(Lima) Un million et demi de touristes l’ont visité l’an dernier. Mais depuis un mois, le célèbre Machu Picchu est désespérément vide : à cause de la pandémie de coronavirus, le Pérou s’est refermé sur lui même, mettant à mal tout le secteur, jusque-là florissant.

« Le Machu Picchu est la face visible du tourisme au Pérou », mais « il y a zéro tourisme depuis le 16 mars, en application du décret » des autorités, déclare à l’AFP José Bastante, le responsable de la citadelle inca construite il y a près de six siècles.

« Cela représente un vrai problème pour tout le tourisme » dans le pays, ajoute-t-il, expliquant que le Machu Picchu « est actuellement surveillé par le personnel minimum ».

À une dizaine de kilomètres de là, les propriétaires des restaurants et hôtels d’Aguas Calientes, qui voient passer normalement des flots de touristes se rendant sur le site archéologique, rongent leur frein, contraints de puiser dans leurs économies pour tenir le choc.

Depuis son ouverture au tourisme en 1948, c’est seulement la deuxième fois que la citadelle inca doit fermer ses portes. La première ce fut en 2010, un tronçon de la voie ferrée qui mène au Machu Picchu avait été emporté par la crue d’un fleuve.

L’entreprise ferroviaire PeruRail a suspendu la déserte du site, classé au patrimoine mondial de l’Humanité depuis 1983. Seules des marchandises arrivent à Aguas Calientes.

La situation n’est guère meilleure dans l’Amazonie péruvienne, submergée par l’avalanche d’annulations d’hébergements ou d’excursions.

La région de Loreto, à proximité du lieu où le fleuve Amazone prend sa source, est une des zones du Pérou les plus affectées par le nouveau coronavirus, bien qu’elle soit faiblement peuplée.

« Les communautés (indigènes) ont décidé de rentrer à l’intérieur de leurs terres et d’éviter le contact avec l’extérieur. C’est une façon de nous défendre avec nos moyens, car nous sommes dans une situation d’abandon », a expliqué Alfonso Lopez, dirigeant de la communauté amazonienne kukuma, au quotidien El Comercio.

« Avec la pêche ou la récolte de bananes ou de manioc, beaucoup réussiront à résister durant le confinement, mais ce ne sera pas suffisant », ajoute-t-il.

Tourisme « totalement mort »

La capitale, Lima, avait attiré des milliers de visiteurs en 2019 avec les Jeux panaméricains, mais à présent, ses 5700 hôtels sont vides. Seuls 17 établissements sont destinés à recevoir les passagers récemment arrivés au pays et mis en quarantaine. Les factures sont prises en charge par le gouvernement.

Le Pérou comptabilise jusqu’ici 12 491  cas, dont 274 décès.

« À la mi-mars, le taux d’occupation a baissé. Nous survivons, car nous avons quelque 70 personnes placées en quarantaine que nous hébergeons », explique à l’AFP le gérant d’un hôtel du quartier financier.

Cet établissement tourne avec un tiers de son personnel. « Le reste est à la maison, en train de toucher son salaire », explique le gérant qui ne souhaite pas donner son nom, ni celui de l’hôtel.

En 2019, les établissements de Lima de trois à cinq étoiles avaient un taux d’occupation de 80 %, selon la chambre nationale du Tourisme (Canatur).

« Depuis 40 ans, aucune autre crise dans le tourisme n’a été aussi grave que celle-ci », confie à l’AFP le président de Canatur, Carlos Canales. « Pour nous, cette situation, c’est mortel. Nous sommes en soins intensifs », dit-il.

Les pertes pour le secteur pourraient s’élever à quelque 4 milliards de dollars au Pérou cette année, estime Canatur.

Les prévisions tablent sur un million de touristes au Pérou cette année, contre 4,4 millions l’an dernier.

« La situation est particulièrement grave, nombre d’entreprises vont fermer », souligne Carlos Canales.

Le tourisme est « totalement mort, car les frontières sont fermées », résume le président de l’Association des hôtels et restaurants du Pérou, Blanca Chavez.

Elle explique que l’effondrement du tourisme « est en train de frapper énormément de gens », car c’est « une chaîne », composée d’agents, d’hôteliers, de restaurateurs et de chauffeurs de taxi.