de rejoindre formellement ou non les États-Unis en devenant le 51e État. Le dernier référendum de 2017 sur la question a récolté 97 % d’appuis, mais seulement un quart de la population y a participé. Depuis Maria, le soutien à cette option a gagné en popularité, selon les sondages.