C'était en décembre en Terre de Feu. Le groupe s'attendait à des températures de 17-18 °C, mais les six marcheurs se sont retrouvés devant des conditions atmosphériques désastreuses. Liette d'Amour, passionnée de trek, parle de ce voyage marquant.

Liette d'Amour, 54 ans

Trek en Patagonie et Terre de Feu

Durée : 3 semaines

Comment a germé l'idée de ce voyage, et pourquoi avoir choisi cette destination ?

Chaque année, je pars pour un trek quelque part dans le monde. Cette fois-ci, des amis voulaient se joindre à nous, mais ils n'avaient jamais fait de trek. C'était pour souligner leurs 60 ans. Nous avons opté pour la Patagonie puisqu'il n'y avait pas de contrainte de mal des hauteurs. Puis, nous voulions ajouter une note exotique avec la Terre de Feu, aller quelque part où peu de gens sont allés. Nous avons fait le trek le plus austral du monde, Los Dientes de Navarino dans l'île de Navarino, quasiment la dernière île du bout du monde dans l'hémisphère Sud, en complète autonomie.

Aviez-vous des attentes ou des peurs face à ce voyage avant le départ ?

Nous espérions voir quelque chose de magnifique. Notre trek était cité dans tous les livres comme étant le plus beau au monde. Nous savions aussi que ce serait un réel défi. La Terre de Feu, c'est le dépaysement total.

Si vous aviez à décrire un moment fort de ce voyage, un moment charnière, quel serait-il ?

Une heure après le départ pour cinq jours, la tempête de neige s'est levée, nous n'avions pas de crampons, la couche de neige nous empêchait de voir où l'on posait nos pieds. Le vent était aussi un élément extrêmement important, au point d'en lever de terre. Après une journée, nous sommes arrivés au campement très tard, les pieds complètement mouillés et rien pour se sécher.

Nous avons croisé deux jeunes Australiens qui venaient de traverser, de peine et de misère, le col vers lequel on se dirigeait. Ils nous ont informés que les conditions étaient très dangereuses. Le lendemain, la tempête sévissait toujours. Le moment charnière, c'est là : nous nous sommes tous réunis pour décider de la suite des choses. Continuer ou non. L'engagement que l'on s'apprêtait à prendre nous a vraiment soudés. Nous étions ensemble, peu importe ce qui allait arriver et personne ne devait avoir de doute.

Nous avons compris que l'on pouvait tous compter les uns sur les autres. Si nous n'avions pas été convaincus de notre solidarité, nous n'aurions pas poursuivi notre périple.

En quoi ce voyage a-t-il été inspirant pour vous ?

Le voyage a confirmé que malgré toute la planification possible, il y aura toujours des imprévus, que ça fait partie intégrante de l'aventure. Il faut savoir composer avec tout ça. Dans notre trek, il a plu, neigé, venté, grêlé, tout ça pendant cinq jours. C'est long. Ensemble, nous avons décidé de composer avec cette réalité-là et, aussi étonnant que ça puisse paraître, nous avons eu du plaisir. Pour y arriver, ça prend de l'entraide, de la solidarité et de l'écoute. Dans un trek, il y a des journées où c'est toi qui es en forme et qui soutiens l'autre et des journées où ce sont les autres qui se sentent mieux que toi. À chacun des treks que j'ai faits, lorsque quelqu'un n'est plus capable d'avancer, nous vidons son sac pour diviser la charge au groupe. C'est une aventure que l'on vit un pas à la fois. Pour moi, il n'y a rien de plus « moment présent » qu'un trek.

Que vous reste-t-il de ce voyage ?

Le plaisir, c'est d'aller dans des endroits peu connus, peu fréquentés. La beauté qui émeut, ces moments où tu arrives quelque part et où c'est tellement beau que les larmes te viennent aux yeux. La planète est remplie de ces beaux endroits-là. Plus je voyage, plus je réalise que je n'ai rien vu. Il reste tant de choses à faire, tant de choses à voir. Je ne veux jamais retourner au même endroit, je suis poussée par cette idée-là, de pouvoir en voir le plus possible.

À travers les voyages, ce qui marque, ce sont les rencontres que l'on fait. On a tellement à gagner lorsque l'on fait preuve d'ouverture. Ce qui m'anime, c'est connaître l'autre, échanger sur ses différences. Il y a des façons de vivre et d'être qui sont complètement différentes des nôtres. Il m'est arrivé d'être à l'autre bout du monde, de ne pas parler la même langue et d'arriver quand même à communiquer. Ça nous fait réaliser que l'on est tous humains.

Photo fournie par Liette d’Amour

Des conditions difficiles pendant le trek.

Photo fournie par Liette d’Amour

Navarino