Au parc Torres del Paine, en Patagonie chilienne, la nature est à la fois hostile et magnifique. Le vent est particulièrement violent. Les autorités ont d'ailleurs pris soin de signaler sur la carte du parc les sites les plus décoiffants, histoire de mettre en garde les visiteurs.

L'un de ces sites se trouve justement au coeur d'un petit sentier de randonnée particulièrement populaire, qui offre un joli point de vue sur une chute impressionnante, le Salto Grande, et sur les Cuernos del Paine, ces immenses montagnes de granit qui présentent des teintes contrastées au sommet et à la base.

Le vent alimente des vagues chaotiques sur le lac Nordernskjöld, juste en face des Cuernos. Soudainement, une rafale soulève un nuage d'écume, qui se dirige rapidement sur les randonneurs. Ceux-ci ont à peine le temps de se détourner que déjà, la rafale les atteint. Les plus légers ont peine à demeurer debout. Heureusement, la rafale passe, et les randonneurs peuvent reprendre la promenade.

La force du vent a eu de tristes conséquences à la fin de 2011 lorsqu'un incendie s'est déclaré dans cette section du parc. Alimenté par le vent, il a détruit des kilomètres carrés de forêts.

Curieusement, cette catastrophe a donné une étrange beauté au paysage. Les arbres brûlés, encore debout, tourmentés, se détachent fièrement de la belle végétation qui recommence à prendre sa place.

Le sentier de la faune 

Même à l'abri du vent, la vie n'est pas facile pour les habitants du parc.

Notamment les habitants à quatre pattes. Un autre court sentier, surnommé le sentier de la faune, à l'est du parc, permet de le constater.

Une garde-parc a expliqué que cette randonnée passait à travers un secteur prisé des pumas. Ceux-ci sont furtifs, mais il y a quand même des chances d'en apercevoir un. Il devient rapidement évident qu'il s'agit de la salle à manger des pumas. Tout au long du sentier, il y a des carcasses de guanacos, des ossements. Quelqu'un s'est régalé ici.

Il y a aussi des guanacos bien vivants, qui broutent tranquillement sans montrer une grande nervosité. Ces quadrupèdes de la famille des lamas ne savent-ils pas qu'ils risquent de finir leurs jours dans la panse d'un gros félin?

Le sentier suit la limite du parc, marquée par une clôture. Les guanacos peuvent facilement la franchir d'un bond. Mais avec un puma aux trousses, ils ont peut-être plus de difficulté à calculer leur élan, ce qui donne l'avantage au félin. Tous ces ossements montrent que bien des guanacos n'ont pas su s'enfuir.

Les pumas demeurent cependant bien cachés, et la randonnée ne donne lieu à aucune rencontre fâcheuse. Au contraire, un sentier secondaire qui mène à un affleurement rocheux réserve une surprise agréable: une vue impressionnante sur les Torres des Paines, ces trois piliers granitiques qui donnent leur nom au parc, mais surtout, des peintures rupestres. Celles-ci auraient été réalisées par des autochtones, qui voulaient signaler la présence de gibier dans le secteur.

À chacun sa randonnée

De retour à l'hôtel, un petit drame montre que même sur ce terrain, isolé dans une île du lac Pehoé, la vie n'est pas très facile dans le parc. Le chaton de l'hôtel a une sérieuse frousse lorsqu'un renard, arrivé dans l'île on ne sait comment, le prend en chasse. Le chaton réussit à se réfugier sur un arbre, mais le renard ne se laisse pas démonter. Il s'installe sur la pelouse, superbe, bien décidé à prendre sa revanche.

Le parc Torres del Paine, situé à environ 5 heures de route au nord-ouest de Punta Arenas, est reconnu pour les grands treks qu'on peut y réaliser. Le grand tour des Cuernos et des Torres peut prendre de 8 à 10 jours et doit être fait en autonomie complète. Le circuit W (parce que le sentier a cet aspect lorsqu'on le regarde sur une carte) prend un peu moins de temps et peut être fait avec l'aide de chevaux, qui transportent les bagages.

Mais le parc peut aussi donner lieu à de petites randonnées à la journée et à de petites croisières sur les lacs Pehoé et Grey. Encore faut-il avoir l'estomac solide: avec le vent, les vagues de ces lacs n'ont parfois rien à envier à celles de la mer.